Après son depart de Celtic Frost en 2008, Tom G. Fischer ne pouvait pas en rester là. Est alors sorti de terre Triptykon. Il cherche à s’entourer de musiciens talentueux dont notamment V. Santura à la guitare, qui avait déjà fait des piges pour Celtic Frost (en live), mais qui est surtout la tête pensante de Dark Fortress. Une bassiste et un batteur plus loin, voici le line-up au complet. Restait à définir la musique. Rien de plus simple pour Tom. Il suffit de reprendre là où s’est arrêté Celtic Frost, à savoir "Monotheist", et de composer la suite. Voire même d’utiliser les faces B du dernier méfait du trio suisses, plus quelques démos encore plus vieilles, et de compléter avec de nouveaux morceaux.

Le résultat? Un bloc de 72 minutes étouffant, dans la continuité de "Monotheist". Les mauvaises langues parleront même de "Monotheist Part 2", voire même d’absence de créativité de la part de Tom Gabriel. Si ces mauvaises langues n’ont pas tout à fait tort, il ne faut quand même pas occulter le talent d’écriture du bonhomme, et même s'il réutilise certaines face B de "Monotheist", eh bien ça bute quand même !

"Eparistera Daimones" est donc un subtil mélange de doom, de black, de death, le tout enveloppé dans une papillote de plomb. Globalement pesant et lourd, comme sur les trois premiers morceaux, Triptykon sait parfaitement poser des ambiances glauques et sombres. Les riffs sont graves, la voix de Tom G. Fischer inquiétante, et le tempo fait sombrer l’ambiance.

Le groupe va effectivement taquiner le death avec le morceau "A Thousand Lies", au tempo enlevé et aux riffs acérés et agressifs, du meilleur effet. Typiquement le morceau idéal pour se décoller les cervicales. Et même si le groupe sait accélérer le rythme, il a toujours pour but de plomber l’ambiance, d’enfoncer l’auditeur six-pieds sous terre, en l’ensevelissant de plomb et de béton. Rien que les riffs de "Descendant" (qui porte très bien son nom) l’attestent, encore plus gras qu’un kebab-frites (et ce malgré une fin de morceau à toute berzingue). Et la pièce finale, une masse tellurique de 19 minutes, ne donne envie que d’une chose, que le CD s’arrête et qu’on puisse se mettre un truc plus joyeux (genre Evoken) pour éviter de se pendre.

Hélas, la vraie envie de se pendre, et même la sélection échappe de peu à ce "Eparistera Daimones" à cause de deux choses : les pistes 7 et surtout, oui, surtout 8. Si "Myopic Empire" est globalement à l’image du reste, il est quand même égaillé par un coup de piano/chant féminin qui laisse pénétrer un peu de lumière dans les ténèbres. "My Pain", quant à lui, décroche de pompon du « je fous en l’air un album fantastique ». Pendant 5 longues minutes, on a le droit à un chant éthéré féminin sur une musique ambient, douce. Tom y vient murmurer à l’oreille de la douce, mais trop tard, le mal est fait. C’est niais, mielleux et trop gros pour qu’on y croit. Pourtant, 5 minutes de moins sur cet album, ça n’aurait pas altéré l’ambiance générale, bien au contraire. Dommage et rageant.

Celtic Frost est mort, Vive Triptykon, tout simplement. Si "Eparistera Daimones" est une suite logique de l’immense "Monotheist", il est également plus lourd et plus noir (si,si, c’est possible). Noirceur des morceaux soutenue par une production massive et grave, qui enterre chaque instrument au plus loin sous la terre (bon dieu, ce son de basse !!!). Et si Tom Warrior est toujours le compositeur principal, l’apport de V. Santura (Dark Fortress, je le rappelle) sur deux morceaux, "In Shrouds Decayed" et "Descendant", laisse présager du très très lourd pour la suite. D’autant plus que ce premier album est composé de morceaux de l’époque de "Monotheist". Triptykon n’a donc pas fini de nous surprendre, et il va falloir compter sur eux pour nous plomber le moral dans le futur.

Pour finir, il faut parler de l’édition digibook, qui est juste sublime. Outre la peinture de HR Giger (Alien, Celtic Frost, Carcass et bien d’autres…), excellente, l’intérieur est également sombre et efficace, à l’image de la musique. Le livret de 28 pages, outre les paroles et des œuvres d’arts variées, contiennent également des notes de Tom Warrior sur chaque morceau. Toujours intéressant à lire. Et ce qui fait également de cet album un objet, en plus d’être une succession de morceau. Bravo Trypticon !


Rédigé par : Kryde | 16/20 | Nb de lectures : 15796