JAMES MURPHY - Convergence (Shrapnel/Roadrunner) - 12/07/2014 @ 23h44
Qu'est ce qu'un guitar hero? Un musicien alliant virtuosité technique et impact historique. Le terme étant officieux, chacun l'appréhende en fonction de l'état de ses connaissances et de ses critères d'exigence. Qu'ils soient liés à un groupe ou dévolus à la cause instrumentale (les shredders - toi aussi avoue, tu as pensé aux Tortues Ninja -), ces musiciens ont acquis leur réputation en partie grâce à une stabilité qui a tendance à se perdre, notre époque favorisant la multiplication de projets et le boulot de mercenaire. Le metal extrême a aussi vu éclore pléthore de guitaristes de premier ordre. L'un d'eux fait état d'une carrière à la richesse hors-norme, parsemée d'opportunités et de coups du sort: James Murphy. De ses précoces débuts à la sortie de son premier album solo, cet Américain originaire de Portsmouth en Virginie n'a pas chômé, c'est le moins qu'on puisse dire.
Une rétrospective s'impose.
1987: Le line-up d'Agent Steel (speed/thrash) vole en éclats. Agé d'à peine 20 ans, James Murphy est engagé comme soliste pour la tournée promotionnelle de l'album Unstoppable Force. Il les accompagne en Europe, le concert donné au légendaire Hammersmith Odeon de Londres étant immortalisé sur VHS (Mad Locust Rising). Suite à cette première expérience pro, James Murphy est envisagé chez Hallows Eve (speed/thrash) mais la greffe ne prend pas. La raison? Chuck Schuldiner, le maître à penser de Death lui offre l'opportunité de le seconder. Associé à la section rythmique de Massacre (Terry Butler/Bill Andrews), James Murphy participe à l'enregistrement du 3ème album, Spiritual Healing, sorti en février 1990. La tournée achevée, il enchaîne avec un remplacement chez un autre poids lourd du death metal: Obituary. Le résultat? Cause of Death (septembre 1990), considéré par de nombreux fans comme leur meilleur album. Cependant le retour d'Allen West conduit Obituary à se séparer prématurément de James Murphy. Avec 2 classiques enregistrés en quelques mois, ce jeune prodige de la six-cordes est désormais une référence incontournable. En conséquence les sollicitations se multiplient. A commencer par les Anglais de Cancer, de passage aux Morrisound studios, qui lui offrent tous les soli de leur 2ème album: Death Shall Rise. Bien qu'il n'ait jamais été reconnu comme membre à part entière, l'Américain figure sur la photo de groupe (pour booster leur promo) et les accompagne en tournée. Plus anecdotique, James Murphy participe en tant que guest à des albums de Gorguts (Considered Dead - 1991), Malevolent Creation (Retribution - 1992) et Solstice (Solstice - 1992). En effet ce dernier a d'autres projets...
Cette fois James Murphy monte sa propre formation: Disincarnate. Piochant dans le vivier underground, il s'entoure de musiciens méconnus. Pour la Demo Soul Erosion, le batteur Alex Marquez (Malevolent Creation, Solstice) les dépanne. Quant à son successeur, Tomas Viator fera plus tard parler de lui dans Shrum et Acid Bath. L'album Dreams of the Carrion Kind devient lui aussi culte (voir la chronique de TarGhost ICI), mais Disincarnate est à son tour tué dans l'oeuf. En quête de stabilité et déterminé à prendre son avenir en mains, James Murphy met pourtant un terme à l'aventure après une poignée de dates sur le sol US. La raison? Une nouvelle opportunité à ne pas rater. En panne de soliste après le départ de l'emblématique Alex Skolnick et la greffe loupée avec Glenn Alvelais (ex-Forbidden), les Californiens de Testament démarchent James Murphy. Leur fructueuse collaboration (1993-1996) débouche sur un fantastique album studio (Low - 1994, voir ICI) et un live comprenant des morceaux acoustiques (Live at the Fillmore - 1995). Niveau contributions, James Murphy participe à à un album de Broken Hope (Repulsive Conception - 1995), un tribute à Rush (Working Man - 1996) et prend un abonnement chez Artension (Into the Eye of the Storm - 1996). Mais l'Américain ne tient décidément pas en place, de nouveaux défis le poussant à quitter Testament. James Murphy ambitionne de réaliser un album solo qu'il choisit également de produire. En ajoutant cette corde à son arc, sa réputation grandira encore dans les années à venir. Mais de son CV de producteur nous parlerons une autre fois. Venons-en maintenant au plat de résistance.
