RIGER - Des Blutes Stimme (CCP Records/Adipocere) - 07/02/2003 @ 09h36
En définitive le tournant de carrière de Riger se situe peut-être à la seconde même où ils ont limogé leur coquinnet claviériste Roberto Liebig, parti depuis enchanter les 3-6 ans avec son projet solo Dorn qui a tout de même son utilité sur l’échelle de la pédagogie musicale, puisqu’il se charge d’opérer une jonction opportune entre le sautillant générique des Teletubbies et les effluves festives déjà plus récalcitrantes d’un Sum 41 ou de tout autre dispensaire de cool-attitude sévissant à l’aube de la puberté. Débarrassés d’un boulet rare donc, Riger ont troqué leur étiquette de groupe de black/death symphonique standard et plutôt insipide pour celle de groupe de black/death standard et plutôt insipide, cherchez la différence… Elle paraît minime sur le papier, mais s’avère de taille une fois le CD inséré dans le lecteur : Riger ne sonnent plus comme une version metal constipée des Beach Boys. Exit les petites ritournelles printanières et autres entrechats carnavalesques signées du playboy suprême du synthétiseur teuton : place aux burnes, place à la sueur, place au metal ! Riger se retranchent derrière des trombes de riffs succincts et saccadés qui forment un conglomérat rugissant et aussi infranchissable qu’une muraille de béton. Souvent le laxisme outrancier de leur jeu est trahi par l’aspect franchement persistant de ces rangs serrés qui avancent sur plusieurs dizaines de secondes, accélérations et breaks compris, sans que le guitariste prenne conscience qu’il existe plus d’une corde à sa guitare. D’un côté l’effet de bloc et de télescopage inéluctable à l’avantage du groupe s’en trouve consolidé, et on ne peut s’empêcher de penser à Sepultura, qui affectionnaient particulièrement cette façon d’assujettir un auditoire par ce type d’oppression cadencée et monocorde. Au bout du troisième passage cependant, la seule chose que Riger continuent à enfoncer, ce sont les nerfs, et ce non pas avec pour conséquence de me rendre fou à lier, mais plutôt de téléguider machinalement mon index vers la touche « avance rapide ». C’est vrai, les compositions sont puissantes et injectent de par leur élan rythmique des pulsions fulgurantes qui pénètrent directement la moëlle de la colonne vertébrale, occasionnant sans coup férir ce singulier réflexe physiologique que nous autres avons coutume de nommer « headbanging ». Mais lorsqu’on les dénude de cet habile apparat tactico-sonore, il ne reste plus grand chose à mettre dans la balance pour plaider en faveur du groupe. Outre quelques leads aux crocs vite émoussés, les morceaux ne proposent aucune alternative à leur scénario horizontal, consommé dès la première lecture, ceci bien que quelques titres comme « Im Graun der Nächte » ou « Irminsul » claquent vraiment bien et envoient des mélodies viables. Riger n’est pas de ces groupes où l’implication presque charnelle derrière le créatif se ressent, on suppute même qu’il n’y en a pas, et c’est en visiteur anonyme qu’on survole leur album sans avoir envie d’y laisser un résidu de notre passage. La demi-douzaine d’essais à la guitare folk ne vont certainement pas faire de l’ombre aux cadors du genre comme Ulver, même s’ils possèdent un son assez original et attachant. Le chant caverneux laisse enfin une impression beaucoup trop forcée et sans passion. On s’imagine très clairement le grogneur recroquevillé sur son micro, la bouche arrondie en un parfait « O » simiesque à la George W. Bush, essayant à grand renfort de contractions musculaires de faire remonter son jägerschnitzel-frites. Désolé mais ça ne passe pas, pas avec un black metal qui se veut quand même un tantinet épique et varié dans ses événements. A la rigueur, Riger, misant sur leur rigueur, peuvent compter sur l’effet d’accroche et d’urgence de leur musique. En effet, mis en concurrence superficielle au stand d’écoute d’un Virgin, « Des Blutes Stimme » a toutes les chances d’appâter deux fois plus de gogos qu’un album de Madder Mortem, voire d’Opeth – c’est bien là la calamité mais comment nier que ça se passe comme ça chez Mac Metal ? Fort heureusement le lecteur de VS n’est pas un empaffé du conduit tympan-cerveau, et saura faire la part des choses avec discernement. Mais ne jetons pas la pierre à Riger pour autant, ils sortent en effet tout juste d’une sale période de trouble, car disons-nous bien que jouer aux côtés de Roberto Liebig des années durant n’est assurément pas le genre de traumatisme dont on se remet du jour au lendemain… Autorisons-nous l’espoir de les voir prendre le taureau par les cornes dès leur prochain album, et de nous proposer quelque chose d’entier et de personnel qui fasse honneur à leurs facultés intrinsèques.


Rédigé par : Uriel | 11/20 | Nb de lectures : 7099




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