Quand j'ai vu cette pochette d'homme cheval au cul poilu, à l'ombre imposante et au cheminement symbolique assez nébuleux, j'ai eu immédiatement une pensée pour David Lynch et son incroyable série "Twin Peaks". Bon il y a pas de canasson qui parle dans Twin Peaks mais un buche qui murmure à l'oreille de sa maîtresse... on reste dans l'esprit quoi.
Quand on ne connaît pas du tout l'univers du sieur Lynch, des films comme "Lost Highway" ou justement "Twin Peaks" peuvent sembler un peu décousus, étranges et incompréhensibles mais quand on prend la peine de s’acclimater aux errances des vagabondages scénaristiques du réalisateur, tout peut finir par apparaître... plus naturel.
Non pas que la compréhension arrive à jaillir de l'habitude mais quand on n'est plus heurté par la forme on est plus apte à comprendre le fond.

Tout ça pour dire que ZAPRUDER, s'il apparaît un peu bordélique au premier abord, a beaucoup à offrir une fois qu'on a pu percer les blindages de son âpreté sonore pour le moins rugueuse.
Ces jeunes musiciens issus de Poitiers pratiquent un Hardcore chaotique/ Post Core assez sombre tirant par moments vers l’extrême puis vers le progressif le crasseux et l'ambiant le plus caverneux.

Dès le premier titre, "Guns, Speech and Madness", on pense à CONVERGE et CULT OF LUNA bien sûr, mais on est surtout charmé par les chœurs sauvages, les accélérations sans filet et la saleté du son général.
Plus le temps passent et plus les influences s’élargissent.
Quelques effluves GOJIRIENNES viennent se faire sentir lors de certains passages en son clair et sur certains groove de batterie. Quand, au détour d'un son clair, se dessine le spectre de MOGWAI, on ne peut que se laisser entraîner dans les harmonies du ZAP.

Le son, très important dans l'identité du groupe, est plutôt profond, épais et plutôt sombre. Si certains combos de Post Core misent sur l'over saturation en noyant leurs notes dans une bouillie compacte, ZAPRUDER fait le choix d'un gros grain massif, pas trop saturé et libre d'évoluer comme il veut.
Le bordel des harmonies, des accords et des enchaînements apparaît donc au grand jour en laissant une grande part à une section rythmique simple mais groovy qui préfère marteler des tempos simples en laissant les architectures rythmiques aux groupes qui veulent se prendre le chou sur la technique.
Attention tout de même, les musiciens en ont sous le pied, et s'ils gardent toujours la technique au service de la musique, certains riffs sont tout de même assez complexes et certaines mises en place loin d'être évidentes.

Manquant parfois de solidité sur les passages les plus violents (on note quelques petits crachotages à certains moments) ZAPRUDER est très efficace lors des moments les plus doux notamment à la fin des douze minutes de "Mt Fuji in red" où le chanteur montre un bien joli brin de voix allié à un feeling assez aventureux.
Le tremplin de ce superbe passage permet au groupe de s'envoler carrément lors du final et démontre que les directions qui s'offrent à eux sont nombreuses. J'espère que le groupe ne perdra pas son mordant, leurs brutales attaques demeurant toujours assez efficaces.
A noter le superbe solo de sax sur "Lost in Vegas", preuve une fois de l'ouverture d'esprit du groupe.

"Straight from the horse's Mouth" est donc un cinq titres très agréable à écouter et qui met en lumière un combo sur qui il va falloir garder un œil... de cheval.


Rédigé par : Pamalach | 14,5/20 | Nb de lectures : 12989