S'il y a bien un combo qui sait taper là où je suis sensible, c’est bien Reverence. Il faut dire qu’avec ce subtil mélange de black lancinant et d’ambient/indus typé Cold Meat Industry, ils avaient trouvé la victime idéale avec votre serviteur. "Chamber of Divine Elaboration" vous envoûtait insidieusement avec un charme froid, vous laissant comme une merde un jour de pluie. Vous savez, ces fameux jours où malgré tous vos efforts, un sale frisson humide vous parcourt indéfiniment l’échine.
C’est donc avec une impatience fébrile que la groupie tapie au fond de mon calecif guettait l’arrivée de ce nouvel album.

Au rayon des changements, Reverence réapparaît chez Osmose après une escapade chez Avantgarde et ce avec un bassiste tout neuf.
Ce qui frappe d’emblée l’auditeur par rapport à l’essai précédent, c’est le son car malgré le fait que la prod ait été une nouvelle fois confiée à Neb Xort, cette dernière s’avère fort différente. Là où le précédent vous oppressait par sa froideur compacte et homogène, eInactive Theocracye s’ouvre, s’aère. Chaque instrument trouve son espace pour mieux respirer et se permettre quelques envolées solitaires. Malgré la glace, il y a une irrésistible impression solaire. Un sentiment lumineux vous envahit tout au long de l’album.

De la même manière, un travail conséquent a été fourni sur les vocaux. Si le chant clair si particulier à la fois désenchanté et hypnotique et qui ne manque pas de rappeler Layne Staley, était déjà présent sur le précédent, il se voit sublimer sur ce dernier. Les lignes vocales sont à la fois plus diversifiées et réellement mises en valeur par la production.

Si "Chamber of Divine Elaboration" m’avait séduit par son aspect monolithique, son successeur se dévoile plus varié au niveau rythmique allant sur le terrain d’une violence certaine mise en exergue par de brutales accélérations chaotiques. On trouve même çà et là quelques motifs death notamment lorsque la batterie déroule un tapis de double. A la martialité du précédent, celui-ci met en avant des touches plus progressives allant jusqu’à quelques légers passages jazzy dans la rythmique. Malgré ces changements, on retrouve quand même la patte unique du groupe via les mélodies dissonantes et déliquescentes qui s’apparentent à de véritables descentes de trip.

Une galette bien difficile à décrire tant elle se pare de visages différents. "Breath" qui est en quelque sorte le cri d’amour du groupe pour le genre horrifique s’installe avec une nappe inspirée par la bande son du jeu Silent Hill pour ensuite alterner des dissonances, des chœurs fantomatiques, du blast et une envolée de basse qui ne manquera pas de nous rappeler aux bons souvenirs des Goblin.

Prenez le titre où apparaît Hreidmarr, ce dernier est construit de ce climax de pure violence. En effet, le morceau amorce son cheminement avec une teinte spatiale et ambient avant l’explosion de haine aboyée par Hreidmarr qui livre une prestation impitoyable. Enfin, le titre peut achever sa route dans la paix d’un passage atmosphérique.
Dans un autre genre, "Hypothetical Paths of Silence" se lance dans une intro géniale et mélodique aux saveurs orientales avant de faire tutoyer des éléments bluesy qui fleurent le bayou et la brutalité hérité d’un DSO.

Difficile de ne pas évoquer le bien nommé "The Last Chapter", qui mélange chœurs tragiques, cuivres, passages barrés, accélérations chaotiques et passages indus.
Un petit mot de la participation de DK Deviant sur le morceau le plus noir de l’album : "The Axis of Horror". Le leader d’Arkhon Infaustus propose une prestation à la fois sombre et solennelle. Cela est souligné par l’usage de chants grégoriens et par une orientation très death de ce titre.

Du fait même de sa versatilité, ce périple vers le néant demande de nombreuses écoutes afin de débusquer toutes les nuances cachées. Un album exigeant qui demandera un effort à l’auditeur pour pénétrer ses méandres. On lutte, on souffre, on pleure, on s’abandonne et on finit subjugué par le charme vénéneux de ce voyage vers le silence. Moins immédiatement accrocheur que son prédécesseur, "Inactive Theocracy" sous ses atours à la fois organiques et glaciales s’insinue en nous plus lentement mais aussi plus profondément.

Si je voulais vraiment faire mon casse-burne de service, je pointerais quelques redondances dans certaines harmonies vocales ou certains riffs. Mais il reste que ce skeud est strictement à un objet à part composé par un combo complètement unique. Cette œuvre est définitivement originale avec un univers qui n’appartient qu’à elle-même. A la fois théâtral, rampant, violent et atmosphérique, cet album vous fera plus sûrement perdre vos repères qu’une cuite du nouvel an.

Reverence vient avec classe mettre sa touche singulière à une année faste pour le metal français.
2009 Frankreich über alles!!!


Rédigé par : Dark Rabbit | 17/20 | Nb de lectures : 13869