La France tiendrait-elle enfin « son » groupe de métal prog de dimension internationale ?
Trop tôt pour le dire mais quelques signes tangibles semblent indiquer que ce Mental Torments offre des raisons d’y croire. Otons cependant toute ambiguïté et coupons l’herbe sous le pied de certaines critiques qui ne vont pas manquer de fleurir. S.U.E n’a pas réinventé l’eau chaude. (Bien que certains y travaillent sans relâche au fond de laboratoires secrets, les résultats sont encore loin d’être satisfaisants…). Le nom du groupe, la pochette (signée Mattias Noren), les thèmes abordés, la durée des titres, le label, pas de doutes possibles, il s’agit bien de métal prog on ne peut plus classique dont les influences dominantes sont très largement gravées dans le marbre : Dream Theater, Symphony X, Van Den Plas. Vous pourrez en trouver d’autres, libre à vous de les identifier. Les progrès des musiciens hexagonaux sont suffisamment probants pour leur permettre de taquiner de telles pointures. Hélas, trois fois hélas, si la technique n’est plus un problème, qu’en est-il de l’imagination, de l’originalité, de la nouveauté ? ELLIPIS excepté et qui est un des rares à proposer quelque chose de vraiment différent, le métal prog « à la française » se morfond dans l’à peu près depuis plusieurs albums déjà. (Des noms ! Des noms !) De ce fait, a-t-on besoin d’un énième clone pour le pasticher davantage ? La réponse est dans la question. Et si la question est cruelle, elle mérite d’être posée. Car ce genre si prisé doit absolument se renouveler pour se distinguer de sorties qui multiplient les clichés sans tenir compte des erreurs et faiblesses mille fois décriées. Autrement dit, les leçons ne portent pas ou si peu. Compte tenu de ce tableau pessimiste, comment se comporte l’élève S.U.E ? Et bien, pas si mal que ça ! Mieux, il pourrait nous réconcilier en partie avec le genre. Après une démo remarquée, The Burning Box, voici leur véritable premier album qui se révèle être sans contestation un bel objet. Outre les gimmicks habituels, on a enfin droit à une voix satisfaisante, un son identitaire, une atmosphère, une production acceptable et une impression générale de sérieux, de travail bien fait. D’ailleurs, à propos du chant, la marge de progression semble confortable et laisse présager du solide voire de l’excellence. Frank Garcia, qui possède un timbre de voix à caractère, n’a rejoint le groupe niçois que peu de temps avant l’enregistrement et n’a eu que 4 jours pour répéter les titres déjà composés sans lui. C’est dire ! Pour le reste, à peine doit-on regretter un léger manque de maîtrise dans la construction de certains morceaux avec des breaks parfois fantaisistes mais ce n’est aucunement rédhibitoire. Les deux premiers titres, So Cold (6’08) et Now Or Never (7’04) m’ont immédiatement séduit, sans restriction. Instrumentation et exécution au cordo, les musiciens sont techniquement irréprochables, le chant, on en a parlé, les ambiances sombres et heavy, etc... S’agissant d’un groupe français et connaissant mes a priori détestables concernant la scène hexagonale, je suis le premier surpris. Donc, je continue ma petite exploration dans ces Tourments Mentaux avec bienveillance et une grande sérénité intérieure. Pensez-donc, pour une fois que je ne vais pas massacrer des p’tits gars de chez nous…Les titres suivants sont du même tonneau dont un instrumental impressionnant, Burning Box Gala (6’21) et les deux plus longs font montre d’une réelle ambition. Mental Torments (15’28), une mini suite à tiroirs bien agencée et Echoes Of The Stars (8’40) dans le registre ballade. Et si je vous dis qu’en live, il paraît qu’ils assurent, voilà un bilan et des perspectives globalement très encourageantes pour ce groupe en devenir. Allez, hop ! Un petit coup de pouce à S.U.E. On attend la suite patiemment et sagement avec pour récompense, une confirmation de toutes ces promesses et le maintien assuré dans les sphères supérieures.


Rédigé par : Karadok | 15/20 | Nb de lectures : 11544