Rien de plus subjectif qu'une chronique, vous en conviendrez. Un espace dédié à un album qui met en avant l'avis personnel d'un chroniqueur, parfois contrebalancé par l'avis de lecteurs pas d'accord, parfois encensé par des lecteurs très d'accord. Et les plus longues discussions, rarement intéressantes, portent souvent sur des éléments extra-musicaux. En ce sens, Wardruna a un peu tout de la chronique sur laquelle il peut se passer des choses... ou absolument pas.

D'abord, Wardruna est un projet particulier. De nombreux musiciens se sont intéressés à la musique traditionnelle de leur pays. C'est ici Kvitrafn, batteur de Gorgoroth du temps de Twilight of the Idols, membre de Jotunspor et ex-membre de Sahg, qui s'immerge dans la mythologie nordique avec sa propre interprétation musicale des runes. Quand on ajoute que Gaahl vient poser des vocalises, il y a déjà de quoi ramasser du commentaire extra-musical à la pelle. Toutefois, il n'est vraiment pas anormal que des musiciens norvégiens articulent leur concept autour des croyances nordiques, même si cela n'a rien d'original.

Ensuite, malgré le pedigree de la tribu, Wardruna n'a rien de metal. Rien du tout. C'est de l'ambient dont le cœur est la musique traditionnelle scandinave. Si l'ambient n'est pas ma tasse de thé, la musique scandinave l'est. J'ai donc accroché très rapidement à un album qui se développe autour des percussions tribales, du hardanger, de la guimbarde, des cornes et des voix. Il est certain qu'une majorité des lecteurs avides de sensations métalliques n'y trouvera aucun intérêt. Mais l'amateur de folk scandinave dispose de la plus grande porte d'entrée qui soit dans l'univers des Norvégiens.

Les partitions minimalistes donnent l'impression de se trouver autour d'un grand feu à psalmodier des dieux anciens, entouré de la nuit la plus noire. Une nuit au fond de laquelle on entend les chants clairs magnifiques de Lindy Fay Hella (Sound of Sotra) et les voix profondes ou doucereuses de Kvitrafn et Gaahl. Telle la bande sonore d'un road-movie à travers les espaces boisés et enneigés de Norvège, Runaljod s'annonce comme la première pierre d'une trilogie. Une première pierre qui m'a personnellement envoûté, au point que cet album tourne plus souvent que certaines de mes dernières acquisitions en metal. Runaljod dégage une ambiance unique, entre la beauté d'une nature enchanteresse et la noirceur de l'âme humaine.

Autant les 52 minutes que durent l'opus vont filer pour l'auditeur qui se laissera emporter par les sonorités de Wardruna, autant le réfractaire pourra mourir d'ennui au bout de deux titres. Toute la subjectivité appliquée à un tel projet est là. Pour ma part, il est un vrai frisson parfaitement adaptée à cette période de froid. Et il me donne bien plus envie de ressortir mes albums de folk que ceux de metal. De quoi approcher au plus près des dieux. Envoûtant.

Un autre extrait est disponible sur le MySpace d'Indie Recordings


Rédigé par : Prince de Lu | 17/20 | Nb de lectures : 11722