Dans les années 70, il y eut une frange de groupes issus de la scène progressive qui se consacrèrent à illustrer musicalement le cinéma de série Z et notamment les films de Dario Argento et de George A.Romero. Le premier connu le succès pour ses 2 « chefs-d’œuvre », Les Frissons de L’Angoisse (1976) et Suspiria (1977); le second une renommée internationale de plus grande envergure encore avec Zombie (1978).
Le plus fameux de ces groupes fut incontestablement Goblin, groupe italien de rock progressif dont le succès fut long à venir. Sa reconversion dans la musique de film « gore » lui redonna une seconde jeunesse et lui permit de se faire un nom.

Plus récemment, on a pu constater avec plaisir que la relève semblait en bonne marche avec Daemonia, véritable tribute bande italien lui aussi et tout entier voué à la gloire du cinéma de Dario Argento.
Cette intro didactique nous amène à notre thème du jour : Zombi. Voilà une distribution Relapse qui sort des sentiers battus. Plus habitué aux festins extrêmes et autres orgies apocalyptiques, le label de Philadelphie a fait un pari osé en signant le duo américain de synthé-prog ambiant.
Déjà auteur de 2 remarquables opus - "Cosmos" (2004) puis "Surface to Air" (2006) - Steve Moore et A.E Paterra poursuivent leur expérience de musique instrumentale chiadée et héritière des formations consacrées au rock prog et aux musiques de films gore des années 70 citées plus haut.
Cependant, la démarche de Zombi est différente, moins académique, tournée vers la modernité et avides d’espaces sonores nouveaux. Elle propose une combinaison math-rock/B.O très réussie et qui peut renvoyer aux formations expérimentales très branchées électro-space/avant-garde comme Tangerine Dream ou Ash Ra Tempel ou par certains côtés vers le "Tubular Bells" de Mike Oldfield.

"Spirit Animal" est une pièce instrumentale unique, originale, composée en 5 tableaux plutôt longs (17, 6, 10, 8 et 14 minutes) qui installent indubitablement des atmosphères inquiétantes ou planantes, servies par une instrumentation classique au complet mais utilisant majoritairement toute la panoplie de sonorités synthétiques froides mais non dénuées d’une rythmique surprenante presque surnaturelle. A la fois anarchique et parfaitement maîtrisé dans sa structure, Zombi vous prend aux tripes avec une force irrésistible. (N’est-ce pas la moindre des choses quand on porte un tel patronyme ?).
Cet apparent paradoxe est en partie dû à la capricieuse architecture des compositions ; cassures intempestives mais n’ayant rien à voir avec le prog traditionnel, riffs de guitare contrefaits, rythmes impairs noyés sous des nappes enveloppantes de synthé répétitifs à souhait (ou jusqu’à la nausée), obsédants mais ensorcelants. Quoi qu’il en soit, que vous soyez conquis ou rebutés, vous ne ressortirez pas indemnes de cette furia de sons synthétiques conçus pour briser votre résistance et qui finit par y parvenir.


Rédigé par : Karadok | 16/20 | Nb de lectures : 10956