Ah SHELTER ! Tout un programme. Impossible de dissocier le groupe de son créateur, impossible de ne pas revenir sur ce personnage incroyable. Résumé pour ceux qui ne connaissent pas Ray Cappo : il fut le leader de Youth Of Today, groupe culte de toute une génération de coreux, auxquels se réfèrent encore d’innombrables combos de jeunots (l’étiquette Youth Crew, les X, les Converse et les sweats à capuches, oui oui, tout part de là). Ray Cappo donc, artiste mais aussi manager : il est le fondateur du label Revelation Records qui a découvert et promu une quantité incroyable de groupes de Hard-Core reconnus et appréciés (SOIA, WARZONE, JUDGE, BOLD, CHAIN OF STRENGTH et tellement d’autres). Lassé par l’orientation violente que prend le mouvement à la fin des 80s, Ray arrête YoT et part se ressourcer en Inde. L’icône incontestée du Straight-Edge découvre ainsi la mentalité Krishna et décrète qu’elle représente la quintessence de toutes les valeurs pronées dans le mouvement SxE : positivité, pureté, self-control et tutti quanti. Il devient moine (sic), et décide de revenir aux USA propager la bonne parole. Il monte alors SHELTER avec des potes de la scène Youth-Crew (rejoint un temps par son inséparable acolyte Mike Porcell de YoT), fonde le label Equal Vision Records et définit alors un genre ‘nouveau’ : le krishna-core. Nous sommes au milieu des années 90, ce genre sera popularisé par 108, PREMA, REFUSE TO FALL, BABY GOPAL aux USA, SEEKERS OF THE TRUTH en France, ABHINANDA en Suède. La plupart de ces groupes a disparu depuis, cette mode s’est vite estompée, mais SHELTER subsiste, indéboulonnable (Ray participe aussi à d’autres projets, notamment BETTER THAN A THOUSAND, moins pop que SHELTER).

Revenons à donc nos moutons: le style du groupe tranche clairement avec le Punk-HC de YoT. Ray et Porcell ont vieilli, se sont assagi et ont visiblement élargi leurs horizons musicaux. Les 2 premiers albums du groupe se situent dans la veine pop-rock, avec quelques relents post-hardcore à la Civ/Quicksand (les projets d’autres monuments de la scène HC, mais ceci est une autre histoire). Qu’en est-il alors de cet Eternal, qui sort étonnament chez Goodlife, le fameux label historique belge, autrefois abri (huhuhu) des plus furieux combos du H8000 (CONGRESS, BLINDFOLD, LIAR) ?

Pas de surprise ni de révolution, l’album est dans la lignée de The Purpose, The Passion: Ray chante de sa voix nasillarde, les lignes de grattes semblent toujours autant piquées à BAD RELIGION, l’ensemble fleure bon la naïveté et la gentillesse. A ma grande surprise, certains titres sont plutôt entrainants ! Le meilleur est selon moi ‘Return To Eden’, très catchy et mélodique sans être (trop) sirupeux, les lignes de gratte font ainsi penser à LIFETIME/KID DYNAMITE. ‘Meant to Be’ est très pêchu et ‘californien’ (les fans de NO USE FOR A NAME apprécieront surement), ‘Built To Resist’ m’a carrément fait penser à DOG EAT DOG/ALL BORO KINGS avec son coté ‘hiphop’ et ses singalongs, apportant donc une variété bienvenue et enfin ‘Back To Vrindavan’ m’a lui rappelé avec nostalgie URBAN DANCE SQUAD, un de mes groupes cultes ! Les titres restants sont par contre anecdotiques, voire carrément insupportables : essayez d’écouter 3 fois de suite ‘Eternal’, pour voir…

Les paroles tournent toutes autour des valeurs krishna, je ne vais donc pas m’attarder dessus, tout ce qui touche de près ou de loin à une religion ou une secte me hérissant le poil (pour rester poli). On ressent simplement que Ray Cappo est une crème, avec une expérience de la vie incomparable, et que l’interviewer doit être un plaisir incroyable.

Vous l’aurez compris, je n’ai jamais été fan de ce groupe, encore moins du style, mais cet album m’a donc plus convaincu que les précédents : 4 titres sur 11 que j’arrive à écouter plusieurs fois, c’était assez inespéré, je dois vous l’avouer. A conseiller aux fans inconditionnels de Ray, à ceux qui aiment la pop et qui ne seront pas saoulés par le message. Le groupe garde encore une certaine pêche sur scène, malgré les 40 piges passées des membres : assister à un concert de Ray Cappo reste un moment incontournable quand on a apprécié un jour YoT, un groupe Revelation ou Equal Vision. Sans vouloir faire de sarcasmes, on peut se dire qu’on ne les reverra pas dans une autre vie, alors profitez-en !



Rédigé par : Candira-Thon | 10/20 | Nb de lectures : 13293