Considérer les débuts de Stille Volk implique de s'intéresser à l'Underground français et aux origines du pagan metal. Dont acte. La trilogie viking de Bathory et la très fertile génération scandinave qui s'en suivit ont mis le feu aux poudres à l'aube des années 90s. Les plus inspirés n'ont pas hésité à s'éloigner de l'extrême par le biais de projets développant des influences médiévales ou plus traditionnelles. LE repère temporel à connaitre, c'est l'année 1995, avec la sortie de Nordavind, le cultissime album de Storm, ainsi que ceux d'Isengard (projet de Fenriz), Wongraven (projet de Satyr) ou encore les débuts d'Otyg (groupe emmené par Vintersorg) et Ulver. Toutefois si les formations scandinaves monopolisaient l'attention des metalleux à l'époque, d'autres scènes se développaient un peu partout en Europe (notamment en Autriche). Contrairement aux idées reçues, la scène française fait partie des plus anciennes dans ce créneau. Mais manquant cruellement de moyens et de visibilité, nos groupes n'ont pas eu la possibilité de mûrir au même rythme que leurs collègues nordiques. Pour mieux vous rendre compte, voici quelques actes de naissance antérieurs à 1995:
1988
Prophecy (celtic pagan metal à partir de 93/94 - Centre) 1991
Sus Scrofa (pagan/black - Midi-Pyrénées)
Eviternity (pagan black/death - Midi-Pyrénées) 1993
Anaon (celtic black - Bretagne) 1994
Aes Dana (celtic/folk black - Région Parisienne)
Forest of Souls (epic/folk dark metal - Région Parisienne)
Godkiller (black médiéval vers 95/96 - Monaco)
Stille Volk (pagan music - Midi-Pyrénées) 1995
Belenos (celtic/black - Nord puis Bretagne)
Bran Barr (celtic/folk black - Région Parisienne)
Matutina Noctem (dark/folk médiéval - Rhône-Alpes)
Impossible à l'époque de presser sa musique au format CD sans le soutien d'un label. Les premiers groupes concernés à avoir franchi ce cap sont Forest of Souls (en 1995), Godkiller (en 1996) et Anaon (en 1997). Chez nous, l'année référence c'est 1997, avec la sortie d'un paquet d'albums, dont ce fameux Hantaoma de Stille Volk. Et justement, venons-en à leur histoire. En 1994 la rencontre des 3 membres de Sus Scrofa (fraichement dissous) avec Patrice Roques, guitariste/violoniste d'Eviternity, débouche sur la naissance d'un nouveau groupe: Stille Volk (nom allemand d'un peuple de lutins troglodytes). L'envie de créer une musique médiévale, ancienne à l'aide d'instruments traditionnels les taraudant depuis longtemps, nos troubadours pyrénéens vont se donner les moyens de parvenir à leurs fins. Ainsi en marge du processus d'écriture, ils vont progressivement faire l'acquisition et l'apprentissage de nombreux instruments (notez que cette démarche est toujours d'actualité 20 ans après).
En l'espace de quelques mois, le quatuor va ainsi sortir 3 Demos dont la seconde, Ode aux Lointains Souverains (1996), a un retentissement considérable à l'étranger, notamment en Allemagne. Holy records leur apporte dès lors un indéfectible soutien.
Naguère limités dans leurs moyens, nos troubadours disposent désormais d'un arsenal de près de 35 instruments. Le vocaliste Agheion a quitté l'aventure et ses ex-collègues de Sus Scrofa ont abandonné leurs pseudos (Fages = Patrick Lafforgue et Aherbelste = Yan Arexis). Chacun des 3 membres de Stille Volk règne sur une catégorie spécifique d'instruments.
Patrick Lafforgue : chant et instruments à vents
(cornemuse/biniou, cromorne, flageolets, flutes alto et sopranino, ocarina, orgue à bouche et silbatos)
Patrice Roques : instruments à cordes
(guitares 6 et 12 cordes, guitare espagnole, mandolines française et espagnole, violon)
Yan Arexis : narration et percussions (bambou, baton de pluie, bodhran, bongo, caisse claire, clarines, cloches, gonga, cymbales, guimbarde, grelot, maracas, potée, shakers, shime, tambourin, tom basse, triangle, vibra slap)
Patrice Roques nous renseigne sur:
- la musique: "Nous composons en grande partie selon la méthode des ménétriers de la fin du Moyen-Age, selon le principe de 'glose instrumentale'. Il s'agit à partir d'une mélodie, d'habiller celle-ci de la manière la plus pertinente possible de façon à mélanger les timbres, les voix. Chaque instrument a un rôle bien particulier, celui-ci devant apparaitre au moment le plus opportun."