Signé chez Shrapnel records (la pouponnière à shredders de Mike Varney, allant du blues au metal) et distribué par Roadrunner, Convergence sort en août 1996, avec le visuel clichesque (mais esthétique) du guitariste prenant la pose. Voyons la fiche technique. James Murphy prend en charge l'enregistrement, à l'exception de la section rythmique confiée à Steve Fontano (Cacophony, Chastain, Marty Friedman, Tony MacAlpine). Assisté de Christopher Ash (Artension, John West, Vinnie Moore), James Murphy s'essaye aussi avec succès au mixage, le mastering étant confié à l'inconnu Ross Nyberg. Découvrons maintenant les partenaires de jeu de notre guitar hero. Présente sur tout l'album, la section rythmique se compose du bassiste Brad Russell (collaborateur de Pat Travers et autres blues band) et du batteur Deen Castronovo (dont l'actualité du moment comprend Geezer, Ozzy Osbourne et Steve Vai). Le claviériste Matt Guillory (futur pilier de James LaBrie en solo et pensionnaire de nombreux groupes de metal prog, dont Zero Hour) joue sur 4 des 9 morceaux de Convergence. Alors bien sûr, beaucoup sont allergiques à la musique instrumentale et aux albums de guitaristes en particulier. On ne saurait leur en vouloir car les démonstrations techniques ne parviennent généralement pas à masquer l'indigence du résultat, egotrip dépourvu de feeling et de créativité. L'exercice est difficile, hautement casse-gueule même. La question est donc: accordez vous du crédit à James Murphy? Pas vraiment né de la dernière pluie, il nous a concocté un album hybride au carrefour des genres (thrash next-gen, metal prog, jazz/fusion) alternant plages instrumentales et morceaux chantés. On n'en attendait pas moins d'un musicien tel que lui.
Les instrumentaux: Convergence, Vision, Red Alert (Tony Newton cover), Shadow's Fall, Tempus Omnia Revelat
Le morceau-titre nous rappelle le rôle de James Murphy dans la réhabilitation de Testament, on croirait entendre une chute studio de Low. Vision quant à lui est beaucoup plus riche et exubérant, passant de la folie (l'entame) à la finesse (le break central). Si le CV du bassiste Tony Newton est des plus impressionnants (il figure au menu de très nombreux classiques de la Motown, ainsi que de free-jazz et de rock), la reprise de Red Alert est l'archétype du morceau inutilement démonstratif et chiant, la partition de Brad Russell servant de socle à une multitude de soli signés James Murphy, Greg Howe (invité pour l'occasion) et Matt Guillory. Clairement dispensable. Avec Shadow's Fall, retour à l'hybridation de thrash et de prog décomplexé. Plutôt conventionnel au premier abord, ce morceau évolue de façon inattendue dans sa dernière ligne droite, avec l'ajout de parties de guitares acoustiques agrémentées d'un piano discret et d'une basse fretless. L'instrumental de clôture, Tempus Omnia Revelat, prolonge l'expérience dans un registre atmosphérique. Un supplément de feeling bienvenu qui fait de ce morceau l'un des points d'orgue de l'album avec Vision.
