L’évolution, c’est mal ! Puisqu’on va parler d’un disque très Black Métôl, autant aller jusqu’au bout en inversant les codes. L’évolution, disais-je, est indispensable à un groupe pour progresser et espérer pouvoir percer. « Ah ouais, bidule c’est pas mal, mais ça sera encore mieux lorsqu’ils auront évolué dans leur son », entend-on souvent. Mais dans quelques cas de figure, ne vaudrait-il pas mieux stagner un peu pour conserver son efficacité ? La question est posée pour le trio suédois REV 16:8. Après un premier album en 2009 (Grand Tidal Rave) qui s’était avéré être très bon et frontal comme il faut, bien que pas foncièrement original dans un Black brutal à la DARK FUNERAL / MARDUK, avec quelques moments de grâce ("Crowning the Nameless Heir" notamment), le groupe a donc été tenté d’évoluer. Avec, hélas, plus ou moins de réussite…

Pourtant, Ashlands démarre fort avec le très véloce et rentre-dedans morceau d’ouverture qu’est "Agenda" (oui, les Black-métalleux ont aussi le droit d’être à jour dans leur rendez-vous), suivi par le morceau-titre qui démarre à fond la caisse avant d’embrayer sur une partie centrale plus lente et sombre aux arpèges pouvant rappeler le Black orthodoxe issu du Necromorbous (surtout que Ashlands a été enregistré dans ce célèbre studio précisément) ou encore certains groupes germaniques comme ASCENSION (dont je ne dirai jamais assez de bien). "Blackline Sundown" suit et décape comme il faut avec des parties ultra-rapides. Pourtant, la tension amenée par ce début d’album en trombe redescend avec l’interlude noisy occulte inutile qu’est "A Study of Patterns and Habits", mais on est immédiatement rassuré par "The Chase" assez surprenant avec des riffs quasi Black’n’Roll très accrocheurs et propices au headbang. Cette première partie d’album permet aussi de mettre en valeur les influences de REV 16:8, le MARDUK récent en tête (notamment dans le chant prenant une tournure plus glauque), mais également un soupçon de MAYHEM dans certains accès de guitares bien tranchantes, et dans le chant halluciné aussi. Les influs plus « occultes » prennent place dans la seconde partie de l’album, mais pas forcément de la meilleure des manières…

"Serenade" est un titre très frontal, mais assez convenu (ça blaste un peu dans le vide comparé aux autres plages de l’album), et les riffs volontairement répétitifs font que ce morceau se traîne très vite en longueur. "Rust Retinal Vein" lorgne clairement vers les morceaux plus « lents » des deux derniers MARDUK, avec une partie de chant centrale à la Attila Csihar. Mais on n’atteint pas vraiment la qualité de ce qu’a pu faire la bande à Morgan et Mortuus (bien que je n’ai jamais adhéré au côté plus « malsain » de Rom 5:12), et cette tentative d’amener une ambiance glauquissime tombe un peu à l’eau. Le propos est le même sur "Coal Mirror" qui s’avère être un morceau assez ennuyeux. Et alors que REV 16:8 aurait pu se relever en terminant l’album en trombe histoire d’équilibrer le propos, il nous livre un "When Your Words Are Obsolete" aux riffs thrashisants et au chant sonnant un peu trop DIMMU BORGIR, pour un morceau faussement brutal qui ne décolle pas. L’outro ambiante "Leave Me" clôt donc cet Ashlands en laissant un goût amer, alors qu’on pensait avoir affaire à une tuerie dès les premiers morceaux, REV 16:8 se fourvoie en seconde partie d’album en tentant de faire évoluer son propos vers un Black plus poisseux sans avoir le talent nécessaire pour faire quelque chose de véritablement malsain et vraiment prenant.

Pour moi, Ashlands est donc une petite déception, j’aurais vraiment préféré que le groupe continue dans la voie « à fond » de Grand Tidal Rave, qui avoinait à défaut de révolutionner le BM suédois, plutôt que d’évoluer vers des ambiances plus sombres qui (à mon avis) sont loin d’être réussies. Ashlands comporte quelques excellents morceaux, mais l’album est trop hétérogène dans sa globalité, se finissant en queue de poisson. Peut-être que ceux qui ont biché sur les morceaux plus rampants des deux derniers MARDUK arriveront à apprécier Ashlands dans sa globalité, ça ne sera pas mon cas, préférant de toute façon le côté plus frontal de MARDUK. Alors conclusion : l’évolution, c’est pas trve, non mais.


Rédigé par : ZeSnake | 13/20 | Nb de lectures : 12993