En dépit de ses nombreux changements de line-up, While Heaven Wept affiche fièrement un belle longévité à défaut d'une discographie impressionnante. Jugez plutôt : à peine trois véritables albums en vingt longues années consacrées à peaufiner leur heavy/doom jusqu'à cette improbable pièce de leur édifice. Je le disais plus haut, beaucoup de monde a défilé dans les rangs de la formation, souvent d'excellents musiciens qui n'auront pas résisté bien longtemps à l'incroyable exigence du maître à penser, Tom Phillips ; multi-instrumentiste talentueux et chanteur de qualité qui n'a pourtant pas hésité sur cet album à délaisser le micro à Rain Irving afin que chacun puisse donner le meilleur sur les compositions de ce « Vast oceans lachrymose ».
Sur ce nouvel essai le groupe a tenté d'insuffler la charge épique maximale à chacun de ses titres et on peut leur accorder ce bénéfice sans problèmes, en particulier sur le long titre ouvrant l'album et constituant sa pièce de résistance, « The furthest shore ». Le souci en ce qui me concerne, et c'est un souci épique, reste l'imperméabilité totale face au style pratiqué. Et encore mon naturel pathologiquement conciliant trouve toujours un moyen d'arrondir les angles. Mais par les branchies de Poséidon, croyez-moi sur parole, chacune des nombreuses et interminables écoutes de « Vast oceans lachrymose » que je me suis infligées s'est terminée par une terrible migraine.

Des détails. Du style pratiqué on pourrait aisément dire que le « doom » de heavy/doom n'est là que pour faire joli, sauf à considérer une acception indéfiniment extensible des codes du genre. Et s'il y a un truc que je déteste plus que la musique créole c'est bien le heavy metal. Mettons pour poser un repère que la limite de ce que je peux trouver vraiment sympa ce sera un Candlemass, parce que les deux formations jouent sur des registres parallèles. Mais toutes les conventions heavy qui trouveront un aboutissement crépusculaire et majestueux chez ce dernier tourneront systématiquement à la caricature chez nos Américains. Et tout y passe, le chant haut perché, les leads en harmonie sur deux grattes, les mélodies sucrées, les chœurs grandiloquents, les arpèges acoustiques tristounets, les gros riffs convenus un pied sur l'ampli retour et j'en passe. Rien de répréhensible en soi, si ce n'est qu'une épaisse couche de cérumen s'est spontanément formée dans mon oreille pour la protéger des épiques cavalcades de While Heaven Wept. Pure auto-défense.

Je comprends très bien qu'il y ait des amateurs du genre et vu la qualité technique de la musique proposée ils devraient y trouver de nombreux motifs de satisfaction. Pour ne rien gâcher la production est en phase avec le contenu et propose un son dense et clair qui souligne parfaitement le lyrisme -exacerbé- des compositions. Encore que, pour effectuer un ultime effort d'objectivation je mettrais en garde contre le côté redondant d'un album qui place ses meilleures idées dans le titre d'ouverture. Difficile dès lors de retrouver un niveau d'intérêt équivalent à l'écoute des morceaux suivants qui sans être honteux n'apportent absolument rien de plus au propos.
Fans de power metal et autres fins gourmets de fioritures néo-classiques, cette promenade mélancolique sur des océans de larmes devraient vous en arracher quelques-unes, souffrez cependant que je reste à quai.




Rédigé par : #Guillaume# | NSP/ | Nb de lectures : 12526