- les textes: "Nos textes sont avant tout axés sur l'imaginaire montagnard de notre région, l'aspect mythologique et contemplatif de notre culture dont nous ne sommes absolument pas les chantres mais à laquelle nous rendons hommage. Hommage à ce panthéon et à ses acteurs, à la manière dont l'homo religiosus a su appréhender son milieu naturel en peuplant l'espace de cette foule mythologique bien particulière."
- l'enregistrement d'Hantaoma: "Il s'est déroulé durant l'automne 1996 dans un studio aménagé dans une ancienne grange au fond d'un bois en plein Ariège. La plupart des interludes notamment, a été composé durant les sessions d'enregistrement. Nous jouions ensemble, la prise son se faisait au moment le plus opportun. Il s'agissait ensuite de procéder au travail d'habillage selon le processus de glose instrumentale. Ces prises de son ont duré 10 jours et le mixage 5." (propos recueillis dans le catalogue VPC Holy records du printemps 1997)
Procédé courant à l'époque dans ce genre de situation (1er album succédant à plusieurs Demos), Hantaoma se compose d'un mélange d'anciens titres réarrangés et de nouveaux morceaux, pour un total de 17 compos et + de 47 minutes de musique.
- Demo I (1995): l'introductif et a capella Ajunt De Bruixes
- Ode aux Lointains Souverains - Demo II (1996): Esprits des Bois, Ode aux Lointains Souverains et La Chasse au Cerf
- Eht Cants det Pyrena - Demo III (1996):Leherenn, Le Chant des Parques de la Lune (renommé Les Parques de la Lune), La Hesta deras Gagnolis, La Complainte de Milharis, Les Chants de Pyrène sont Eternels et Neu
auxquels s'ajoutent:
- La Trompuso: thème traditionnel du XVIIIème siècle arrangé par Stille Volk
- les nouvelles compos: Crépuscule des Encantats, Hantaoma, Dans les Confins s'en Retourna, Muscaria, L'aube des Encantats et Pleurs
Au printemps 1997 les samplers fournis avec les mags en étaient encore à leurs débuts aussi je garde un souvenir très net de ma découverte de Stille Volk. Rappelez-vous du mix Hesta deras Gagnolis/Ode aux Lointains Souverains en conclusion du 4ème sampler Hard Rock mag ou encore des Parques de la Lune sur le 4ème sampler Metallian. En les signant, Holy records a une fois de plus prouvé son flair et sa volonté d'innover, nos troubadours pyrénéens rejoignant un impressionnant roster composé de références de l'exploration musicale comme Elend, Orphaned Land et Septic Flesh. Toute une époque! Alors certes je conçois que la musique traditionnelle ne soit pas du goût de tous, mais pour ma part j'ai signé sans hésiter. Avoir toujours vécu dans cette région, passé l'essentiel de mes vacances dans ces montagnes (Font-Romeu et Luchon pour les connaisseurs) et être passionné de mythologies... tous ces éléments me prédisposaient à apprécier Stille Volk. D'autant que ces musiciens ne laissent rien au hasard. A commencer par le superbe digipack illustré par une peinture de Jules Coignet (exposée au musée des Beaux Arts de Carcassone) représentant le Lac d'Oô (un coin où j'ai souvent fait de la randonnée). Concernant la production, pas grand chose à dire, pour un 1er album c'est du beau boulot, parfaitement maîtrisé et surtout en totale adéquation avec le contenu proposé. L'authenticité personnifiée.
A mon sens Hantaoma a conservé toute sa fraîcheur et sa puissance évocatrice, en partie grâce au format des morceaux (la plupart se situant sous les 3 minutes). La notion d'équilibre est aussi importante entre les instruments qu'entre la musique et le chant. Des 6 albums enregistrés par ces musiciens (7 en comptant Malombra) je me demande si Hantaoma n'est pas l'opus qui accorde le plus de place au chant (partagé entre vieux français et occitan). Les choeurs et variations de Patrick Lafforgue & co sur le classique Ode aux Lointains Souverains m'ont à jamais marqué. A la fin du morceau Hantaoma, on s'attend presque à ce que Yan Arexis nous raconte l'histoire de la chèvre de Monsieur Seguin (voir les Lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet). Ce 1er album de Stille Volk navigue allègrement entre séquences contemplatives, introspection, festivités exubérantes et délires intrigants (les interludes tels que Muscaria annoncent déjà le chef d'oeuvre expérimental Ex-uvies).
Pionnier de la pagan music en France, Stille Volk nous fait en outre profiter d'un panthéon occitano-pyrénéen qui nous change des habituelles histoires vikings et celtes. Hantaoma ou le début d'une carrière sans accroc.
