"Saw" vous connaissez les films ? Bon OK... Ben là, ça n'a rien à voir.
Je dis que cela n'a rien à voir car si vous vous attendez à un groupe metalo-néo-core-mainstream comme ceux qui pullulent sur les B.O des films d'horreur ricains, vous allez être déçus.
Mais si vous n'êtes pas amateur de ce type de musique et que vous aimez les bons groupes de metal qui savent jouer et qui cherchent à trouver leur voie alors qu'il sont déjà au volant d'un beau véhicule, alors vous êtes au bon bistrot.
Je vous le dis direct, j'ai été très enthousiasmé par ce skeud.
"Entre Brutalité et émotion" sont les termes que choisit le groupe pour définir sa musique. Eh ben pour une fois, je peux vous dire que c'est cohérent à l'ensemble et que les mots collent aux maux que nous inflige le groupe... et en plus ils sont bien de chez nous !
Pour faire un rapide petit historique le groupe a été créé en 2005 et a sorti en 2007 sa première démo "The sough Place" suivie de près en 2008 par un premier E.P "Paranoia" (dommage pour le prochain album, "Schizophrenia" c'est déjà pris).
Les revoilà donc avec "Bipolarity", nouvelle galette et donc premier album des Saw.
Visiblement intéressé par la psychologie et les maladies mentales (bipolaire, paranoïa) le groupe crée des atmosphères assez sombres, illuminées parfois par des mélodies mélancoliques, un peu comme un aliéné qui recouvrerait quelques îlots de conscience au milieu d'un océan de folie.
Même si musicalement ils n'ont pas grand-chose en commun, le groupe me fait un peu penser à Gojira. La première fois que je les ai écoutés, j'ai découvert un groupe qui meulait grave mais qui créait des ambiances singulières et qui essayaient de déjouer les codes habituellement employés chez les poilus. De plus, le groupe présentait un produit vraiment professionnel dans son ensemble et semblait vouloir mettre toutes les chances de son côté. Saw semble appartenir à la même école et sans chercher à copier les Goj', ils semblent s'abreuver à la même fontaine.
Musicalement, les petits gars sont plutôt musclés et envoient fermenter la gnôle bien au-delà des degrés autorisées. Très techniques, on pense à Meshuggah à plusieurs moments sans que les Saws ne s'enferment dans le trip technique dans lequel trop d'amateurs du groupe ont tendance à se laisser piéger. Le premier titre, "Beneath the memories", commence avec des "crums crums" typés Uméa à la guitare, puis évolue en incluant de la mélodie dans les riffs et le chant. On arrive au final à un titre très efficace et qui se retient très bien, sans pour autant que le groupe ait cherché la facilité.
Dès le deuxième morceau, "Perturbed", on est sûr d'une chose : les riffs sont une priorité et à ce titre, le groupe a apporté un soin particulier dans la composition de ces derniers. Ce n'est dès lors plus la fête, mais carrément le festival. Le groupe ne rechigne pas par moments au brutal impact d'un riff simple et dynamique et quand on voit le résultat, on se dit qu'ils ont raison.
Comme pour se détacher un peu de cette technique polyrytmique, le groupe s'envole joyeusement à plusieurs moments vers les contrées les plus sauvages de la musique en réglant la vitesse sur Mach 3... avec quelques arrêts sur les contrées du nord de l'Europe, histoire de ramener des souvenirs (des courts passages sur "Colors and shapes" et "Beware of the sunlight" ont un petit goût de Black).
Le groupe fait pas genre "J'aime le death" pour faire stylé, car lorsqu'ils s'y essayent, ils le font avec respect et avec toute la fougue qu'il faut pour pouvoir se le permettre (l'intro de "Imperfected World" est assez velue).
Les touches "extrêmes" restent quand même assez ténues et on reste les trois quarts du temps dans un registre mid tempo qui n'en reste pas moins énergique et entraînant. Mais les Saws ne se limitent pas à du simple collage musical. Ils vont aller plus loin et nous emmènent sans difficulté avec eux. Et si vous avez du mal à en être convaincu, allez directement écouter "Set our Hollow White". C'est un morceau à l'intro quasi jazz/samba qui dégénère petit à petit pour finir en monument d'énergie virant au noise. J'ai pu d'ailleurs penser à quelques moments, et au vu de la couleur de certains accords, à du Hardcore chaotique... mais le groupe aime trop le métronome pour se laisser aller trop longtemps dans cet univers-là (mais c'est clair qu'un brin de désordre dans cette armature si bien conçue c'est vraiment d'un très bon goût et cela évite l'overdose de Croum croum).
Si vous aimez ne serait-ce qu'un seul de ces dix titres, vous pouvez vous jeter les yeux fermés sur les autres car cela ne fléchit à aucun moment. Bref Saw déchire, berce, agresse, envoute, défonce, caresse et arrache... et bien souvent en une seule chanson. J'espère que la chaîne sera longue et que le chaînon manquant n'a pas encore été découvert. En avant Saw !


Rédigé par : pamalach | 16.5/20 | Nb de lectures : 12973