On a beaucoup craché sur Roadrunner à l’époque de la vague néo, reprochant au label hollandais de signer à tour de bras tout ce qui, de près ou de loin, pouvait se rapprocher de ce que faisaient KORN, SEPULTURA ou SLIPKNOT. Vinrent ensuite les premières formations de metalcore, TRIVIUM en tête, qui achevèrent de décrédibiliser aux yeux de certains ce label, pourtant figure emblématique au début des années 90 du métal extrême aux côtés des Earache, Metal Blade et autres Nuclear Blast.

C’est plus ou moins la même voie qu’est en train de prendre Century Media, dont la volonté évidente de surfer sur la vague brutal deathcore en peine explosion fera à coup sûr grimacer quelques culs coincés dont je fais partie. Mais là n’est pas le propos de cette kronique, alors recentrons le débat sur ce premier album des Américains WINDS OF PLAGUE, compagnons de label de leurs compatriotes SUICIDE SILENCE. Contrairement à eux, justement, WOP ne cherche pas à écraser son auditoire par une débauche de violence parfois indigeste. Leur truc c’est plutôt le sucré-salé, un lourd gruik gruik suivi d’un plan suédois aux mélodies enjôleuses, constante alternance de subtilité et de bourrage de pif introduite par une intro sympho très cinématographique. Quand on y pense, le parallèle avec le septième art ne s’arrête pas là et « Decimate The Weak » pourrait (avec un peu d’imagination) être la bande son de quelque blockbuster sombre et violent dont les seules éclaircies seraient ces plans où les solos et chorus heavy font la fête.

Ce blockbuster, aussi explosif serait-il d’un point de vue esthétique et sonore, aurait cependant de grosses faiblesses niveau scénario et ne resterait dans la mémoire de ses spectateurs que comme une expérience sympathique, mouvementée, mais pas inoubliable. C’est ainsi que « Decimate The Weak » donne beaucoup d’espoirs au cours de ses premières minutes avec, on l’a déjà évoqué, une intro très réussie suivie d’une première scène bâtie sur le même principe mêlant death mélodique, lourd deathcore et passage symphonique. Mais on flaire malheureusement rapidement la supercherie, ou tout au moins l’excès. Les idées sont là, le savoir–faire également, mais c’est l’authenticité qui fait défaut à WINDS OF PLAGUE. A trop vouloir épater la galerie, il en a fini par produire un album tuné à l’extrême, dans lequel le clinquant a pris le pas sur l’émotion. Comme une tire surbaissée montée sur des jantes d’un diamètre ridiculement énorme, incapable d’avancer normalement sur un revêtement dont la moindre inégalité risquerait d’emporter son spoiler avant en peau de couilles de requin, « Decimate The Weak » joue tout sur l’apparence aux dépens de l’efficacité et des tripes.

Ces gars-là ont beau en balancer dans tous les sens, leurs postiches de petits durs surdoués qui défoncent tout le monde techniquement se décollent vite pour laisser apparaître un jeune groupe bien plus à l’aise quand il balance un hardcore simple et hargneux (« Reloaded ») que quand il se frotte aux scènes death mélodique suédoise ou brutalcore US. Certes, individuellement les morceaux passent bien, mais mis ensemble ils sont vite redondants et fatigants, comme ces infra basses qui reviennent sur chaque titre ou presque à la manière de ces gigantesques explosions typiques des films d’action à gros budgets dont nous parlions tout à l’heure.

WINDS OF PLAGUE s’est entouré d’une équipe de professionnels de l’apparence avec Tue Madsen au son et Par Olofsson aux crayons (DEEDS OF FLESH), une bonne façon d’attirer l’attention du quidam… qui tombera peut-être sous le charme de ce patchwork métal à la fois extrême et mélodique. En ce qui me concerne, j’attendrai que le groupe laisse tomber les artifices et trouve l’œil du tigre.


Rédigé par : Dungorpat | 10/20 | Nb de lectures : 11283