REDEMPTION - Snowfall On Judgment Day (InsideOut/EMI) - 11/11/2009 @ 09h35
Au moment de découvrir le nouveau Redemption et ayant en mémoire les précédents je me pose la question suivante : « Que penser de la nature intrinsèquement valétudinaire de la doxa ambiante ? ».

Autrement dit, « Dream Theater a-t-il tué le métal progressif? ».

Cette question qui semble provocatrice ne l’est pas tant que ça. Mon addiction au genre évoqué date d’une quinzaine d’années. Ayant suivi de près son évolution et ces multiples déclinaisons, je suis amené à faire un petit bilan de l’affaire. Et bien entendu, D.T ne peut être écarté de ces réflexions. Il en est même le cœur.

Depuis son avènement, le « petit géant du New Jersey»* a tout raflé sur son passage. Tel Attila sur les plaines de l’Europe, son métal progressif symphonique a tout dévasté. Il a emporté, conquis et soumis à peu près la totalité du milieu. Public averti, médias spécialisés, labels, tous ont fini par succomber sous la vague « meurtrière ». Chose encore impensable à la sortie d’"Image & Words" - qui a donné le coup d’envoi de la chevauchée fantastique - le groupe a atteint un sommet auquel peu de formations de métal progressif peuvent prétendre de parvenir un jour.

Constat navrant, les groupes désirant s’affranchir de l’empreinte imposée par les New-Yorkais ont énormément de mal à suivre ce rythme effréné. Posez la question à Symphony X, Vanden Plas, Pain of Salvation, Shadow Gallery. D’accord, ces 4-là ne sont pas vraiment des francs-tireurs. N’empêche, demandez-leur ainsi qu’à leurs consorts (Wolverine – Andromeda par exemple) s’ils n’en ont pas ras le saladier de se voir toujours et encore comparés, appréciés, pesés à l’aune de D.T et de son insolent succès.

Que leur reste-t-il ? Rien ou pas grand-chose. Et le choix est on ne peut plus cornélien.
Suivre le Maître et espérer en tirer quelques miettes ou se démarquer - parfois exagérément - pour finalement n’attirer que la portion congrue du public encore réceptif à cette autre branche du métal.

Et si une poignée d’idéalistes parviennent à se faire un petit nom dans l’ombre de D.T, la portée de leur aura ne dépasse pas le simple succès d’estime. Quant à ceux qui accèdent au statut de groupe « culte » en raison de leur propos décalé, on sait où mène un tel statut ; les chiffres de ventes sont là pour calmer les plus optimistes.

C’est pourquoi depuis 3 albums déjà, pour coller à la charte, Redemption a choisi de mettre ses pataugas dans ceux de ses illustres compatriotes. Et comment lui en vouloir ? Difficile d’aller contre celui qui fait la pluie et le beau temps.

Bien sûr, quelques exégètes ergoteurs vous diront qu’à bien y regarder, le groupe californien se démarque très largement de la bande à Portnoy. Que son métal prog offre un visage moins conventionnel et calibré, que ceci, que cela…

On leur accordera bien volontiers qu’à hauteur de 25 % environ (la mode est au pourcentage), leur appréciation est vérifiable. Pour autant, les 75 restants sont à l’évidence coulés dans le moule de leurs compères de l’East Coast. Et c’est finalement ça que l’histoire retiendra.

Le 4ème album se situe donc dans le sillage des précédents. N’allez pas en déduire pour autant que "Snowfall On Judgement Day" est un mauvais album. Si l’on s’en tient aux canons traditionnels, il n’a pas à rougir face à la concurrence. Et si on le compare au dernier opus des Maîtres en la matière, on peut même affirmer qu’il tient admirablement la route. Mieux, par bien des aspects il est capable de lui tailler des croupières.

Seulement, il n’amène rien de bien neuf. Il ne fait que confirmer qu’en dehors de la ligne D.T, point de salut. En évitant de s’engager sur un chemin différent, Redemption n’échappe pas à la règle. Preuve de ce suivisme même inconscient, le groupe a invité Labrie à chanter sur un de leurs titres ("Another Day dies"). Cet honneur fait par le Canadien est plus ennuyeux que providentiel et il apporte bien involontairement de l’eau à mon moulin.

