Je me souviens être tombé sur une interview de Mike Williams, grand apôtre du straight-edge devant l'éternel au sein d'Eyehategod, qui était interrogé sur le statut kvlt de son groupe et plus généralement du berceau du sludge qu'est la NOLA. Il y racontait, si je dis pas de conneries, que cette aura valait surtout une fois sorti des marais du Bayou, parce qu'une fois rentrés à la maison, tout le monde s'en branlait plus ou moins. Nul n'est prophète en son pays. C'est, à bien une moindre échelle, la destinée de THOU, cinq blancs-becs débarquant eux aussi des marais de Lousiane, et qui sont en train de se forger lentement mais sûrement une belle petite réput'.

Faut dire qu'ils ont pas chômés, sortant en à peine trois ans d'existence des chiées de splits, d'EP et de lives, toujours dans une démarche DIY jusqu'au bout de leurs petits ongles encrassés, et trois albums, dont le présent "Summit". Une masse de sorties à en foutre NADJA à l'amende, qui leur aura permis de peaufiner leur sens de la composition au fil du temps. Mais ce succès d'estime, tu t'en doutes, n'aurait pas été possible s'ils avaient sonnés comme le premier tribute à EYEHATEGOD venu. Puisque malgré une base sludge "traditionnelle" indéniable, THOU apporte une lecture du genre légèrement différente, probablement due aux expériences passées de ses protagonistes. Genre leur hurleur, qui sonne de manière très troublante exactement comme Dan Weyandt de ZAO, officiait auparavant dans Deer Diary I Seem To Be Dead, patronyme ô combien ridicule d'un groupe de trve screamo de bonne facture, et deux des autres membres dans Barghest, black bobo comme je l'affectionne à la Wolves In The Throne Room et cie.

Bref, tout cela, tu le retrouves dans le son de THOU. Certes, c'est pas les champions de la crasse, le son étant relativement "clair", mais là n'est pas le propos, puisqu'ils ont toujours privilégié une certaine lisibilité dans les guitares, ça bave pas tant que ça quoi. Guitares qui ont, de manière plus prononcée qu'auparavant, mis l'accent sur l'aspect mélodique, des arpèges lancinants, des envolées épiques plus proches de ce qu'on peut retrouver dans cette scène "post-black". Et ce côté précieux vient se superposer au riffing façon galop de mammouth au ralenti, ce qui m'oblige à employer un qualificatif hautement paradoxal, celui de "sludge beau".

La principale chose que l'on peut reprocher à THOU, c'est ce côté un peu chiant, cette tendance à utiliser toujours les mêmes ficelles. Mais paradoxalement c'est ce qui fait leur charme, ça et leur science du riffing bien fat. Reste que de par leur approche, leur démarche, le groupe est destiné à compter dans les grosses locomotives du genre incessamment sous peu. D'ailleurs à l'instant où je clôture ces lignes, après s'être chargé de "Tyrant", leur précédent full length, je vois que Southern Lord va se charger de sortir "Summit" en LP, preuve que leur mode de fonctionnement à base de téléchargement libre, sorties régulières, artworks et packagings maisons et tournées à foison paye au bout du compte. Une bonne leçon de vie pour tous les branleurs qui attendent que tout leur tombe tout cuit dans le bec.


Rédigé par : Crown_Me | 16/20 | Nb de lectures : 13512