Unearthly Trance est un groupe en perpétuelle évolution, et ce cinquième effort vient le confirmer. J’avoue que les premières écoutes de ce fameux V furent assez désagréables, avec l’impossibilité de mémoriser quoi que ce soit, ajouté à cela la déception de la nouvelle tournure que le trio a décidé de prendre. Exit le doom sludgisant, nous voici en 2010 avec ce qu’ils appellent de l'urban funeral drone.

Dès la première écoute, on se rend compte qu’Unearthly Trance cherche à ne pas suivre la voie tracée par les 2 précédentes productions. Le tempo a ralenti. Le son est plus propre. La musique est devenue plus froide et clinique, presque plus torturée aussi. Les ambiances obscures sont toujours là, l’énergie quant à elle ne saute pas aux oreilles, elle est insidieuse. Je les imagine plus dans un club nord américain, sombre et crade, en banlieue de centre ville, là où les sons ricochent dans des bâtiments vieillots et désaffectés, qu’au fond d’une cave. Les sonorités ont pris une orientation citadine, avec cette atmosphère rêche et froide.

Nous sommes loin des débuts, même si le combo tient toujours fièrement l’étendard du doom. Le propos évolue mais le groupe conserve son empreinte musicale menaçante. Unearthly Trance a toujours sa signature, grâce à la texture de leurs instruments, à la voix déchirée de Ryan Lipynsky et ce climat misanthropique qui leur est propre. Tu cherches du mélodique ? Ce n’est pas sur ce disque qu’il faut se pencher. Sa pochette hypnotique complète à merveille l’ambiance malsaine dégagée. Les vocaux sont toujours un point fort, tant ceux-ci sont intenses et personnels, son grain a toujours cette rage maitrisée. Les riffs sont lancinants, et aucun des instruments ne fait dans la surenchère. Poser l’ambiance est clairement l’objectif de cet album, et elle se doit d’être oppressante, comme sur chacun de leurs précédentes productions. C’est fou ce que 3 mecs peuvent créer ensemble. A eux 3, Lipynsky (guitare et vocaux), Jay Newman (basse), et Darren Verni (batterie) te pondent un pavé ambiancé incroyable. A noter une info assez intéressante, Jay Newman tient la basse depuis l’année dernière chez les excellentissimes Glorior Belli (J’ai toujours su que GB avait bon gout), et Darren Verni s’est occupé de la batterie l’année dernière et ce début d’année, sans y être davantage.

V est à mon sens le disque le plus difficile d’accès des new-yorkais. Cette colère opaque rebute aux premières écoutes, et l’on a peu de points d’accroche. Typiquement le genre de galette à écouter au casque, encore et encore, isolé, à étudier son ambiance, à détailler chaque instrument. Il faut du temps pour vraiment s’en imprégner. Beaucoup de nuances agrémentent cette musique quasi intellectuelle et occulte. Ils explorent loin, vers des terrains non métal tel le drone par exemple, presque l’ambiant parfois aussi. A la manière du drone justement, ils arrivent à sublimer un morceau qui aurait pu être banal avec un seul riff, celui qui te maintient éveillé, éventuellement te transcende. Un paquet de bonnes idées fourmille cet album mais je trouve tout de même que ce 5eme opus a peu de faits réellement marquants.

Encore un disque sournois de leur part donc, qui déçoit dans un premier temps, puis dévoile quelques touches géniales et originales par ci par la….mais pas suffisamment pour totalement convaincre. Cet album, long à la détente, est complexe, mais bizarrement chaque écoute ne donnera pas forcement son petit lot de surprises. Ils font avancer leur propos donc, et évoluer est la marque des grands artistes. Quelque uns resteront sur le bord de la route, comme ce fut déjà le cas entre In the red et The Trident, et les nouveaux adaptes viendront d’univers différents, métal mais pas seulement.

Connaissez-vous ce sentiment de trouver un album plutôt bon, mais de ne pas vraiment l’apprécier ? Ce n’est pas parce qu’une fille est jolie qu’on sera forcément attiré, non ? Je n’éprouve ni jouissance ni besoin de le réécouter. Son aspect difficilement mémorisable en repoussera plus d’un. Quant aux patients et aux fans de la première ou seconde heure, je serai donc curieux d’avoir votre avis. Unearthly Trance ne fait décidément pas de surplace, c’est tout à leur honneur, mais va une fois de plus diviser.


Rédigé par : Bras Cassé | 13/20 | Nb de lectures : 13767