Trop occupé ces dernières années à vous parler du claquant des blasts enregistrés dans des grottes avec un magnéto quatre pistes, je n'ai pas eu l'occasion d'aborder le projet norvégien Winds (et mes confrères non plus, mais eux sont de grosses faignasses larvées dans leurs canapés devant la Star Ac'). Pourtant, je suis assez fana des mélodies aériennes des vents du Nord, qui sont une véritable évasion entre deux albums de hurlements divers. Comme beaucoup qui se sont intéressés au groupe, j'ai acquis le mini "Of Entity of Mind" juste après avoir consulté le pedigree du projet : Carl August Tidemann (ancien guitariste d'Arcturus, qu'on entend soloter sur "La Masquerade Infernale"), Hellhammer (un type pas très connu qui commence juste la batterie, il paraît), Lars Eric Si et Andy Winter (qu'on retrouve tous deux dans Age of Silence, comme la majorité du groupe). Bref, ça pressentait le truc intéressant.

Et la surprise avait été de taille, avec un métal mélodique portant aussi bien sur l'atmosphérique que le progressif, notamment avec des digressions de piano ou de guitare sonnant néo-classiques. Winds s'affichait comme une sorte de Deep Purple de ce qui allait être baptisé "post-black" un peu plus tard. Les sonorités synthétiques (certains diront "surproduites") ne peuvent que rappeler les travaux les plus récents d'Arcturus, en y ajoutant un fort élan progressif. Et l'ensemble est sublimé par la voix particulière et si fragile de Lars Eric Si qui exprime à lui seul toute l'humanité qui peut parfois manquer à des musiques trop artificielles. L'alchimie était en place et il ne manque qu'un bassiste de session pour compléter tout ça. Le groupe est ici épaulé par Øystein Moe (c'est lui sur "Perdition City" d'Ulver, on peut faire pire comme CV).

Pour être honnête, les sorties de Winds se valent énormément et le groupe n'a pas fait évoluer de manière drastique sa recette personnelle. En rentrant dans le très subjectif, j'ai un peu moins apprécié "The Imaginary Direction of Time" que je trouvais par moments trop démonstratif (l'écueil du progressif à mes chastes oreilles). Mais ces subtiles nuances sont de l'ordre des différences entre deux albums de Cannibal Corpse et Winds a une discographie d'une grande homogénéité. Ce "Prominence and Demise" entre donc dans la droite tradition de ce que le groupe nous a offert au long de son mini et de ses trois albums. Trois ans après "The Imaginary Direction of Time", Winds nous propose à nouveau du sophistiqué armé d'une grande musicalité. La musique nous enveloppe de ses bras protecteurs pour nous bercer de mélodies, d'où surgissent ponctuellement des passages bien efficaces et des parties rythmiques costaudes (Hellhammer est parfaitement à sa place dans ce groupe). Le refrain catchy de "Convictions and Contradictions", que vous avez en écoute, me reste gravé dans le cortex après chaque écoute.

Une petite brochette d'invités fait son apparition sur l'opus : Lars Nedland (Solefald, qui vient poser son chant clair si particulier), Dan Swanö (non, je ne le présenterai pas), Agnete Kirkevaag (Madder Mortem). S'ajoutent également des membres de l'Orchestre Philarmonique d'Oslo, histoire d'enrichir la palette sonore. Et la pochette est encore une fois magnifique, ce qui ne gâche rien. Bref, c'est du bon pour ceux qui cherchent un havre de paix.

Les fans de progressif, ce que je ne suis pas, trouveront probablement des points de comparaison pour expliquer que Winds n'est pas si bien que ça. Certes, mais je m'en fous un peu, n'écoutant pas le style. Au contraire, Winds offre suffisamment d'émotions et d'atmosphères rêveuses pour m'y faire accrocher, ce qui est tout à son honneur. Un album du genre de ceux que je me mets dans les feuilles avec plaisir de temps en temps pour s'offrir une pause au goût de poésie. De temps en temps, mais avec une très grande délectation…


Rédigé par : Prince de Lu | 16,5/20 | Nb de lectures : 12073