J'vous jure, y'a de quoi vous user le chroniqueur le plus zélé (et c'est même pas moi). Alors que Foreboding Silence encombre mon bureau depuis deux mois, le projet diarrhéique vient de pondre deux nouvelles rééditions via la mère-porteuse qu'est devenu Displeased. A peine auront-ils fini de rééditer cet encombrant catalogue qu'il faudra attaquer la troisième fournée.

Je pense avoir usé toute ma salive concernant Striborg, projet qui décide "d'avancer toujours en limite de rupture de l'immobilisme" (copyright un grand patron français). Tout ce que je peux dire de plus concernant ce black/ambiant minimaliste des forêts est une confirmation: ce projet fait flipper mon chat. La pauvre petite bête, qui résiste stoïquement aux attaques les plus massives et aux démos les plus dégoulinantes, ne supporte que quelques secondes de "Gnaaagnaaa" avant de fuir, tous les sens en éveil.

Encore une fois, Striborg nous sert un black qui se perd dans les méandres de sa sous-production, s'auto-plagiant inlassablement entre ses titres black et ses interludes trop zarbies à deux euros (à court d'idées pour le synthé, le génie a aussi opté pour des textes récités mixés à la hache). Striborg s'essaye cette fois à des titres plus orientés "rock", nous servant un "Weeping Abandoned Spirit" touchant de naïveté (et c'est l'extrait vidéo, enjoy). Pour le reste, vous connaissez la recette.

La guitare grésille ses trémolos monotones. La voix est limite exténuée, même si le gobelin ne fait jamais le bonheur de s'arrêter. J'ai pourtant cru qu'il allait finalement mourir dans "My Journey through the Hills..." à faire des haaa haaaa haaa. Les riffs sont très répétitifs et globalement vides. Seul le jeu de batterie continue de bénéficier de subtiles améliorations au fil de sorties pénibles. Je donne une mention spéciale aux aplats de clavier du titre éponyme qui tombent comme de la merde à Noël, avec un sens de la musicalité défiant les lois établies par Malevolus. Pour être honnête, quelques rares passages intéressants affleurent de temps à autre, mais je n'ai même pas envie de vous en parler tellement tout cela est vain.

Pour un écolo, qu'est-ce que Sin Nanna peut gâcher comme arbres dans ses livrets pleins des sempiternelles photos de forêts. Pour terminer cette chronique d'un album plus mauvais que Autumnal Melancholy, je cède donc exceptionnellement la parole à des personnalités.

Aaah Striborg. Und betite moment de couinément dans und monde bien trop statiqueu. J'aime beucoup la fineu délicatesse de ses riffs acérés, comme oune craie qui crisse sur lé tableau nouare. Comme deu la dentelle qui serait apposée sur un sac poubelle. Magnifiqueu. Génial, dékadente et tellement bobo à la fois.
- Karl Lagerfeld

Ah ouaaaais. Striborg, je m'souviens. C'était un joueur suédois avec un bandeau, il était suuuupeeer bon, tu vois. Il avait tenté un retour sur le circuit avec sa raquette en bois. Le bois, l'arbre, c'est dans le trip écolo quoi. Je savais pas qu'il s'était lancé dans la musique comme moi. C'est cool, tu vois. Faudra qu'on se fasse un bœuf ensemble. A moins qu'il soit végétarien.
- Yannick Noah

Fuck you!! Striborg is black metal ? You don't know what black metal means, asshole! Striborg sounds like a cat trapped in a microwave. Go and fuck off!
- Necrobutcher (éméché)

Magnifique, Striborg. Je l'ai rencontré en 1972, avec Carlos et Annie Cordy. Il y avait aussi Lordi comme invité sur le plateau. Il aimait déjà les chiens. Quelle carrière incroyable. Douze albums vendus. Un de chaque. Magnifique.
- Michel Drucker

Le fa dièse, tout est dans le fa dièse. Gnaaaaaaiii. Là, il est plutôt bien placé, comme dans "Loving You". Je vous le chante ?
- Richard Stamos, petit frère de John Stamos

Donc, je relis: l'individu affirme qu'il écoutait simplement un disque de musique noire, la fenêtre ouverte, au moment des faits qui lui sont reprochés. Personne dans son entourage n'aurait été blessé ou martyrisé de manière à produire des bruits, qualifiés par le voisinage d'inhumains. Quand vous dites "musique noire", c'est un truc de hip-pop là? Z'êtes une racaille?
- Brigadier Martin, intervenant dans mon appartement suite à une plainte des voisins.

- Hééé oui, Patrick. Je suis actuellement avec Sin Nanna. I'm with Péché Chick. How do youuu feel, after this world record? So many releases at the same time. Cooom-ment voussentez-vousaprèscerecord mondiaaal?
- Well..
- Hé oui, Patrick, il dit qu'il va biennn et qu'il est en con-fiance, fier d'avoir accompli cet exploit unbelievable.
- But...
- Et il ajoute qu'il peut encore faire mieux et sortir deux albums dès le mois prochain. Merci Sin Nanna. Thank you very much, Péché Chick. Big kisses from Patrick Montel.
- Nelson Montfort

Ecoute plutôt mon nouveau disque que cette merde. Mon disque, il est livré dans une boîte en plastique et il y a des images dans une sorte de petit fascicule inséré dedans. Et c'est du vrai rock'n'roll. Je dis même "black metal rocks" dedans. C'est unique, ça revient aux sources et c'est très avant-gardiste en même temps. Attends, je trouve plus la fiche de notes que Roadrunner m'a préparée pour la promo.
- Satyr

Striborg, c'est plus que de la musique, c'est un état d'esprit quoi. Quand tu mets un album, tu ressens Striborg. Quand tu l'écoutes, le monde n'existe plus tellement c'est vachement intègre.
- Un fan

Combien il a sorti d'albums ? C'est le dixième ?!? En combien de temps? Rooh, la vache, on est à la bourre là. Heureusement que le nôtre sort bientôt.
- Axl Rose

Après une entrée remarquée de Striborg dans le capital de Displeased, l'action se porte plutôt bien. Le marché reste sensible aux différentes et nombreuses productions de l'entité, mais se montre méfiant sur la portée à long terme des actions engagées, avec le risque de noyer les places boursières. Striborg va avoir besoin de rassurer ses actionnaires, probablement en proposant une plus grande variété dans ses investissements.
- Jean-Pierre Gaillard, à la Bourse de Paris

Venant du plus profond des abysses, la vibration démoniaque qu'insuffle Striborg à son art vénérable fait ressentir la douleur jusqu'au plus profond de l'âme. Semblable à une liturgie désespérée, Sin Nanna entonne ses chants funestes pour s'acoquiner du désespoir, tout en créant une onde spectrale qui le libère des contraintes qu'impose l'état de simple mortel. Là où beaucoup se contentent de peu, Striborg s'avère être au-delà du néant, proche d'un état de grâce en négatif, comme on en imagine dans certains rituels de cultes obscurs et anciens. L'œuvre est magnifique et exhorte aux vivas, laissant pantelant par son audace et sa singularité. La chimère d'un art noir et simple s'efface pour laisser s'exprimer la douleur de tout simplement être en ce monde décadent. Et c'est sur cet amer constat que ne peut que se résigner l'auditeur qui a subi l'épreuve de son feu ardent et intemporel.
- Un journaliste spécialiste du black metal*
Toute ressemblance avec un chroniqueur existant serait purement fortuite (non, ce n'est pas Philippe Manœuvre ).


Rédigé par : Prince de Lu | 03/20 | Nb de lectures : 13805