Ode aux Lointains Souverains (Demo II 1996): voir ici
Eht Cants det Pyrena (Demo III 1996): voir ici
Rédigé par : forlorn | 1997 | Nb de lectures : 2413
Pour ma part, cet album m'a posé un problème de taille... En fait, de Stille Volk, que je trouve excellent (notamment en concert), je n'ai que deux œuvres (pour l'instant !) : Ode aux lointains souverains (l'une de mes démos préférées) et Nueit de sabbat. Le problème, c'est le son de Hantaoma : lorsque je l'ai entendu (sans doute était-il en écoute dans un magasin, à moins que ce ne soit un sample... je ne sais plus), je l'ai trouvé trop lisse, pop ou je ne sais quoi, et, résultat, je n'ai pas acheté d'album du groupe pendant un bon bout de temps... ce que je regrette amèrement ! :(
Va vraiment falloir que je me rattrape !
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1988
Prophecy (celtic pagan metal à partir de 93/94 - Centre)
1991
Sus Scrofa (pagan/black - Midi-Pyrénées)
Eviternity (pagan black/death - Midi-Pyrénées)
1993
Anaon (celtic black - Bretagne)
1994
Aes Dana (celtic/folk black - Région Parisienne)
Forest of Souls (epic/folk dark metal - Région Parisienne)
Godkiller (black médiéval vers 95/96 - Monaco)
Stille Volk (pagan music - Midi-Pyrénées)
1995
Belenos (celtic/black - Nord puis Bretagne)
Bran Barr (celtic/folk black - Région Parisienne)
Matutina Noctem (dark/folk médiéval - Rhône-Alpes)
Impossible à l'époque de presser sa musique au format CD sans le soutien d'un label. Les premiers groupes concernés à avoir franchi ce cap sont Forest of Souls (en 1995), Godkiller (en 1996) et Anaon (en 1997). Chez nous, l'année référence c'est 1997, avec la sortie d'un paquet d'albums, dont ce fameux Hantaoma de Stille Volk. Et justement, venons-en à leur histoire. En 1994 la rencontre des 3 membres de Sus Scrofa (fraichement dissous) avec Patrice Roques, guitariste/violoniste d'Eviternity, débouche sur la naissance d'un nouveau groupe: Stille Volk (nom allemand d'un peuple de lutins troglodytes). L'envie de créer une musique médiévale, ancienne à l'aide d'instruments traditionnels les taraudant depuis longtemps, nos troubadours pyrénéens vont se donner les moyens de parvenir à leurs fins. Ainsi en marge du processus d'écriture, ils vont progressivement faire l'acquisition et l'apprentissage de nombreux instruments (notez que cette démarche est toujours d'actualité 20 ans après).
En l'espace de quelques mois, le quatuor va ainsi sortir 3 Demos dont la seconde, Ode aux Lointains Souverains (1996), a un retentissement considérable à l'étranger, notamment en Allemagne. Holy records leur apporte dès lors un indéfectible soutien.
Naguère limités dans leurs moyens, nos troubadours disposent désormais d'un arsenal de près de 35 instruments. Le vocaliste Agheion a quitté l'aventure et ses ex-collègues de Sus Scrofa ont abandonné leurs pseudos (Fages = Patrick Lafforgue et Aherbelste = Yan Arexis). Chacun des 3 membres de Stille Volk règne sur une catégorie spécifique d'instruments.
Patrick Lafforgue : chant et instruments à vents
(cornemuse/biniou, cromorne, flageolets, flutes alto et sopranino, ocarina, orgue à bouche et silbatos)
Patrice Roques : instruments à cordes
(guitares 6 et 12 cordes, guitare espagnole, mandolines française et espagnole, violon)
Yan Arexis : narration et percussions (bambou, baton de pluie, bodhran, bongo, caisse claire, clarines, cloches, gonga, cymbales, guimbarde, grelot, maracas, potée, shakers, shime, tambourin, tom basse, triangle, vibra slap)
Patrice Roques nous renseigne sur:
- la musique: "Nous composons en grande partie selon la méthode des ménétriers de la fin du Moyen-Age, selon le principe de 'glose instrumentale'. Il s'agit à partir d'une mélodie, d'habiller celle-ci de la manière la plus pertinente possible de façon à mélanger les timbres, les voix. Chaque instrument a un rôle bien particulier, celui-ci devant apparaitre au moment le plus opportun."
- les textes: "Nos textes sont avant tout axés sur l'imaginaire montagnard de notre région, l'aspect mythologique et contemplatif de notre culture dont nous ne sommes absolument pas les chantres mais à laquelle nous rendons hommage. Hommage à ce panthéon et à ses acteurs, à la manière dont l'homo religiosus a su appréhender son milieu naturel en peuplant l'espace de cette foule mythologique bien particulière."
