SKITLIV… "vie de merde" en Norvégien… tout un programme… Rien à voir avec le site qui narre les mésaventures d'un malchanceux qui se fait flasher pour excès de vitesse alors qu'il s'adonne à de coupables plaisirs solitaires… Non, SKITLIV est le nom du groupe de Doom/Black Metal fondé autour de personnalités emblématiques du genre : Maniac de MAYHEM, Kvarforth de SHINING et d'autres olibrius… Ce nouveau disque est le prolongement de "Amfetamin" qui avait laissé un souvenir plus que mitigé au camarade Wasted qui l'avait décortiqué…

SKITLIV a tout du supergroupe, autour de ce projet gravitent des gens de MAYHEM, de SHINING, de GORGOROTH, de ARCTURUS… bref, toute la jet-set Black Metal est là : y avait Fernand, y avait Firmin, y avait Francis et Sébastien… et puis Paulette… Et tout ce beau monde s'est réuni pour pondre un album de Black Metal sévèrement teinté de Doom et de quelques giclettes d'Indus lorgnant parfois vers une sorte d'Ambiant minimaliste…

Globalement, SKITLIV est le digne fils de ses pères : un mélange entre l'univers froid et méphitique de MAYHEM et l'atmosphère mélancolique et déprimée de SHINING. C'est rampant, froid, maladif… on ne sait pas dans quoi on a marché mais on sait que ça colle aux godasses. Un marécage de boue froide où l'on finit par s'enliser jusqu'au cou. Plus les oreilles errent dans ce dédale visqueux plus elles s'emplissent des vapeurs toxiques qui émanent de ces titres qui flottent entre lenteur morbide et quelques sursauts plus sauvages… Pour schématiser, "Skandinavisk Misantropi" hante le même charnier que "Ordo Ad Chao","III - Angst - Självdestruktivitetens Emissarie" et "Rom 5:12"… Certains diront que SKITLIV pisse dans le vent, ils auront peut-être raison, mais il faut tout de même reconnaître que Maniac et ses copains ont poussé le bouchon plus loin en matière de bizarre…

Au-delà de la première strate "académique" de cet album, on découvre une certaine complexité, SKITLIV ne semble pas suivre le troupeau, il semble plutôt l'empoisonner en allant traîner sa carcasse aux confins de mondes musicaux variés. Indus, Post Rock, Noise, Black Metal, Doom… SKITLIV visite ces univers poissards et en extirpe l'essence afin de se l'injecter dans les veines. Mélancolique, stressant, étouffant, lumineux, ténébreux, opaque, fantomatique… on pourrait enfiler encore bien des adjectifs et faire un joli chapelet mais tout le verbiage du monde ne saurait décrire ce que l'on peut ressentir à l'écoute de cet album atypique… un album sur lequel il faut s'attarder assez longtemps avant de le pénétrer... et de l'apprécier.

La créativité tentaculaire des compositeurs de SKITLIV prend des formes si diverses qu'il serait délicat de séquestrer la musique de ce groupe dans une seule et unique case. Dans son chaudron de sorcière, SKITLIV brasse SKIN CHAMBER, MAYHEM, VOIVOD (époque "Phobos"), RIGOR SARDONICOUS, CURRENT 93, BEHERIT… le résultat est d'une richesse assez fantastique. Une musique étouffante, aérée, morte, grouillante… trouver les mots justes est tâche difficile.

On passe l'intro de l'album, une longue langue de brouillard d'Ambiant Electro parcourue de murmures et de crissements et l'on entre enfin sur les terres lourdes d'un album prenant. L'atmosphère si singulière de SKITLIV rentre et s'insinue partout, poignante et oppressante. Les voix aigres-douces grignotent les tympans, les riffs tortueux serpentent entre les arpèges et les notes de piano qui grouillent entre les tombes sont autant de spectres qui viennent pincer vos petites miches que vous allez serrer bien fort! Pas rassurant tout ça! Comme quoi, le Black Metal peut encore faire peur et être original (?).

On notera aussi la présence de plusieurs guests : David Tibet (CURRENT 93) apporte sa contribution, et même Ghaal de GORGOROTH & co. vient dégobiller quelques incantations… Mais si, Ghaal, vous voyez?! Le chanteur que tout le monde trouvait Über Evil 666 Lucifer jusqu'à ce qu'il froisse les soutanes des Ned Flanders du Black Metal qui brandissaient leurs missels du parfait Antéchrist de canapé!... Passons...

"Skandinavisk Misantropi", malgré ce côté supergroupe, "Maniac et les copains" dégage un quelque chose qui risque de remuer les tripes de ceux qui prendront la peine d'y jeter une oreille attentive. Cryptique, lunaire, malsain… appelez ça comme vous voulez! Ça colle, c'est lugubre...

Cet album pue la mort, et vous fera passer quelques sympathiques soirées aux côtés du Corbeau de Mr. Poe…




Rédigé par : Cobra Commander | 16/20 | Nb de lectures : 13052