Les groupes dits à chanteuse ont indéniablement la cote en ce moment ; 'phénomène' qui, je pense, n'est pas près de se tarir car à mes oreilles cela offre un plus large choix de timbres de voix et par conséquent d'autres perspectives musicales. Comme dans tous les styles et de la même manière que lorsqu'un homme est au micro, il y a et il y aura des groupes 'à chanteuse' plutôt opportunistes, surfant sur la vague et ne proposant rien de bien intéressant et transcendant. Au final tout cela se juge avec subjectivité et chacun aura ses affinités.

Personnellement, la formation originaire d'Atlanta qu'est Royal Thunder est de celles que je suis de très près, le visuel coloré ornant leur nouvel album m'ayant en plus immédiatement tapé dans l’œil. Faisant suite à un excellent quoique un peu long « CVI » (2012), « Crooked Doors » est de ces albums pour lesquels utiliser des étiquettes musicales est délicat. Hard rock ? Oui, les influences des 70's sont là. Grunge ? Pourquoi pas. Le stoner dit progressif, façon Mastodon et Baroness ? Du psychédélisme ? Ou tout simplement un rock enchanteur ?

Il y a de tout cela à la fois, le quatuor emmené par la géniale Mlny Parsonz (sorte de Johnette Napolitano avec davantage de coffre) ne va pas dans une seule direction et prend plaisir à varier les plaisirs les approches de ses titres. « Crooked Doors » possède certes une composition de plus que son prédécesseur, il dure cependant moins longtemps ; les morceaux s'étirent donc moins et gagnent à quelques (rares) reprises en efficacité (« Wake Up »).
La force de Royal Thunder c'est aussi de proposer une ouverture d'album remarquable ; après un « Parsonz Curse » aux développement palpitants, « Time Machine » s'avère d'une justesse émotionnelle incroyable et s'impose dans les esprits dès les premières mesures. Il faut dire que Mlny semble avoir davantage développé sa palette vocale, exprimant une hargne certaine et une mélancolie contrôlée, non moins bouleversante. Je ne peux omettre par ailleurs le travail abattu par les 3 autres musiciens, délivrant un final plus électrique qui vous scotche pour de bon. Le groupe a peut être donné le meilleur d'entrée mais la suite ne se balaie pas d'un revers de main : le plus feutré et envoûtant « Forget You », les phases hypnotiques d'un « Ear on the Fool » qui ne paye pas de mine au début et se révèle progressivement (le jeu de batterie tient un rôle important) ou des plans mélodiques presque en retenue, transpirant de sensibilité (« Forgive Me, Karma »), la musique de Royal Thunder s'aborde avec un minimum de concentration, l'expérience n'en devenant que meilleure.

Mlny passe un peu par tous les états, plaçant ci et là quelques cris et notes vibrantes, des lignes mélodiques puissantes, à l'instar du final en 2 temps « The Bear » relevé par la présence d'instruments à cordes (dont un piano). « Crooked Doors » reste cependant un album assez simple, les couches de guitares ne sont pas en nombre, le chant n'est pas multiplié, la section rythmique sonne chaleureuse, berçant avec poigne nos tympans et donnant de temps à autre avec plus grande signification le mouvement à suivre. De ce rock pouvant parfois sonner accessible (« Floor » qui fait taper du pied à plusieurs reprises et contient un superbe solo) ou au contraire dévoilant des phases plus complexes et envoûtantes (« The Line », « One Day »), découle de nombreuses émotions auxquelles l'auditeur s'identifiera. Royal Thunder, en grande partie via la prestation de Mlny Parsonz, affiche une belle progression dans son processus créatif, sans altérer son identité musicale, au contraire même en ayant fait le nécessaire pour l'améliorer. Ne reste plus qu'au groupe à défendre chaudement ses albums sur les scènes européennes dans les prochains mois pour gagner en terme d'exposition et avoir la reconnaissance qu'il mérite.




Rédigé par : gardian666 | 16,5/20 | Nb de lectures : 8716