- l'enregistrement d'Hantaoma: "Il s'est déroulé durant l'automne 1996 dans un studio aménagé dans une ancienne grange au fond d'un bois en plein Ariège. La plupart des interludes notamment, a été composé durant les sessions d'enregistrement. Nous jouions ensemble, la prise son se faisait au moment le plus opportun. Il s'agissait ensuite de procéder au travail d'habillage selon le processus de glose instrumentale. Ces prises de son ont duré 10 jours et le mixage 5." (propos recueillis dans le catalogue VPC Holy records du printemps 1997)
Procédé courant à l'époque dans ce genre de situation (1er album succédant à plusieurs Demos), Hantaoma se compose d'un mélange d'anciens titres réarrangés et de nouveaux morceaux, pour un total de 17 compos et + de 47 minutes de musique.
- Demo I (1995): l'introductif et a capella Ajunt De Bruixes
- Ode aux Lointains Souverains - Demo II (1996):
Esprits des Bois, Ode aux Lointains Souverains et La Chasse au Cerf
- Eht Cants det Pyrena - Demo III (1996): Leherenn, Le Chant des Parques de la Lune (renommé Les Parques de la Lune), La Hesta deras Gagnolis, La Complainte de Milharis, Les Chants de Pyrène sont Eternels et Neu
auxquels s'ajoutent:
- La Trompuso: thème traditionnel du XVIIIème siècle arrangé par Stille Volk
- les nouvelles compos:
Crépuscule des Encantats, Hantaoma, Dans les Confins s'en Retourna, Muscaria, L'aube des Encantats et Pleurs
Au printemps 1997 les samplers fournis avec les mags en étaient encore à leurs débuts aussi je garde un souvenir très net de ma découverte de Stille Volk. Rappelez-vous du mix Hesta deras Gagnolis/Ode aux Lointains Souverains en conclusion du 4ème sampler Hard Rock mag ou encore des Parques de la Lune sur le 4ème sampler Metallian. En les signant, Holy records a une fois de plus prouvé son flair et sa volonté d'innover, nos troubadours pyrénéens rejoignant un impressionnant roster composé de références de l'exploration musicale comme Elend, Orphaned Land et Septic Flesh. Toute une époque! Alors certes je conçois que la musique traditionnelle ne soit pas du goût de tous, mais pour ma part j'ai signé sans hésiter. Avoir toujours vécu dans cette région, passé l'essentiel de mes vacances dans ces montagnes (Font-Romeu et Luchon pour les connaisseurs) et être passionné de mythologies... tous ces éléments me prédisposaient à apprécier Stille Volk. D'autant que ces musiciens ne laissent rien au hasard. A commencer par le superbe digipack illustré par une peinture de Jules Coignet (exposée au musée des Beaux Arts de Carcassone) représentant le Lac d'Oô (un coin où j'ai souvent fait de la randonnée). Concernant la production, pas grand chose à dire, pour un 1er album c'est du beau boulot, parfaitement maîtrisé et surtout en totale adéquation avec le contenu proposé. L'authenticité personnifiée.
A mon sens Hantaoma a conservé toute sa fraîcheur et sa puissance évocatrice, en partie grâce au format des morceaux (la plupart se situant sous les 3 minutes). La notion d'équilibre est aussi importante entre les instruments qu'entre la musique et le chant. Des 6 albums enregistrés par ces musiciens (7 en comptant Malombra) je me demande si Hantaoma n'est pas l'opus qui accorde le plus de place au chant (partagé entre vieux français et occitan). Les choeurs et variations de Patrick Lafforgue & co sur le classique Ode aux Lointains Souverains m'ont à jamais marqué. A la fin du morceau Hantaoma, on s'attend presque à ce que Yan Arexis nous raconte l'histoire de la chèvre de Monsieur Seguin (voir les Lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet). Ce 1er album de Stille Volk navigue allègrement entre séquences contemplatives, introspection, festivités exubérantes et délires intrigants (les interludes tels que Muscaria annoncent déjà le chef d'oeuvre expérimental Ex-uvies).
Pionnier de la pagan music en France, Stille Volk nous fait en outre profiter d'un panthéon occitano-pyrénéen qui nous change des habituelles histoires vikings et celtes. Hantaoma ou le début d'une carrière sans accroc.
Ode aux Lointains Souverains (Demo II 1996): voir ici
Eht Cants det Pyrena (Demo III 1996): voir ici
Rédigé par : forlorn | 1997 | Nb de lectures : 2413