Les morceaux chantés:Since Forgotten, The Last One, Touching the Earth, Deeper Within
La liste des guests a de quoi attirer le chaland. Jugez plutôt: Devin Townsend, Chuck Billy, une choriste et 2 membres de Haji's Kitchen (groupe américain méconnu de prog dont le vocaliste depuis 2011 n'est autre que Daniel Tompkins de Tesseract). Devin Townsend participe à Since Forgotten et The Last One en tant que vocaliste. Comme à son habitude, il ne chante/joue que ce qu'il compose lui-même. Il est donc l'auteur des textes et des lignes vocales de ces morceaux, assurant aussi les claviers sur The Last One. Le génie canadien sublime les compositions de monseigneur sweeping qui paraitraient bien fades sans lui. A noter le final plutôt prenant de Since Forgotten (finesse de la section rythmique + acoustique). Touching the Earth c'est la power-ballade dans la grande tradition des classiques de Testament (The Legacy, Return to Serenity, Trail of Tears). Chuck Billy et la choriste Michelle Rae Dean s'adaptent parfaitement à cet excellent morceau propice à l'introspection et aux rêveries contemplatives. A noter que les paroles sont signées James Murphy. On termine avec Deeper Within, composition écrite en collaboration avec Eddie Head (guitare, textes, mélodies vocales) et Eddie Ellis (chant) de Haji's Kitchen. Après une entame péchue, ce titre traine un peu trop en longueurs (+ de 8 minutes) en dépit d'influences vocales piochées chez Alice in Chains et de démonstrations instrumentales plutôt bien senties.
En conclusion, Convergence est une bonne photographie de James Murphy en 1996. Elle représente un musicien doué mais indécis, ayant du mal à canaliser et trier ses idées. Il y a donc à boire et à manger. A retenir: les participations de Devin Townsend et Chuck Billy ainsi que les instrumentaux Vision et Tempus Omnia Revelat.
La suite des aventures de ce guitariste hors-norme au prochain épisode: Feeding the Machine (1999).
Je ne savais pas qu'il avait sorti un album solo en dehors de Disincarnate. J'aime beaucoup ce guitariste, même si je suis incapable de distinguer son style à la première écoute ce qui, je trouve est une qualité car cela prouve qu'il s'intègre bien aux groupes pour lesquels il cachetonne (contrairement à Santolla par exemple). Je croyais aussi que c'était Alvelais sur le mémorable live au Fillmore. Bref j'apprends encore des trucs sur une de tes kros.
Dommage que la maladie l'ait empêché de continuer à jouer les premiers rôles...
bad_taste IP:88.184.190.19 Invité
Posté le: 13/07/2014 à 09h28 - (31025)
salut hammerbattalion et forlorn
A titre d'information James Murphy a sorti en 1999 un deuxième album solo qui se nomme "feeding the machine".
Sinon pour revenir à la chronique je la trouve très intéressante car bien détaillée mais tu oublies la participation de James Murphy chez Agressor. Par contre, la reprise de "red alert" je la trouve pas chiante mais excellente car bien dynamique avec des passages vraiment bien sentis. Tu trouves que faire plusieurs styles dans un même album c'est être "indécis" ? J'y vois plus un musicien qui se fait plaisir en allant au delà de ce que les gens attendent de lui. Merci pour la critique.
Cordialement.
nocturnus1977 IP:37.160.57.61 Invité
Posté le: 13/07/2014 à 09h34 - (31027)
Gros fan du titre Red Alert...monstrueux
forlorn Membre enregistré
Posté le: 13/07/2014 à 09h55 - (31029)
@ bad_taste: salut à toi.
Je termine ma kro en citant Feeding the Machine que j'ai prévu de rédiger dans la foulée.
J'évoque ici l'activité de James Murphy pour la période 1987-1996. Sa participation à Agressor est plus récente, c'est pourquoi je n'en parle pas. Je garde de la matière pour la kro de Feeding the Machine.
