ULTRAPHALLUS n'est pas un groupe de porno grind loufoque dans la veine de GRONIBARD, et ce patronyme n'a d'ailleurs rien de franchement amusant lorsqu'on sait d'où il provient: c'est le surnom de Joe Jackson, père de qui vous savez, qui aurait instauré le viol incestueux comme instrument de discipline paternelle.

L'atmosphère est posée, on n'est pas là pour rigoler.

« The Clever » est la troisième réalisation du quatuor liégeois, après une démo et un premier album déjà autoproduit et distribué par le tout aussi belge label Conspiracy Records. Facilement estampillé « MELVINS et compagnie » à la première écoute, le groupe fait cependant preuve d'une vraie personnalité, tant dans la musique qu'il propose que dans les ambiances qu'il développe.

Si le style stoner-doom-sludge-grungy exécuté par ULTRAPHALLUS rappelle indéniablement les parrains américains du mouvement, les Belges lui appliquent un traitement qui le différencie à bien des égards. A commencer par les martèlements rythmiques limite indus, et ce côté clairement répétitif, ou la voix psychotique de Phil Maggi qui sont les particularités les plus évidentes de la musique du groupe. Les plus évidentes, mais pas les seules. Au fur et à mesure des écoutes, une atmosphère étouffante et malsaine se révèle, plongée dans les saturations: saturation des sonorités d'abord, mais aussi de l'espace sonore lui-même. En effet, l'utilisation à différents plans de nappes de sons « parasites », renforce cette ambiance hypnotique, poisseuse et aliénante, qui trouve d'ailleurs son point d'orgue dans le final psychopathe de « Clever Worm» et l'incorporation d'un saxophone en mode free du meilleur effet.

Les moments d'accalmie, rares, comme dans « Boulder Dash » (référence au jeu vidéo du même nom?) ou par le biais de boucles de musiques plus légères (cabaret sur le même titre, clavecin en final de « Clever Worm », ou violon et piano sur le dernier morceau) ne font que renforcer cette impression d'étouffement et de rage démente, apportant même une touche qu'on pourrait qualifier de décadente.

Avec ces 9 titres pour un peu plus de 40 minutes, ULTRAPHALLUS nous balance un noise core hypnotique à l'ambiance toute particulière. Puisant ses influences dans un éventail de sonorités extrêmes, de l'indus au drone (« Thrombosis »), en passant par tout ce qui se fait de lourd et cradingue aujourd'hui, « The Clever » est un disque personnel et éprouvant, à conseiller aux amateurs.


Rédigé par : NicoSata | 15/20 | Nb de lectures : 11090