Implacable réussite, ou sombre merde ?
Arnaque auditive, ou expression musicale réussie ?
Je vous avoue que ce dilemme s’est présenté à moi durant l’écoute de 'The Avarice of Man'. Si l’on s’en tient à un titre comme "The Seed of Annihilation", l’aspect décongestionnant prend irrémédiablement le dessus, en raison d’une banalité repoussante. A l’inverse, si l’on se réfère à un titre comme "All Too Human", l’orientation change radicalement, et bascule dans un optimisme réel, inhérent à une créativité musicale plaisante... Et, incontestablement, l’impression globale ultime s'oriente finalement vers cette dernière impression.

Les 5 Australiens ne sont pas des novices, en témoignent leurs deux premiers efforts discographiques parus en 2008 et 2009. Et, en dépit d’une couleur musicale potentiellement répugnante, les atouts et qualités de ce 3ème album sont indéniables. Adeptes à leurs début d’un Death Core racé, 'The Avarice of Man' illustre le travail d’un groupe ayant choisi d’évoluer en laissant exprimer ses influences Brutal Death, et s’avère être une vraie bouffée d’oxygène et de qualités dans un océan de banalité. Et, rien que pour ça, cet album mérite le détour.

L’atout principal du groupe ? Ses riffs. Alors évidemment, ne vous attendez pas à des trucs extraordinaires dignes de Satriani ou de Stratovarius. Mais l’insertion et l’utilisation régulière de riffs et de leads mélodiques, acérés, mélodieux et fortement teintés de technicité, apportent une saveur certaine aux 11 morceaux de l’album. Et participent à positionner le groupe entre Metal Core, Death Core et Brutal Death. Mais, peu importent les étiquettes, finalement.
A l’image des titres "Of First And Last Things", "All Too Human" ou "The Relapse of Humanity", les envolées mélodico-techniques des guitares apportent une fraîcheur et une diversité terriblement appréciables, et s’associent plutôt bien avec les variations de tempos. En parlant de tempos, là encore un fait appréciable : la dominante rythmique s’inscrit dans une dynamique clairement brutale, avec une grosse proportion de blast-beats et de tempos énergiques. Sans compter des changements de rythmes fréquents mais cohérents, évitant grandement tout sentiment de lassitude.
Évidemment, qui dit quelques soupçons de ‘Death Core’, dit ‘breaks chiants et mous du gland’. Mais heureusement, les Australiens semblent influencés par la mascotte de leur pays, et nous offrent une majorité de ralentissements hautement sautillants, digne des meilleurs kangourous du Metal. Et là encore les influences Brutal Death prennent le dessus, avec des breaks plus lourds et accrocheurs, purement Death Metal. Côté beuglements, on est en terrain connu, avec des growls graves mais non gruikés, un peu monotones, mais en adéquation totale avec la brutalité omniprésente. Et, point de cris aigus horripilant, ce qui est un atout ici.

Cette description enjouée ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt, et, ne vous y méprenez pas, tout n’est pas parfait dans le meilleur des mondes. Entre 2-3 titres peu inspirés ou trop mous, plusieurs breaks inutiles, et, surtout, une durée d’album légèrement indigeste qui entraîne d’inévitables bâillements entre la 43ème et la 52ème minute, 'The Avarice of Man' n’éclipse malheureusement pas totalement les récurrents défauts inhérents au style. Sans compter que le groupe aime aussi asséner par moments des riffs très basiques et saccadés, tout droit sortis d’un mauvais Job 4 A Gardien de Vache (pléonasme, pardon).
Et pourtant, même en prenant en compte ces paramètres, on conserve un sentiment global plutôt positif. Encore une fois grâce au véritable effort effectué conjointement sur les riffs, sur la technicité et sur les fréquentes variations rythmiques.

La variété des titres, les nombreux changements de rythmes, l’association (pertinente) de riffs mélodiques, acérés et recherchés, et la durée conséquente des morceaux et de l’opus, ne faciliteront pas l’assimilation de l’album, et demanderont un nombre d’écoutes conséquent pour réussir à prendre du plaisir avec 'The Avarice of Man'.
Paradoxalement, cette non-accessibilité immédiate de l’opus, associée avec des titres justement variés, permet aux Red Shore de se positionner aux antipodes des trop nombreux groupes "fast-food" de Death Core ou de Brutal Death pullulant ces dernières années. Ce qui, il faut l’avouer, n’est pas pour me déplaire, bien au contraire.
Bilan ? Plutôt positif, donc. Dans la continuité de leurs débuts, mais avec une orientation « Death Metal » plus marquée, et une réussite réelle. Un peu étouffant, certes, un peu lassant sur la longueur, certes, mais une réussite quand même. Surtout comparé aux bouses habituelles indissociables du style pratiqué.
Et amplement suffisant pour vous réconcilier avec le style musical.




Rédigé par : ..::Ju::.. | 15/20 | Nb de lectures : 13724