Sinon je partage ton engouement pour la démarche de James Murphy, mais à mon sens Convergence relève du patchwork d'influences pas toutes assimilées. En comparaison, les compos de Feeding the Machine sont nettement plus matures et abouties. Ceci dit Convergence est tout à fait recommandable.
bad_taste IP:88.184.190.19 Invité
Posté le: 13/07/2014 à 10h08 - (31030)
Re forlorn
Il y a méprise car l'information concernant "feeding the machine" était adressée à hammerbattalion.
Merci pour les informations supplémentaires. Tu as raison de garder de la matière pour la suite. Je suis curieux de lire ta chronique sur le deuxième album solo de James Murphy.
A bientôt.
AnusFraicheur Membre enregistré
Posté le: 13/07/2014 à 10h15 - (31031)
moi non plus, je ne connaissais pas cet album. Ca va être une bonne découverte! Super chro.
matthieullica Membre enregistré
Posté le: 13/07/2014 à 11h14 - (31033)
J'ai le "Feeding the machine" en question. Le premier titre est fantastique (découvert sur un sampler à l'époque). Le reste est trop progressif pour moi. J'ai dû l'écouter trois fois d'une oreille distraite.
A noter une pochette signée Dave McKean absolument fantastique, l'une de mes préférées, tous styles confondus.
TarGhost Membre enregistré
Posté le: 13/07/2014 à 11h14 - (31034)
Raaaah, James, mon gratteux préféré aux côtés de Chuck en matière de métal extrême.
Contrairement à hammerbatallion, je trouve que James Murphy a vraiment un style, une patte bien à lui. Ses leads, qu'ils soient posés sur album de Cancer, Obituary, Death ou même Konkhra sur "Weed out the weak" sont aisément identifiables.
Quant à ses embardées solo, j'avoue avoir une petite préférence pour "Feeding the machine", que je trouve un brin plus varié et frondeur que cet excellent "Convergence".
Très bonne chronique as usual, fouillée et détaillé. Well done !
Jeff Hannimalman IP:81.245.222.212 Invité
Posté le: 13/07/2014 à 15h16 - (31039)
Massive cro!
Impressive job!
hammerbattalion Membre enregistré
Posté le: 13/07/2014 à 21h24 - (31041)
Je ne me suis jamais intéressé aux sorties Shrapnel, pas trop fan d'instrumental, mais je vais voir si je peux le chopper kekpart.
Concernant son style, ce n'était pas une critique négative, je ne connais que ses "classiques", mais pour moi aucun rapport entre ses prestations sur Spiritual, Cause Of Death ou Low.
L'un des premiers mercenaires death metal. J'ai vu qu'il est proprio d'un studio qui commence à pas mal tourner.
Entomber Membre enregistré
Posté le: 14/07/2014 à 00h23 - (31042)
Je l'avais acheté à la sortie et j'avais été vachement déçu et du coup j'ai pas dû me le passer beaucoup de fois. Faudrait que je le réécoute à froid.
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Une rétrospective s'impose.
1987: Le line-up d'Agent Steel (speed/thrash) vole en éclats. Agé d'à peine 20 ans, James Murphy est engagé comme soliste pour la tournée promotionnelle de l'album Unstoppable Force. Il les accompagne en Europe, le concert donné au légendaire Hammersmith Odeon de Londres étant immortalisé sur VHS (Mad Locust Rising). Suite à cette première expérience pro, James Murphy est envisagé chez Hallows Eve (speed/thrash) mais la greffe ne prend pas. La raison? Chuck Schuldiner, le maître à penser de Death lui offre l'opportunité de le seconder. Associé à la section rythmique de Massacre (Terry Butler/Bill Andrews), James Murphy participe à l'enregistrement du 3ème album, Spiritual Healing, sorti en février 1990. La tournée achevée, il enchaîne avec un remplacement chez un autre poids lourd du death metal: Obituary. Le résultat? Cause of Death (septembre 1990), considéré par de nombreux fans comme leur meilleur album. Cependant le retour d'Allen West conduit Obituary à se séparer prématurément de James Murphy. Avec 2 classiques enregistrés en quelques mois, ce jeune prodige de la six-cordes est désormais une référence incontournable. En conséquence les sollicitations se multiplient. A commencer par les Anglais de Cancer, de passage aux Morrisound studios, qui lui offrent tous les soli de leur 2ème album: Death Shall Rise. Bien qu'il n'ait jamais été reconnu comme membre à part entière, l'Américain figure sur la photo de groupe (pour booster leur promo) et les accompagne en tournée. Plus anecdotique, James Murphy participe en tant que guest à des albums de Gorguts (Considered Dead - 1991), Malevolent Creation (Retribution - 1992) et Solstice (Solstice - 1992). En effet ce dernier a d'autres projets...
