Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette fin d’année 2008 aura été prodigieuse d’un point de vue death metal technique. Après le deuxième opus de CYNIC, le second volet d’une prometteuse carrière pour OBSCURA, c’est au tour de THE FACELESS de se tailler une belle part de buzz avec une deuxième galette assez bluffante pour une bande de minos réunie depuis seulement quelques années et dotée d’un cursus proche du néant. Et lorsqu’on sait que ces sales gamins pas encore tout à fait pubères se payent le luxe d’enchaîner plusieurs tournées après celle qu’ils viennent de terminer en compagnie de MESHUGGAH (que j’arrive enfin à écrire correctement) et CYNIC, on n’a pas besoin d’être médium pour s’apercevoir qu’il se passe quelque chose de l’autre côté de l’Atlantique qui pourrait bien déferler chez nous en un temps record.

THE FACELESS s’était déjà fait remarquer par son premier album « Akeldama » dans lequel le quintet californien s’essayait à toute une série d’expériences pour finalement accoucher d’un disque atypique lorgnant sur le deathcore et ses entêtants « breakdowns », une facette qui a aujourd’hui totalement disparu sur « Planetary Duality ».

Si ce deuxième album s’inscrit dans une certaine continuité de son prédécesseur, les mômes ont pris de la bouteille et, enfin, un batteur fixe en la personne d’un certain Lyle Cooper (cherchez pas, il n’est pas plus connu que les autres). Pourtant l’évolution que peut avoir connu le groupe ne saute pas d’entrée aux oreilles. Ainsi l’écoute distraite d’un premier titre comme « Prison Born » donne le sentiment que THE FACELESS va nous avoiner la face à coup de deathcore en pilotage automatique. Pourtant « Planetary Duality » est d’une toute autre envergure qu’on découvre au fil des morceaux pour constater que THE FACELESS est devenu un groupe de death metal progressif ultra technique à la rencontre des CYNIC, NECROPHAGIST et DECREPIT BIRTH. Excusez du peu, ils débutent encore dans le métier. De ce fait vous ne serez pas autrement surpris d’apprendre la foultitude de sweeping, d’harmoniques, d’arpèges ou de patterns jazzy disséminés sur ces neufs nouveaux titres. Il faut dire que question grattes, le duo Keene/Jones connaît son affaire et maîtrise aussi bien les parties rythmiques de malades dignes de SPAWN OF POSSESSION que l’art des solos joliment ciselés. Idem pour la basse de Brandon Giffin qui se permet parfois des lignes totalement indépendantes qu’on aurait peut-être aimé encore plus proéminentes.

Enchaînant des parties ultra brutales avec des passages éthérés, THE FACELESS ménage nos cervicales pour mieux nous planter le pic-à-glace dans la nuque l’instant suivant. Outre les passages délicieusement planants et mélodiques, les Californiens nous dispensent également toute une série d’ingrédients, de détails toujours judicieusement placés qui confèrent à « Planetary Duality » un côté résolument moderne pour ne pas dire, en parfaite adéquation avec le concept cybernétique et SF de ce disque. Des voix robotisées, à l’utilisation sporadique de claviers, de chant clair en passant par un authentique passage de pur black metal sur « Xenochrist » et par divers mini interludes souvent originaux, tout semble réussir à THE FACELESS. On pourrait se retrouver avec un disque décousu sans queue ni tête ou, pire encore, à un étron calibré pour passer en boucle sur MTV, mais non. A aucun moment, le groupe ne perd de sa crédibilité ou de sa virtuosité parce que franchement, faudrait avoir des peaux de saucisson sacrément enfoncées dans les oreilles pour ne pas reconnaître qu’il y a un sacré paquet de chevaux et un joli dosage du feeling sous le capot d’un tel album.

Pas facile de terminer sur les côtés négatifs du disque, surtout lorsqu’ils s’avèrent relativement anecdotiques. Le mixage de la batterie n’est pas toujours à la hauteur et elle se retrouve parfois un peu trop mise en avant au détriment des guitares qui sont les véritables pièces maîtresse du CD. Mais le plus grand défaut qu’on pourra trouver à « Planetary Duality » réside dans son goût de « trop peu » du haut de ses 31 minutes. Je reconnais qu’on a largement de quoi faire vu la densité de l’album mais je pense que personne n’aurait craché sur un titre supplémentaire ou sur un final plus grandiose.

Encore un sacré bestiau de death progressif mais il faudra que THE FACELESS s’accroche sérieusement pour composer un troisième opus à la hauteur. Mais quand on est aussi doué, rien n’est impossible.


Rédigé par : Tonton | 16,5/20 | Nb de lectures : 12699