Bon, je ne suis pas sûr qu’il soit utile de refaire la présentation complète de cet album, surtout qu’il y a déjà eu un certain nombre de news sur VS (avec même un article du Parisien !), et que cet album a une saveur particulière pour nous français, suffisant pour qu’il se soit fait remarquer. Pour ceux qui sont restés dans leur grotte : THERION, le célèbre groupe symphonique mené par Christofer Johnsson, sort avec Les Fleurs du Mal un album de reprises de chansons françaises des années 60/70 (France Gall, Serge Gainsbourg, Sylvie Vartan, Victoire Scott, Marie Laforêt, Léonie Lousseau…). Oui, c’est bizarre, c’est certainement une des plus grosses prises de risque jamais entendues de la part d’un groupe de Metal un tant soit peu connu, mais c’est la lubie de Christofer Johnsson (qui s’est fait refouler par Nuclear Blast d’ailleurs) et il a osé.

Osé, c’est le terme qui résume le mieux Les Fleurs du Mal, disque qu’il est impossible d’évaluer objectivement. Car bien sûr, nous métalleux français défenseurs de la grande cause de la musique underground, ne sommes pas forcément très réceptifs à ce que le grand Metal s’acoquine à la chanson française traditionnelle, pour des morceaux que l’on a tous entendus au moins une fois, au détour d’une radio ou d’une émission télé. Surtout que le « délire » est très premier degré, ce n’est pas comme si GRONIBARD reprenait Michel Sardou ou Frédéric François. Par contre, pour les étrangers qui n’ont jamais eu à aborder involontairement ces « tubes », l’approche est totalement différente. Il suffit d’aller voir les critiques sur RateYourMusic pour voir la différence : les français défoncent le disque, les autres adorent. Peut-être y’a-t-il une légère pointe de mauvaise foi, car musicalement Les Fleurs du Mal est défendable. Après tout, c’est assumé et Christofer Johnsson ne cherche à aucun moment à se foutre de la gueule du monde (enfin, la dernière fois que j’ai affirmé ça…), donc il vaut mieux prendre ce disque pour ce qu’il est musicalement plutôt que de s’attarder sur le concept même des reprises…

Et THERION reste THERION dans son Metal symphonique dans la lignée de Sitra Ahra (qui n’était pas fameux), avec bien évidemment un côté plus « simple » ici, sans envolées opératiques en tout genre, malgré la présence de bons nombres d’arrangements sympho. On retrouve donc l’aspect plus direct d’un Gothic Kabbalah avec un line-up restreint, sans les compos de haute volée tout de même. Et dès les premières minutes, Les Fleurs du Mal se pose comme une bonne surprise. "Poupée de cire, poupée de son" s’avère être un morceau assez accrocheur, et on constate d’emblée que le chant en français est parfaitement mené par tous les intervenants (pas d’accent horrible ou approximations de langue) sur l’ensemble du disque. Le plus posé "Une fleur dans le cœur" est ma foi très sympathique. Et "Initials B.B." est tout simplement grandiose, la plus grande réussite de cet album à n’en pas douter. Mais passé ce trio d’entrée, Les Fleurs du Mal s’essouffle très vite. Et nous auront donc droit à une pelletée de morceaux très plats et ennuyeux comme "Mon amour, mon ami", "La Maritza", "Lilith", "Wamala Manitou", "La licorne d’or"… seuls "Dis-moi poupée" et "En Alabama" épicent un peu le tout. THERION s’est lâché sur le grandiloquent et les chants sont parfois limite-limite. Thomas Vikström nous balance toujours son chant suraigu souvent insupportable ("Une fleur dans le coeur", "Je n’ai besoin que de tendresse") et Lori Lewis abuse parfois de son chant lyrique ("Polichinelle"). Reste alors les interventions de Snowy Shaw toujours appréciables, même si ça coince légèrement pour le début de "Dis-moi poupée"…

Bref, un album bien WTF dans le fond, sentiment appuyé par des reprises comme "Je n’ai besoin que de tendresse" ou encore le bonus "Les sucettes". Dans la forme, c’est du THERION volontairement kitsch, et ça plaira ou pas. Inutile de dire qu’il n’y a pas de demi-mesure avec Les Fleurs du Mal, même si l’on peut isoler certains titres qui sont au-dessus du lot. Si le « concept » vous irrite les oreilles rien qu’en y pensant, laissez tomber, ce disque n’est pas fait pour vous. Il n’est pas fait pour les français qui n’aiment pas la « chanson française », il n’est pas fait pour ceux qui attendaient du THERION à la Theli, Vovin, Lemuria/Sirius B, Beyond Sanctorum, dans l’absolu il n’est même fait pour personne. C’est juste un délire de Christofer Johnsson qui a été pressé sur disque, et d’ailleurs fait à la base pour être uniquement vendu en concert. Reste juste à savoir si le délire vous intéresse ou pas. J’en retiendrai juste quelques reprises réussies, mais bon je pense que THERION n’a plus rien à dire depuis Sitra Ahra, alors si Christofer veut s’amuser grand bien lui en fasse, surtout que le groupe va faire une longue pause à priori. Un album de Metal qui nécessite un taux d’ouverture d’esprit sans précédent pour pouvoir être apprécié à sa juste valeur.

Liste des reprises présentes sur Les Fleurs du Mal :
1. FRANCE GALL - Poupée de cire, poupée de son (version d’ouverture)
2. VICTOIRE SCOTT - Une fleur dans le cœur
3. SERGE GAINSBOURG - Initials B.B.
4. MARIE LAFORÊT - Mon amour, mon ami
5. FRANCE GALL - Polichinelle
6. SYLVIE VARTAN - La Maritza
7. ANNIE PHILIPPE - Sœur Angélique
8. ISABELLE - Dis-moi poupée
9. LÉONIE LOUSSEAU - Lilith
10. LÉONIE LOUSSEAU - En Alabama
11. LÉONIE LOUSSEAU - Wahala Manitou
12. CLAIRE DIXON - Je n’ai besoin que de tendresse
13. VICTOIRE SCOTT - La licorne d’or
14. BETTY MARS - J’ai le mal de toi
15. FRANCE GALL - Poupée de cire, poupée de son (version de clôture)
16. FRANCE GALL - Les sucettes (bonustrack)


Rédigé par : ZeSnake | Made In France/ | Nb de lectures : 14490