Cette fois James Murphy monte sa propre formation: Disincarnate. Piochant dans le vivier underground, il s'entoure de musiciens méconnus. Pour la Demo Soul Erosion, le batteur Alex Marquez (Malevolent Creation, Solstice) les dépanne. Quant à son successeur, Tomas Viator fera plus tard parler de lui dans Shrum et Acid Bath. L'album Dreams of the Carrion Kind devient lui aussi culte (voir la chronique de TarGhost ICI), mais Disincarnate est à son tour tué dans l'oeuf. En quête de stabilité et déterminé à prendre son avenir en mains, James Murphy met pourtant un terme à l'aventure après une poignée de dates sur le sol US. La raison? Une nouvelle opportunité à ne pas rater. En panne de soliste après le départ de l'emblématique Alex Skolnick et la greffe loupée avec Glenn Alvelais (ex-Forbidden), les Californiens de Testament démarchent James Murphy. Leur fructueuse collaboration (1993-1996) débouche sur un fantastique album studio (Low - 1994, voir ICI) et un live comprenant des morceaux acoustiques (Live at the Fillmore - 1995). Niveau contributions, James Murphy participe à à un album de Broken Hope (Repulsive Conception - 1995), un tribute à Rush (Working Man - 1996) et prend un abonnement chez Artension (Into the Eye of the Storm - 1996). Mais l'Américain ne tient décidément pas en place, de nouveaux défis le poussant à quitter Testament. James Murphy ambitionne de réaliser un album solo qu'il choisit également de produire. En ajoutant cette corde à son arc, sa réputation grandira encore dans les années à venir. Mais de son CV de producteur nous parlerons une autre fois. Venons-en maintenant au plat de résistance.
Signé chez Shrapnel records (la pouponnière à shredders de Mike Varney, allant du blues au metal) et distribué par Roadrunner, Convergence sort en août 1996, avec le visuel clichesque (mais esthétique) du guitariste prenant la pose. Voyons la fiche technique. James Murphy prend en charge l'enregistrement, à l'exception de la section rythmique confiée à Steve Fontano (Cacophony, Chastain, Marty Friedman, Tony MacAlpine). Assisté de Christopher Ash (Artension, John West, Vinnie Moore), James Murphy s'essaye aussi avec succès au mixage, le mastering étant confié à l'inconnu Ross Nyberg. Découvrons maintenant les partenaires de jeu de notre guitar hero. Présente sur tout l'album, la section rythmique se compose du bassiste Brad Russell (collaborateur de Pat Travers et autres blues band) et du batteur Deen Castronovo (dont l'actualité du moment comprend Geezer, Ozzy Osbourne et Steve Vai). Le claviériste Matt Guillory (futur pilier de James LaBrie en solo et pensionnaire de nombreux groupes de metal prog, dont Zero Hour) joue sur 4 des 9 morceaux de Convergence. Alors bien sûr, beaucoup sont allergiques à la musique instrumentale et aux albums de guitaristes en particulier. On ne saurait leur en vouloir car les démonstrations techniques ne parviennent généralement pas à masquer l'indigence du résultat, egotrip dépourvu de feeling et de créativité. L'exercice est difficile, hautement casse-gueule même. La question est donc: accordez vous du crédit à James Murphy? Pas vraiment né de la dernière pluie, il nous a concocté un album hybride au carrefour des genres (thrash next-gen, metal prog, jazz/fusion) alternant plages instrumentales et morceaux chantés. On n'en attendait pas moins d'un musicien tel que lui.
