THE WHORES OF BABYLON - Metropolis (Candlelight) - 21/02/2015 @ 23h29
On a tendance à l'oublier, mais les compilations ont joué un rôle majeur dans notre éducation musicale. Découvrir un groupe avec ses hits ou ses trésors cachés. Appréhender un genre ou un label. Les tributes, les BO de films, les réalisations à thème, les bilans de festivals, les actions caritatives, le tape-trading et autres blind-tests... Les raisons de s'en procurer ou d'en bricoler nous-même ne manquaient pas. Adolescents et néophytes, on les envisageait parfois, cherchant à évaluer leur intérêt, pesant le pour et le contre. En 1995, un label anglais actif depuis moins de 2 ans présentait son catalogue: Candlelight. Les sélectionnés? Emperor, Opeth, Eterne, Korpse, Solstice, The Whores of Babylon, Beyond Dawn et Enslaved. Pour les curieux, voir ICI. Un programme 100% underground et découverte pour un bilan des plus satisfaisants. Mon podium? Les morceaux d'Opeth, Solstice et The Whores of Babylon. La suite vous la devinez, je me suis procuré les albums concernés, à savoir Orchid, Lamentations et Metropolis.

En préambule, ne pas confondre les Britanniques de The Whores of Babylon avec les Finlandais de Babylon Whores. Anecdote intéressante, les plus avisés ne manqueront pas de pointer la ressemblance du visuel de Metropolis avec celui de Converging Conspiracies de Comecon paru quelques mois plus tôt (coucou TarGhost).
Ce n'est pas une coïncidence, il s'agit de 2 peintures du XVIème siècle réalisées par le maître néerlandais Pieter Brueghel l'Ancien. Mais parler de pompage serait déplacé, d'abord parce que ces 2 formations évoluaient dans des registres diamétralement opposés, ensuite parce que le choix d'une telle illustration reflète l'identité de TWOB.
Et justement poursuivons ce point culture. Située en Mésopotamie dans l'Irak actuel, Babylone était l'une des plus grandes villes du monde antique et la première mégapole de l'histoire. Elle connut son apogée au VIème siècle avant J.C. au cours du règne de Nabuchodonosor II. Le site archéologique couvre près de 1 000 hectares et certaines estimations avancent le chiffre de plus de 100 000 habitants pour la seule enceinte intérieure. Porté par plusieurs récits bibliques et auteurs gréco-romains, le mythe du déclin de Babylone a renforcé sa renommée.
Outre la Tour de Babel, les fameux Jardins Suspendus étaient considérés comme l'une des 7 merveilles du monde antique, bien que leur existence n'ait pas été formellement prouvé. Intéressant non?

On le sait, les années 90s sont synonyme d'innovations, de prises de risques et de fusions des genres.
Si de nombreux groupes metal se sont inspirés de la scène gothique, le contraire est aussi vrai, à l'instar de formations comme Lacrimosa, Love Like Blood ou Bay Laurel. Jugez donc. Bristol, l'année 1992. Julian "Gobz" Hill (instruments & prod) et Shaun Atkins (chant & textes) fondent The Whores of Babylon. Avec leur dégaine de thrashers californiens, les Anglais ne payent pas de mine et pourtant... Au printemps 1993 la sortie d'Eternal, une Demo 6 titres, dévoile un gothic rock conciliant claviers emphatiques et rythmiques metal. Quelques mois plus tard, le duo pousse le bouchon plus loin avec un EP remixant de nouveaux morceaux. L'un est trituré dans une optique techno puis rave, l'autre subissant la relecture d'un groupe de potes... Portishead. Vous avez bien lu. Bristol patrie du trip-hop qui s'apprête à conquérir le monde grâce à Massive Attack, Tricky et consort. Mais attendez un peu... Thrash, Gothic Rock, BO de Films, Techno/Rave, Trip-Hop... Qu'est ce que vous m'avez foutu là? C'est quoi cette overdose d'étiquettes? La recette d'un OMNI (objet musical non identifié)? Mais le plus étonnant reste sans doute la signature de The Whores of Babylon sur un label de metal extrême, Candlelight, qui permet en outre à Gobz de produire l'EP de leurs compatriotes et collègues de label: Eterne.

