Voilà un groupe qui peut s'enorgueillir d'avoir survécu à une N.D.E.
Les fans peuvent respirer et les curieux jeter une oreille sans risquer de se souiller le nerf auditif.
Avec le recul on pourrait même s'hasarder à avancer que tout cela n'a rien de surprenant. TOT a initié un genre qui a définitivement terminé d'enfoncer des portes ouvertes et de s'écrouler sous le poids des clichés véhiculés par ses rejetons. Il était temps de faire le ménage. En outre, la rupture avec Liv Kristine étant consommée depuis longtemps, le groupe a pris ses distances avec les rubriques people des zines metal ; tout le monde a pu se remettre au boulot. Parfait.

On se souvient de « Storm », magnifique tempête dans un verre d'eau qu'on pourrait avec un minimum d'indulgence envisager comme le résultat de la délicate période de transition postérieure à l'arrivée de Nell Sigland (The Crest) au chant. Pour mémoire la petite n'avait aucune raison de pâlir de ses qualités vocales, tout au plus l'ensemble souffrait-il d'un cruel manque d'inspiration et d'un song-writing un peu bancal.
Arrivé au terme de l'épuisement de leur propre identité, les membres de TOT se présentent aujourd'hui sous un visage empreint d'humilité, au service d'une musique lucide et libérée de son héritage. Sans parler d'un retour au son d'Aegis -loin de là- le groupe semble avoir tiré un trait sur ses douteuses expérimentations electro pour proposer un gothic rock racé qui évite soigneusement toute surenchère et privilégie la justesse de ton.
Tout en retenue, l'atmosphère de l'album n'en est pas moins dense, chaque titre dégageant un flot d'émotions entre sentiment de perte et sérénité, à l'image de la carrière mouvementée du groupe. Ici et là les mélodies sont soutenues par une partition de clavier discrète, quelques instruments à cordes judicieusement amenés, le tout servi par un mix cohérent où le chant aérien de Nell S. trouve sa place naturelle bien plus qu'il ne l'impose. A ce titre les parties viriles du chant de Raymond J. Rohonyi n'interviennent plus systématiquement et gagnent en pertinence en évitant le sempiternel contraste avec la voix limpide de sa partenaire. Le monsieur se paie même le luxe de placer quelques lignes vocales atypiques, comme ces paroles presque scandées sur le superbe « Astray ». Jusqu'aux grattes qui participent de cette alchimie avec des riffs qui balancent entre lourdeur et éther, juste un petit coup de jus sur les punch-line, rien de bien nouveau vous me direz-vous mais quand c'est bien fait je me sens tout chose.
Dernier détail, les fans de la première heure pourront s'abîmer les yeux sur les détails de l'artwork qui est composé d'éléments de toutes les pochettes précédentes.

Forever is the world s'écoule paisiblement, sans coup d'éclat mais sans morgue inutile, sur un mid tempo rêveur qui caresse nos pensées sans les perturber. Nettement plus mainstream peut-être, je n'y vois pas offense en tous cas. Exactement le genre d'album que j'adore écouter tôt le matin sur la route, l'esprit vierge et le sourire aux lèvres.


Rédigé par : #Guillaume# | 14/20 | Nb de lectures : 12354