Je ne sais pas ce que prennent les Ukrainiens comme came en ce moment, mais je voudrais savoir où on peut s’en procurer. Peut-être est-ce l’euphorie due à l’organisation de l’Euro 2012, peut-être est-ce les happenings florissants de l’association féministe « Femen » (qui a pour spécialité de faire se pointer des jolies blondes tétons à l’air dans des lieux publics) qui font tourner les têtes là-bas, toujours est-il que certaines formations ukrainiennes nous donnent envie de lancer une phrase 4chanesque du type « WTF Ukraine seriously ? ». Outre des groupes qui virent tous leurs membres (BALFOR) ou ceux qui splittent d’un coup, les pétages de plombs musicaux se multiplient dans le pays jaune et bleu. Les gars de DRUDKH s’acoquinent avec Neige pour faire du Black à casquette miteux. Bon après tout, ça passe encore. Moins justifiable est le revirement de Viterzgir, ex-KRODA, qui a fondé VITER, groupe œuvrant dans… une sorte d’Electro-Rock/Metal folklorique. Pas loin de tout ça, nous avons les bizarreries du label Svarga Music. Prince de Lu vous avait parlé de SVYATOGOR qui semblait bien barré, je vais me charger de THUNDERKRAFT qui lui aussi s’annonce bien WTF. La fiche promo me dit déjà « Style : Industrial Folk Death Metal », ça promet…

Après un premier album en 2005 (The Banner Of Victory) qui avait été taxé de « CARCASS période Heartwork avec claviers » (ce qui est pas trop faux pour les extraits que j’ai écouté, et c’est déjà assez original), THUNDERKRAFT va donc s’autoriser une évolution assumée vers un Metal avec des apparats électro, mais toujours folklorique et symphonique. Le début de Totentanz, leur nouveau méfait, est pourtant somme toute classique. On démarre par du Folk Metal aux synthés un peu pompeux et aux accélérations Black/Death acérées, dans l’esprit d’un NOKTURNAL MORTUM, pour les morceaux d’ouverture que sont "A Time Will Come" et "Mass Defect". Et bizarrement (déjà…), THUNDERKRAFT ne sonne pas tant « ukrainien » que ça mais lorgne un peu vers le Folk Metal balte à la SKYFOGER, OBTEST, et surtout METSATÖLL et URT notamment à cause du grain de voix très particulier. Le quartet ukrainien se pose déjà comme un groupe assez barré, et va faire exploser son potentiel décalé dès le morceau-titre : en écoutant l’intro « blip blip », je me suis tourné vers ma chaîne hi-fi en me disant « euh c’est bien un disque de Pagan/Folk ukrainien que j’écoute là ? ». Bref, c’est un morceau de Black mélodique avec des effets électro totalement inappropriés digne d’un sous-THE KOVENANT de supermarché, avec des riffs cyber-metal en carton. Certes, DUB BUK avait déjà « osé » mélanger BM ukrainien et incursions électro, mais THUNDERKRAFT va bien plus loin…

Et ce n’est pas fini, car dès le morceau suivant "Death Won’t Separate Us", nous avons une intro atmosphérique qui mêle flûtiaux et effets électroniques d’obédience glitch/IDM. Après tout, on est plus à ça près, manque plus que du chant clair foireux, des solos heavy et des claviers bontempi. Ah ben merde, y’en a aussi sur ce même morceau. Bon… Dans le rang de la WTFerie, nous noterons encore l’electro-Dimmu-Borgiresque "The Future World", l’incursion de saxophone dans le rentre-dedans "A Crumpled Story" (que l’on entend à peine), les claviers mystiques de "Where the Dream Flows As Moisture from Eyelashes", ou encore le final "The Creator of Life" qui ressemble grosso-merdo à du ARKONA avant-gardiste. La prod est bonne, le mix est plutôt convaincant pour une musique qui met quand même un peu de tout partout. Dommage que les musiciens se contentent d’aligner des riffs Black/Death bien fadâsses (et non Fadades), et le seul intérêt de THUNDERKRAFT réside bien dans l’intégration des éléments électroniques et symphoniques… intégration qui est quand même un tout petit peu foirée car on vire très vite dans le n’importe quoi, au lieu de tendre vers quelque chose de novateur, bien que le mérite de l’originalité et de la prise de risque revient bien à ce groupe pour le coup… Seul le chanteur, dans un registre comme je le disais halluciné à la URT, tire son épingle du jeu, ainsi que le morceau atmosphérique "Towards A New Dawn", bien épique avec un esprit KRODA et des nappes de synthé bien amenées.

THUNDERKRAFT nous invite donc dans un univers musical bien barré, difficile de dire s’il s’agit bien d’une volonté musicale ou d’un pétage de plombs en bonne et due forme. Il y a des choses intéressantes dans Totentanz, c’est pour ça que je vais donner la moyenne à ce disque. Parce que bon, tout ceci sent quand même l’expérimentation tellement osée qu’elle finit surtout par être ratée. Il y a encore du travail à faire pour rendre ce gloubi-boulga Electro/Pagan/Folk digeste et cohérent, parce que là ce qu’on en retient surtout, c’est que c’est du Metal slave convenu avec des claviers et blip-blip sortis de nulle part par au-dessus. Le groupe doit freiner ses envies d’originalité à mon avis (l’album dure 50 minutes pour 9 morceaux), et soigner le fond avant de soigner la forme. Un disque à écouter une fois pour se marrer devant le « mélange », et puis c’est tout. So for once, Ukraine : WTF ? Sincerely, the rest of the World.


Rédigé par : ZeSnake | 10/20 | Nb de lectures : 12987