« This is the decade of us sordid sons, we keep the devil from the streets, have justice done »

Il est des groupes dont le potentiel semble les destiner à succéder à de grands noms aujourd’hui éteints. On pourrait citer pléthore de groupes prometteurs dans divers styles mais on va ici se contenter de citer un nom bien précis pour un style : VULTURE INDUSTRIES pour le style de Metal avant-gardiste décadent. Quintette norvégien (comportant des membres de SULPHUR et de BLACK HOLE GENERATOR) formé en 1998 sous le nom de DEAD ROSE GARDEN qui finira par choisir le nom VULTURE INDUSTRIES en 2003. Après 3 démos le groupe sortira son premier album The Dystopia Journals en 2007, album non chroniqué (hélas) en ces pages.

Et dès ce premier effort longue durée, VULTURE INDUSTRIES semblait avoir un destin tout tracé : succéder à ARCTURUS, et en particulier à la version « théâtrale » du groupe mise en exergue par le cultissime La Masquerade Infernale (1997). A ce titre, on sentait en 2007 un groupe ayant un potentiel certain mais ne l’exploitant pas à fond, The Dystopia Journals semblant juste être une relecture de La Masquerade Infernale sans chercher à amener des éléments neufs et plus subtils.

C’est donc sur ce second album, The Malefactor’s Bloody Register, que l’évolution du groupe est déjà nettement palpable. Et quelle évolution ! Si le style ne bouge pas vraiment par rapport au précédent méfait, le groupe a déjà confectionné sa mixture plus personnelle. Elle est surtout faite d’une tripotée de riffs et de passages de chant tous plus accrocheurs les uns que les autres, ainsi que de quelques petits éléments qui font toute la différence. Plus black, plus incisif et plus varié que sur The Dystopia Journals, le Metal décadent de VULTURE INDUSTRIES est déjà proche de son apogée sur The Malefactor’s Bloody Register.

Toute la force de ce disque est résumée dans ce tube énormissime qu’est "Race for the Gallows" : après l’intro étrange et toute en finesse qui l’accompagne ("Crooks and Sinners"), c’est la claque assurée : riffs diaboliquement efficaces, chant au top avec une alternance chant clair/crié (particulièrement barré et jouissif) du plus bel effet, chœurs entraînants qui me font pas mal penser au "Helpless Corpses Enactement" de SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM, break de toute beauté et passages jubilatoires : un des tubes de l’année à n’en pas douter, génial et inoubliable ! Les morceaux s’enchaînent et le niveau ne baisse pas : "Hangman’s Hatch" est dans la lignée de "Race for the Gallows" avec des riffs rapides et des chœurs excellentissimes, le tout étayé de breaks au saxo et au piano plutôt rafraîchissants. "The Bolted Door" est porté par des riffs lourds et gras (assez inhabituels pour un style plutôt propret) propices à headbang et un chant, également très bien alterné clair/crié, à nouveau au meilleur de sa forme. "This Cursed Flesh" commence par une intro psyché enfumée inattendue, avant d’enchaîner sur un riff mélodique excellent, et de proposer une nouvelle fois des variations de chant particulièrement réussies et maîtrisées, entrecoupées de solos travaillés à la quasi-perfection.

Mais concernant le facteur chant, ce n’est pas tout. Bjørnar Erevik Nilsen a de belles choses à nous proposer sur les deux morceaux les plus « calmes » de l’album que sont "I Hung My Heart On Harrow Square" et "Crowning the Cycle". Deux titres plus posés, certes en décalage avec le reste de l’album, mais c’est là où le côté ARCTURUSien ressort le plus. Et notamment dans le ton à la Garm employé par Nilsen, qui rivaliserait presque avec le chanteur culte d’ARCTURUS, BORKNAGAR et ULVER dont les qualités ne sont plus à discuter. Deux morceaux peut-être un peu longuets mais tout simplement magnifiques pour peu qu’on apprécie ce genre d’envolées de chant clair. Et les claviers vintage (voire spatiaux par moments) ainsi que les lignes de basse subtiles font également leur petit effet, jouant le rôle d’épices pour The Malefactor’s Bloody Register, tout comme les quelques éléments empruntés au Circus-Metal ou trucs barrés à la SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM et consorts, présents tout du long de l’album (mais suffisamment discrets pour ne pas perturber). Le tout se clôture par un morceau très fort, "Of Branded Blood", qui sublime encore une fois la recette choisie par VULTURE INDUSTRIES : riffs implacables, chants et chœurs variés et entraînants, breaks sombres et beaux à la fois, passages en chant clair épiques et structures rondement menées. Du très bon boulot !

Ce second album de VULTURE INDUSTRIES est donc une cuvée génialissime, irrésistible et efficace à souhait, proche de la perfection dans un style peu académique, et suffisamment variée et originale pour convaincre, avec des musiciens et un chanteur de talent. Le groupe reprend tout ce qui faisait la force du style décadent d’ARCTURUS en apportant sa propre sauce, un effort de reconstruction et de relecture d’un style qui force l’admiration, pour un The Malefactor’s Bloody Register juste énorme et accrocheur au long terme. Un de mes albums de l’année à n’en pas douter. Amateurs de tout ce qui est Metal Avantgardiste ou autres joyeusetés Black Progressif norvégien, n’hésitez pas une seconde !


Rédigé par : ZeSnake | 17.5/20 | Nb de lectures : 16005