Tout comme votre grand papy René, le metalcore est entré de plein pied dans le troisième âge, monte escalier Stanna, sonotone et carte vermeil à l’appui. Dépassé par le revival thrash et l’apparition des jeunes zazous adeptes du deathcore, le metalcoreux de base est entré dans un monde qu’il ne comprend plus. Les jeunes sont devenus irrespectueux et de plus en plus violents. Il est déprimé car persuadé que son avenir et ses belles années sont dernière lui. Mais, tout comme papy René devant Marcelle, sa voisine de chambre à la maison de retraite Les Jours Heureux, il est encore capable de faire le beau et de retrouver sa vigueur de temps à autres. C’est ce que tente de nous prouver UNEARTH, un des trois grands du metalcore ricain avec KILLSWITCH ENGAGE et SHADOW FALLS, en proposant son quatrième album en date. Et il est intéressant de constater que malgré son âge, papy René est bien parti pour se dégourdir le colosse une dernière fois car c’est bien connu, c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.

Bien que ne me considérant pas comme un vrai fan du groupe, j’ai toujours respecté UNEARTH car contrairement à leurs nombreux disciples, ils ont toujours résisté à l’appel du côté Obscure en y allant très mollo sur les refrains en voix claires qui font mouiller ta sœur. Car oui autant vous y faire, à part quelques exceptions exceptionnellement exceptionnelles, la voix claires perso je peux pas c’est rédhibitoire. Un rejet physique, mes oreilles n’ont pas été faites pour ça. Je suis bien content de voir que « The March » n’en comporte pas la seule milliseconde. Le chant est comme d’habitude plus hardcore que metal, alternant passages scandés et passages en chant plus agressif, mais toujours bien carrés et placés dans les deux cas. Le groupe nous plonge directement la tête sous l’eau avec « My Will Be Done » et son duo de grattes prodigieux. Gros riffs et double tapping, la recette est toujours efficace et UNEARTH emprunte tout à la fois aux glorieuses années de Maiden et du Göteborg style. Un excellent titre pour mettre directement tout le monde dans l’ambiance. Le niveau technique d’ensemble est élevé et personne n’est là pour rigoler. La plupart des titres seront du même acabit et basés sur ce mix réussi entre guitares chatoyantes, solo eighties, assise rythmique de feu et bonnes grosses moshparts des familles histoire de faire bouger le pit. Ca joue vite, ça joue bien et ça en met plein la gueule.

Mais UNEARTH ne se base pas uniquement sur ses acquis et se permet quelques ralentissements de tempos sur « The March » et « Letting Go ». Ambiance mélancolique et riffs tout en lourdeur au programme. On distingue même une petite touche de clavier sur « Letting Go », un des titres qui sort du lot de par sa différence justement. Une voie à approfondir dans l’avenir peut-être afin d’assurer l’évolution et la pérennité du groupe car certains plans sentent la redite et le déjà entendu à plein nez. « We Are Not Anonymous » et « Hail The Shrine » partagent la même construction, les mêmes arrangements et démarrent de façon presque identique, ce qui a tendance à les noyer au milieu de l’album. C’est le principal souci de « The March », l’album, pas la chanson. Les bases sont là, solides et bonnes, mais les Bostoniens ne parviennent jamais à les transcender si ce n’est par intermittence. Pourtant on sent qu’UNEARTH à les moyens pour aller encore plus loin et devenir bigger and biggest. Les gars ont le potentiel et les bons outils pour écrire leur « Funeral Of God » par exemple. Un album marquant qui transcende le genre auquel il appartient.

Honnêtement tout est en place, tout est là, excellents musiciens, mention spéciale au duo de gratteux, Buz McGrath et Ken Susi, bon vocaliste, prod en acier, excellents visuels (la pochette est vraiment très belle) et sens de la composition mais il manque ce petit supplément d’âme, de génie pour faire véritablement exploser le groupe. En l’état, « The March » est un album au niveau général plus que correct et fait bonne figure dans la discographie des Ricains. Mais le fait est que ça ne reste qu’un album de metalcore. Un excellent album de metalcore certes mais on pouvait peut-être espérer un peu plus. Peut-être pour la prochaine fois. En attendant ne vous privez pas d’un bon album de metal et jetez une oreille sur ce « The March » qui à d’indéniables qualités même si on sent que le groupe joue parfois la facilité. Pour mettre la pâtée au Havre un samedi soir c’est suffisant mais pour battre Liverpool à Anfield un dimanche après-midi pluvieux, il faut ce petit quelque chose en plus que n’a malheureusement pas cet album.


Rédigé par : Seb on Fire | 14/20 | Nb de lectures : 11805