SOFY MAJOR est présenté comme un groupe clermontois proposant une musique allant du screamo au doom. Le tout avec une éthique D.I.Y. Ca titille forcément l’oreille. Si on connaissait le passé plus hardcore du groupe, son évolution est intéressante et logique. De sortie en sortie, les Clermontois ont alourdi, noirci et métissé leur son. Screamo donc, doom mais aussi sludge, postcore, hardcore, metal, shoegaze et une pointe d’expérimentation noisy pour la forme. Tout commence par du gros son semblable à deux déflagrations de basse et un premier morceau qui se pose de plein pied dans le postcore sludgy, voire doomy à la Overmars, avec une seule phrase répétée en boucle: « We all genocide celebs ». Une entrée en matière des plus sombres et lourdes qui pose les bases de ce que sera « Permission To Engage ». Un album lourd et cohérent tout en restant versatile dans cette cohérence. J'espère que je me suis bien fait comprendre. Si on retrouve bien un fond de doom postcorisant, on se retrouve désorienté dès que le second titre « Cobra Blanc » déboule avec son riff à la Helmet et ses ambiances à la Unsane. Un mix d’influences digérées et régurgitées avec classe qu’on retrouvera tout au long de l’album.

Certains titres bâtis sur une basse bondissante et écrasante possèdent même une petite vibe rock’n’roll sludge à la Kruger ou à la Kylesa. Le titre « Dearth Of All » est d’ailleurs parfait pour résumer l’album et démontre bien la versatilité de l’album, en changeant de direction en plusieurs endroits, accélérant le tempo avant de freiner des deux fers pour rebalancer un peu de lourdeur et jouer avec l’appréhension de l’auditeur. Dès qu’on pense cerner le truc, les gars changent de direction, ajoutent ou enlèvent un élément histoire de noyer le poisson et de repartir vers d’autres horizons. Mais toujours avec le désir de ne pas se perdre. Ni eux, ni l’auditeur.

Si, jusque-là, on s’était plutôt fait matraquer à coups de gros riffs bien lourds semblables à autant de coups de tatanes, renforcés par une prod en béton et un mastering made in Nick Zampiello, le titre « Douxjesus666 » ralentit fortement le tempo et permet de reprendre son souffle en présentant un morceau de "post doom" qui réalise l’exploit d’être à la fois aérien et pachydermique. Le truc qui me « dérange » un peu et auquel je n’adhère pas c’est la voix. J’ai du mal avec le timbre et la façon de chanter, par contre j’adore le passage parlé sur « Non Rien… » Je l’avais évoqué et ça se confirme, la seconde partie de l’album est plus lourde et orientée sludge, post doom et compagnie. Et là, on commence un peu à décrocher, à piger les arcanes de la conception de « Permission To Engage », les titres suivants, s’ils sont toujours d’excellente facture sont moins surprenants, plus balisés, moins pêchus que ceux de la première moitié d’album. Le côté rock’n’roll a un peu disparu pour laisser place à des ambiances plus sourdes, plus nuancées, plus alarmistes aurais-je envie de dire.

Puis vient « Eugene », le dernier titre de l’album long de 10 minutes, presque planant, au carrefour entre l’ambient, l’expérimental, le postrock et le shoegaze déglingué. Les guitares se font plus discrètes, dissonantes, sifflantes et laissent la place à une basse toujours plus lourde surplombant un duo de voix mixte venant mourir dans des sonorités lancinantes et un larsen annonçant la fin mais aussi la suite, qui s’annonce radieuse, pour un groupe en pleine possession de ses moyens et riche d’un univers propre et maîtrisé à la perfection. D’ailleurs le visuel de l’album est très beau à l’image tout l’habillage illustratif mixant les ambiances sataniques et dictatoriales avec une petite touche CNK. Du bel ouvrage venant renforcer la conviction que SOFY MAJOR a pondu là un excellent album, riche et varié même si pas exempt de menus défauts qui seront facile à gommer dans le futur.


Rédigé par : Seb On Fire | 15/20 | Nb de lectures : 12189