TANKARD a toujours été plus ou moins le bouffon (autoproclamé) du thrash allemand, comme ANTHRAX l’était dans une certaine mesure pour le thrash US, et c’est certainement ce qui l’a sauvé et lui a permis de traverser toutes ces années sans trop subir de dégâts. Parce qu’on est toujours plus prompt à pardonner un album moins bon que les autres à une bande de pochtrons rigolards qu’à une escouade de sulfateurs adorateurs de satan. Certainement également parce que derrière les conneries que les Allemands adorent raconter se cachent souvent quelques titres plus sérieux comme « Dancing On Your Grave » et ses préoccupations écolo sur « The Meaning Of Life » ou « Betrayed » sur « Two Faced ».

L’artwork de « Thirst » en est un bon exemple, à moins que ma période funeral doom du moment n’ait des répercussions sur mon jugement : ce pauvre bonhomme grassouillet tout désemparé au milieu du désert avec pour seul bagage une chope vide, devant un panneau annonçant que le prochain pub est à 666 km est à première vue poilant. Mais en y regardant de plus près, on remarque les vautours qui tournent dans le ciel au-dessus de l’infortuné pochard, on remarque également son air perdu et en extrapolant un peu on se dit que vu le bol qu’il semble avoir, il y a peu de chances pour qu’il atteigne ce fameux pub sans perdre quelques morceaux de bidoche… Une impression en quelque sorte confirmée par la première chanson, « Octane Warriors » dans laquelle TANKARD prévoit une prochaine et peut-être pas totalement hypothétique guerre déclenchée par une pénurie de pétrole et par l’une des plus graves écrites par les Allemands, « When Daddy Comes To Play », qui traite de l’inceste.

« Thirst » n’est pas pour autant un album sombre, la patte TANKARD est bien là et on ne note aucun bouleversement d’envergure dans son style. Nous sommes toujours dans un registre thrash old school inspiré et rapide, peut-être même encore meilleur que « The Beauty And The Beer » parce que légèrement plus accrocheur. Mais, sans tourner en rond, on a l’impression que les Allemands ont atteint une sorte de maturité qui, comme une bonne bière belge, lui donne de la rondeur et de la force en bouche, laissant une agréable et persistante sensation au palais, comme si toutes les années qu’avaient duré sa maturation cherchaient à s’exprimer. Bien sûr, on y perd un peu en intensité pure, en explosivité, mais la richesse des arômes est incomparable. TANKARD est ainsi en 2009, certainement un peu moins déconneur qu’avant, moins insouciant disons. Mais la cartouchière est loin d’être vide, le riff s’est affiné et l’humour toujours là ; notre sympathique chope a encore de beaux jours devant elle, « Thirst » en est la preuve.

J’ai eu l’impression de redécouvrir le groupe après quelques albums bons mais pas exceptionnels qui me donnaient le sentiment qu’il était plus ou moins en roue libre. Il n’en était rien et il faut espérer que tous les amateurs de thrash n’auront pas, comme moi, laissé l’album dans le bac de leur disquaire sous prétexte que « TANKARD c’est toujours pareil ». TANKARD est effectivement prévisible, mais la qualité est au rendez-vous et il est assez difficile de trouver un album de thrash de ce calibre pour qu’on fasse la fine bouche !


Rédigé par : Dungorpat | 16/20 | Nb de lectures : 12083