Quelques mois après s'être fait remarquer dans le paysage des bizarreries avec une démo aussi déconcertante que prometteuse, WHOURKR remet le couvert avec un premier album éblouissant. Avec "Concrete", l'apocalypse a trouvé sa bande son. Pas de déluge de feu ni de pluie de sang mais un déchaînement incroyable de fureur Electro pilonnée par un Brutal Death/Grind impitoyable. Le prix à payer pour se délecter de l'album le plus atypique et talentueux de 2008? Une simple ouverture d'esprit.

WHOURKR est un groupe sans nul semblable. Son style, il se le crée lui-même et même s'il s'apparente à la nébuleuse du Spastic Grind Core ou du XP Grind Core il va au-delà des frontières habituelles. En clair, avant WHOURKR je n'avais jamais entendu quelque chose de comparable. A croire que WHOURKR est le pionnier dans le "Whourkr Metal"...

L'alliance entre Metal et Electro ne date pas d'hier mais cette dernière n'avait abouti jusqu'à présent qu'à des projets rigolos faisant du bizarroïde pour faire du bizarroïde. PROSTHETIC CUNT, GIGANTIC BRAIN malgré leur qualité ne dégageaient pas la même atmosphère étrange qui baigne ce "Concrete". L'album fait preuve d'une richesse hallucinante, une richesse et une densité qui donnera le tournis au point de faire dégobiller ceux qui ont l'estomac fragile.

"Concrete" va bien au-delà de ce que présentait "Naät", le groupe a fait progresser sa musique pour lui faire atteindre des limites inconnues. En écoutant, en s'imprégnant, en dégustant cet opus on songe à une multitude de genres et de formations toutes plus diverses les unes que les autres. MINISTRY, XXX MANIAK, THE BERZERKER, IPERYT, THE AMENTA... oui, allons citons ces oiseaux-là et jetons-les dans le hachoir Electro Noise d'un MERZBOW croisé MASONNA pour voir le résultat.... Jusque-là, rien de bien nouveau. Disons qu'à ce stade, on a le squelette de WHOURKR.
Qu'en est-il des organes internes de ce groupe?

Sur cette carcasse décharnée et bien maigrelette, WHOURKR a greffé une myriade d'éléments arrachés à des mondes variés et qui parfois se regardent en chiens de faïence. Le côté Death Metal est omniprésent et l'on discerne pas mal de lambeaux de CIRCLE OF DEAD CHILDREN cousus à des plans à la ANTIGAMA enrobés d'atomes de FEAR FACTORY lacéré par l'aspect titanesque d'un MORBID ANGEL (époque Tucker) (c'est bigarré, je vous avais prévenu). Mais ne voir que le côté Death et zapper le versant Grind serait une erreur fatale car on retrouve dans les entrailles de WHOURKR l'ambiance chaotique qui règne sur les œuvres de FUCK THE FACTS. Parfois, le brouillard se dissipe et l'on entrevoit des structures évoquant une sorte de DEFORMED ayant fricoté avec un INTESTINAL DISGORGE frelaté au SKIN CHAMBER... Oui, c'est un véritable labyrinthe ce groupe! Un mille-feuille de chair et de métal! Slurpp!

Il va sans dire que l'ensemble est extrêmement brutal, violent, incisif et hystérique. Haineuse, la musique de WHOURKR écrase, ratatine et moud tout pour la larder des barbelés Indus/XP sauce PHANTOMSMASHER.

Récapitulons la dissection de notre Frankenstein: une ossature qui navigue entre Noise Core et Metal de cyborg et des organes venus de l'autopsie d'un Death Grind mutilé par un Harsh apocalyptique, frénétique... Ok! Tout le monde suit?

Mais notre bonhomme est toujours tout nu... Les tissus qui enveloppent cet écorché sont – quant à eux – plus vicieux car ils réussissent à cacher les démons qui agitent les boyaux de WHOURKR. On est sans cesse surpris, molesté, épaté par la richesse de "Concrete" qui se drape d'un panel incroyablement large. Des sonorités variées qui se fondent pour donner quelque chose d'unique, classe! Ici, un spasme de mélodie digne du "Sumerian Daemons" de SEPTIC FLESH, plus loin un bouffée d'air proche d'un AKERCOCKE déchiqueté par cette obsédante et imposante masse froide d'Electro. C'est étourdissant, on sort abasourdi de cet album qui nous mène aux confins de la folie, du désespoir, de la rage et de la finesse... Tous ces sentiments s'emmêlent, s'empalent, s'enlacent, s'entretuent en même temps! On n'échappe pas à WHOURKR.
Vous espériez un truc guimauve... Bah c'est raté!

Plus qu'un album de musique, WHOURKR offre un voyage inattendu. Introspectif, inhumain, épique, minimaliste, organique, mécanique, subtile et beastial... un paradoxe inouï.
Silence. J'applaudis.

On pourra dire que "Concrete" reste très proche de "Naät"... musicalement c'est un fait indéniable mais là où la démo souffrait d'un manque d'âme, l'album triomphe. "Concrete" est gorgé d'une aura bien singulière... morbide, glauque... Le travail sur les voix est remarquable, on passe de grunts conventionnels à des murmures plaintifs qui se déchirent sur des chants lyriques annonçant des grincements que seul un Attila sait faire sonner. Tout cela confère à l'album une dimension rampante, cryptique. Ambiance délétère rehaussée par des nappes de piano qui gambadent leur velours sur des plaies pleines d'agrafes, d'éclats d'os et de verre pilé. Troublant, acide, envoûtant! PUTAIN!!! Pour ce qui est de l'âme de "Concrete", on ne peut que penser aux films "Shining", "Silent Hill" et "Tetsuo".

Le cauchemar d'un duo de savants fous sous LSD?

WHOURKR a su engendrer un véritable monstre qui vous gobera la cervelle pour la reprogrammer. Un album somptueux, riche, vivant... Une putain d'œuvre (le terme pue le snob, mais appelons un chat un chat, voulez-vous?)
D'abord difficile d'accès, "Concrete" se révèle toxique... on ne peut s'en détacher, on l'explore dans ses moindres méandres sans fin.

A la croisée des mondes Electro et Metal, WHOURKR ouvre une brèche dans le monde musical et parvient à écrire ses propres lois. Pas de dogme, pas de recettes, juste du talent et une personnalité tentaculaire. Préparez vos tympans à la torture la plus sophistiquée et raffinée qui soit.


Rédigé par : Cobra Commander | 19/20 | Nb de lectures : 16533