Les instrumentaux:
Convergence, Vision, Red Alert (Tony Newton cover), Shadow's Fall, Tempus Omnia Revelat
Le morceau-titre nous rappelle le rôle de James Murphy dans la réhabilitation de Testament, on croirait entendre une chute studio de Low. Vision quant à lui est beaucoup plus riche et exubérant, passant de la folie (l'entame) à la finesse (le break central). Si le CV du bassiste Tony Newton est des plus impressionnants (il figure au menu de très nombreux classiques de la Motown, ainsi que de free-jazz et de rock), la reprise de Red Alert est l'archétype du morceau inutilement démonstratif et chiant, la partition de Brad Russell servant de socle à une multitude de soli signés James Murphy, Greg Howe (invité pour l'occasion) et Matt Guillory. Clairement dispensable. Avec Shadow's Fall, retour à l'hybridation de thrash et de prog décomplexé. Plutôt conventionnel au premier abord, ce morceau évolue de façon inattendue dans sa dernière ligne droite, avec l'ajout de parties de guitares acoustiques agrémentées d'un piano discret et d'une basse fretless. L'instrumental de clôture, Tempus Omnia Revelat, prolonge l'expérience dans un registre atmosphérique. Un supplément de feeling bienvenu qui fait de ce morceau l'un des points d'orgue de l'album avec Vision.
Les morceaux chantés: Since Forgotten, The Last One, Touching the Earth, Deeper Within
La liste des guests a de quoi attirer le chaland. Jugez plutôt: Devin Townsend, Chuck Billy, une choriste et 2 membres de Haji's Kitchen (groupe américain méconnu de prog dont le vocaliste depuis 2011 n'est autre que Daniel Tompkins de Tesseract). Devin Townsend participe à Since Forgotten et The Last One en tant que vocaliste. Comme à son habitude, il ne chante/joue que ce qu'il compose lui-même. Il est donc l'auteur des textes et des lignes vocales de ces morceaux, assurant aussi les claviers sur The Last One. Le génie canadien sublime les compositions de monseigneur sweeping qui paraitraient bien fades sans lui. A noter le final plutôt prenant de Since Forgotten (finesse de la section rythmique + acoustique). Touching the Earth c'est la power-ballade dans la grande tradition des classiques de Testament (The Legacy, Return to Serenity, Trail of Tears). Chuck Billy et la choriste Michelle Rae Dean s'adaptent parfaitement à cet excellent morceau propice à l'introspection et aux rêveries contemplatives. A noter que les paroles sont signées James Murphy. On termine avec Deeper Within, composition écrite en collaboration avec Eddie Head (guitare, textes, mélodies vocales) et Eddie Ellis (chant) de Haji's Kitchen. Après une entame péchue, ce titre traine un peu trop en longueurs (+ de 8 minutes) en dépit d'influences vocales piochées chez Alice in Chains et de démonstrations instrumentales plutôt bien senties.
En conclusion, Convergence est une bonne photographie de James Murphy en 1996. Elle représente un musicien doué mais indécis, ayant du mal à canaliser et trier ses idées. Il y a donc à boire et à manger. A retenir: les participations de Devin Townsend et Chuck Billy ainsi que les instrumentaux Vision et Tempus Omnia Revelat.
La suite des aventures de ce guitariste hors-norme au prochain épisode: Feeding the Machine (1999).
Convergence (album complet): http://www.youtube.com/watch?v=6JghS3n6Ie4
Rédigé par : forlorn | 1996 | Nb de lectures : 2324