En à peine deux albums, le Norvégien Hoest n'avait déjà plus rien à prouver. Sa discographie de full-lengths, beaucoup en rêverait. Le reste est presque du bonus, expliquant peut-être que le groupe se permette des sorties sans grand intérêt (des splits assez modestes, des EP très moyens). Depuis quelques années, Taake se concentre pas mal sur la scène et les différentes sorties sont suivies de prestations live, il faut le reconnaître, de très grandes qualités. Hoest et sa bande tournante prennent leur pied sur scène, et c'est tout à leur honneur et pour notre plaisir. Les albums n'en sont pas pour autant la photocopie du précédent, et Hoest s'amuse, se livre à ses envies, reste créatif.

Autant, Taake était passé comme une lettre à la Poste, livrant en grande partie ce qu'on attendait du groupe, autant Noregs Vaapen part dans l'autre sens. Dans notre tout petit monde des amateurs d'art noir, Taake aura même lancé sa petite polémique avec son nouvel album. Entre des anciens qui ne reconnaissent plus vraiment le Taake des débuts jusque de jeunes fans qui ont là l'occasion de défendre leur première acquisition du groupe, le débat est lancé. Et puis cet album a des qualités... mais aussi des défauts.

Non, je ne vais pas pousser un cri vibrant pour prôner le destruction des banjos à travers le monde. Taake nous a déjà rendu sourds en balançant des coups de guimbarde magique, nous ne sommes pas à un banjo près. Sincèrement, le banjo de "Myr" m'a surpris mais ne me dérange plus. La partie proposée est vraiment excellente, avec un solo soutenu par une rythmique sautillante (dommage que les grattes soient sous-mixées à cet endroit). Ce qui me dérange dans "Myr", c'est tout ce qu'il y a autour de la partie de banjo. Le début du morceau est amenée au forceps, reprenant à 1min00 l'arpège du premier titre de Hordaland (à 4min50, si vous voulez comparer) et proposant un blast bien plat. Gros riff plaqué, puis la partie banjo sympa, puis re-gros riff plaqué et on repart sur un final très banal. Hoest nous a clairement habitué à mieux dans ses enchaînements.

Sur l'exemple de "Myr", vous avez mon sentiment général sur l'album. Quelques surprises, quelques très bonnes parties et de l'emballage à la limite du remplissage. "Fra Vadested..." qui ouvre l'opus est un titre assez standard pour Taake (mais plaisant), "Orkan" qui suit est un titre moisi pour Taake. Diantre que le rythme en est plat. On parle de "Myr", mais vous avez écouté le titre peu transcendant "Helvetesmakt" qui le suit? Sur l'ensemble, bien peu de moments m'auront détaché de ma condition humaine. On conserve globalement les recettes qui tournent bien chez Taake depuis quelques années, avec le début qui pète et une seconde partie de titre plus dansante. La même recette en moins bien, vous comprenez maintenant mon manque d'enthousiasme. Le titre qui ressort est finalement "Nordbundet", dévoilé précédemment par l'EP Kveld, dont la montée en puissance est assez irrésistible.

Ce qui marque le plus cet opus est la pléthore d'invités qui viennent hurler (Nocturno Culto, Attila, Demonaz, Skagg, V'gandr, n'en jetez plus!) ou qui viennent grattouiller un instant le solo de gratte, la mandoline ou le mellotron. Oui, je sais, un mellotron ne se grattouille pas. Mais j'ai déjà placé le banjo. Enfin, bref, le plus amusant est presque d'essayer de discerner quel invité fait quoi dans le titre. Tout le reste est signé Hoest, qui ne déroge pas à ses habitudes en mettant tout en boîte (et très bien, comme d'hab). Gros son puissant et rond, mais les médiums des guitares sont bien restitués pour le plus grand plaisir de l'auditeur de black.

Mes premières impressions étaient bien pire, mais en ravalant ses rêves on parvient à écouter cet opus assez moyen. Moyen pour Taake, donc tout à fait correct par rapport au reste de la scène. Avec ses compos simplifiées, nul doute que Hoest va en profiter pour dynamiter les prestations scéniques. Et là-dessus, Taake est un groupe de club à la carrure assez exceptionnelle, le genre que même des loulous à casquette viennent voir. Misère....


Rédigé par : Prince de Lu | 13,5/20 | Nb de lectures : 15715