Le 1er album de The Whores of Babylon (et 6ème référence du label Candlelight) sort en juin 1994. 15 titres (dont 3 issus de la Demo Eternal et 2 de l'EP de remix) pour presque 74 minutes de musique. Ça fait beaucoup. Excès pénalisant ou risque calculé, réponse plus loin. Dans le détail, Metropolis comprend 9 morceaux, 5 instrumentaux et un remix. Non content d'avoir tout composé, Julian Hill s'est chargé de l'essentiel de l'instrumentation, de l'enregistrement et du mixage. A noter cependant la contribution de Dave McDonald, ingénieur du son et membre additionnel de Portishead, auteur du mixage du fameux The Fall of Agade (le morceau présent sur la compil Candlelight). Si Julian Hill se charge des guitares/claviers, il se dispense de section rythmique. Vous ne trouverez ni basse ni batterie sur Metropolis, la programmation allant de la BAR à différents beats (du hip-hop à la techno). Outre Shaun Atkins derrière le micro, Julian Hill a fait appel à une dizaine de guests appelés Disciples of Babylon qui apparaissent sur une bonne moitié de l'album (plages 2/5/6/8/9/11/12). Notez que 2 d'entre eux, le guitariste Joseph White et la choriste Debra Rhodes-Grant figurent sur les photos du livret, ayant rejoint TWOB en tant que musiciens live. Mais inutile d'énumérer les guests pour l'instant, passons plutôt à l'analyse de la musique.

Explorons Metropolis, et dégageons d'emblée la dernière plage, l'insupportable N.D.E. Mix de Carnal Desires. 2 ans avant que Dark Tranquillity ne se prenne pour Hocico le temps d'un morceau (Archetype sur l'EP Enter Suicidal Angels), The Whores of Babylon se la joue Boris (Philippe Dhondt et sa Soirée Disco). De mauvais goût et terriblement daté, une bien mauvaise façon de conclure Metropolis. Passons aux instrumentaux. Les choeurs chamaniques et l'arpège de guitare so british de Garden of Tranquility instaurent une atmosphère mystérieuse et mélancolique m'évoquant Empty Lies the Oaken Throne extrait de Lamentations, le 1er album de Solstice paru 2 mois plus tard. Eternal Act 2 (dont le 1er acte figure sur la Demo éponyme) dispense une atmosphère inquiétante à base de samples, murmures et claviers hantés. Symphony in Oblivion poursuit le thème initié sur le morceau Oblivion et aurait très bien pu servir à clôturer Metropolis. Le parfait climax, épique, à l'atmosphère sombre et orageuse. Lost Souls est une compo terriblement accrocheuse. Le thème aux claviers a un rendu plus asiatique que moyen-oriental et les parties de guitares acoustiques de Joseph White sont excellentes. Eve Of Creation et son atmosphère de désolation n'inspirent rien de particulier. Judicieusement placés (4/7/10/11/14), ces instrumentaux sont autant d'aérations bienvenues pour relancer notre intérêt, apportant une dimension cinématographique.

Principalement mid-tempos, les compositions de Julian Hill connaissent assez peu de variations, ce dernier misant sur le caractère hypnotique des différentes atmosphères traversant Metropolis. Le puissant Stigmata aux riffs thrash remporte la palme de la vitesse, tandis qu'Oblivion, complainte monolithique de + de 8 minutes aurait pu figurer sur un album de doom. Techniquement assez pauvres, ses parties de guitares servent surtout à apporter de la densité. S'il s'avère doué en matière d'ambiances et de mélanges de genres, on lui sait gré d'avoir fait appel à des intervenants extérieurs pour enrichir son panel instrumental. Sublimé par le violon de Sarah Forsythe (qu'on aurait voulu présent sur d'autres titres!), le hit The Fall of Agade bénéficie de l'apport de 2 guests aux backings et percussions. Auteur d'un solo sur Stigmata, le guitariste Joseph White ressort l'acoustique en rythmique pour l'entrainant Lamia. Côté chant, le constat est assez similaire. Shaun Atkins oeuvre dans un registre Eldritchien de circonstance, maitrisé mais surtout terriblement monocorde et lassant sur la durée. Le duo britannique en a conscience et a convié pas moins de 8 personnes pour l'assister. Côté hommes, outre les guests de Fall of Agade, Paul Hale (Valve) apparait sur Black Tears et Empire of the Jackal. Chez les femmes, hormis Debra Rhodes-Grant à l'oeuvre sur le refrain de Stigmata, 2 choristes apparaissent sur Oblivion, une autre à la narration sur Black Tears, mais surtout Beth Gibbons (Portishead) en personne chante sur Lamia. Une belle valeur ajoutée.

Comme on pouvait s'y attendre, Metropolis souffre de longueurs et aurait gagné à être plus concis. Purgé de quelques titres (dont le remix), ses qualités seraient ressorties plus nettement. Inspiré, le duo Hill/Atkins se retrouve freiné par ses limites instrumentales. C'est pourquoi ils engageront des musiciens afin d'acquérir l'expérience live nécessaire à leur maturation. Malheureusement le soutien inexistant de Candlelight ne leur permettra pas de dépasser le statut de groupe précurseur/culte. Pire encore, Julian Hill a révélé que non content de leur avoir fourni une avance studio misérable, Candlelight ne leur aurait payé aucune royalties, rééditant Metropolis dans leur dos en 1999. Leur situation contractuelle explique en partie le split de The Whores of Babylon en 1998 après plusieurs Demos et un EP. L'autre raison étant que le duo Hill/Atkins souhaitait évoluer dans un autre registre. Délaissant le gothic rock symphonique, ils fondent Soundisciples, auteur de 2 albums de metal indus en 1999 et 2002. Depuis The Whores of Babylon a renait de ses cendres, cette fois sans Shaun Atkins, Julian Hill ayant repris le chant à son compte. Metropolis a été réédité par le groupe sur sa propre structure LoveGun records en 2006. C'est cette version (doté d'un artwork remanié) que vous trouvez ci-dessous.



Si vous êtes fans de gothic rock, de musiques de films et que le Into the Pandemonium de Celtic Frost fait parti de vos albums de chevet, ce Metropolis de The Whores of Babylon pourrait vous intéresser.


Rédigé par : forlorn | 1994 | Nb de lectures : 1939


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Commentaire
Moshimosher
Membre enregistré
Posté le: 22/02/2015 à 20h36 - (31575)
Tiens, le morceau Lost Souls m'évoque plus la musique hispanique qu'asiatique...

Tout à fait d'accord pour ce qui est de l'utilisation du violon qui est vraiment trop limitée...

Bon, certains titres intéressants(notamment Lost Souls et The Fall of Agade), mais pas sûr d'être un gros gros client du groupe...




TarGhost
Membre enregistré
Posté le: 23/02/2015 à 22h30 - (31576)
Aahhh...cette compil que tu évoques en début de chronique, sortie chez Candlelight en 1995, marque pour moi une rencontre avec un titre...puis un album qui ne m'a jamais lâché : "Orchid" d'Opeth. Que je considère d'ailleurs toujours comme un must-have intemporel.

Quant à cette galette de Whores of Babylon, je suis complètement passé à côté à l'époque, trop occupé à ratisser les catalogues vpc de metal extrême ;)
Je vais lui redonner une deuxiême chance aujourd'hui tiens, ça m'a l'air plutôt pas mal...



forlorn
Membre enregistré
Posté le: 25/02/2015 à 13h41 - (31580)
@ Moshi: Pour Lost Souls, c'est le thème aux claviers qui a un rendu asiatique, les parties de guitare acoustique étant plutôt hispanisantes.

@ TarGhost: Même vécu et ressenti à propos de la compil et du morceau The Apostle In Triumph. Cool.

Moshimosher
Membre enregistré
Posté le: 26/02/2015 à 22h35 - (31581)
Hé, hé, hé... comme quoi, je dois être plus sensible aux guitares qu'aux claviers... Je vais de ce pas me réécouter ce morceau...

Moshimosher
Membre enregistré
Posté le: 26/02/2015 à 22h39 - (31582)
Effectivement... je devais être un peu distrait quand j'ai écouté le morceau...

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