Un rapide étalonnage permet d’ailleurs de voir à quel point les 2 formations sont proches pour ne pas dire l’une la réplique de l’autre. Sur le plan de l’architecture générale, ils distillent tous les 2 un métal prog sympho toutefois largement dominé par les guitares pour Redemption (ici avec "Peel" 6min31 et "Leviathan Rising" 6min42) alors que chez DT le clavier est plus bavard. Celle des morceaux comprend des digressions où s’empilent des breaks furieux (les fameux epics chers à Portnoy) qui requièrent de part et d’autre une technique infaillible. Omniprésente chez D.T, elle est au rendez-vous aussi pour Redemption. (ici avec "Walls" 6min57 - "What Will You Say" 5min20 et "Black And White World" 8min03).

Différence notoire, la durée est raccourcie. Seul le titre éponyme explose les 10 minutes (11min43). Ce qui fait de "Snowfall On Judgement" un album plus direct que ces prédécesseurs. Le chant, un brin meilleur quand même avec Ray Alder de Fates Warning peut donner des points à Redemption. La bonne production confiée à Tommy Hansen (Helloween, Jorn Lande, Circus Maximus) est un autre atout.

Bref, le groupe californien offre toutes les garanties pour s’approprier le titre de meilleur challenger de la catégorie. Et après ? Jouer aussi bien que le modèle, avoir à peu de choses près une tablature identique vous rend-il intéressant pour autant? La réponse est dans la question.

Vous trouverez sans doute que j’ai peu parlé de l’album et trop du reste. J’en assume la critique. Mais la raison en est que, dans la suite logique de mon humble présentation de l’état des lieux actuel du métal progressif, il n’y a pas grand-chose de plus à en dire. Désormais, il y a Dream Theater et les autres. Point. Je le regrette mais c’est ainsi. Kroniker un énième clone de « la référence » amène inévitablement à des comparaisons. Parfois fâcheuses et assassines, elles seraient plutôt élogieuses dans le cas de Redemption mais au final ce dernier demeure un clone. Un clone talentueux mais un clone quand même. Alors, D.T a-t-il tué le métal progressif ? Pas encore, mais la question reste entière.

*: oxymore volontairement utilisé pour relativiser la place que tient D.T au sein de la famille métal.

http://www.redemptionweb.com - 226 visite(s)

Extraits sur MySpace - 164 téléchargements


Rédigé par : Karadok | 14/20 | Nb de lectures : 11101




Auteur
Commentaire
Mos
IP:217.128.14.167
Invité
Posté le: 11/11/2009 à 12h51 - (77297)
Une différence majeure, cependant, entre les deux groupes: l'émotion, chose dont les derniers albums de Dream Theater n'ont pas; ils sont plutôt emphatiques et froids . Or Redemption possède un incroyable chanteur, Ray Alder, qui parvient à insuffler de l'émotion dans les compos du groupe; et je pense que c'est essentiel dans le prog.

Youpimatin
Membre enregistré
Posté le: 11/11/2009 à 14h20 - (77304)
Je connaissais pas et j'ai été conquis par cet album avec un vrai bon chanteur de prog et pas une diva qui chante en falsetto comme d'hab et puis ça joue (normal) mais surtout y a de la compo et pas de l'enchaînement de plans stériles comme chez DT depuis quelques années déjà



rafi
Membre enregistré
Posté le: 11/11/2009 à 20h50 - (77321)
très bonne chro. Merci

le gritche
IP:79.91.29.141
Invité
Posté le: 13/11/2009 à 14h55 - (77468)
Elle sent trop la vérité cette chro, ça m'a coupé l'envie.

borknagar
IP:193.251.46.10
Invité
Posté le: 14/11/2009 à 15h35 - (77515)
La différence est au niveau du chant : Ray Alder chante beaucoup mieux que James Labrie !!!!

vincesnake
Membre enregistré
Posté le: 05/02/2010 à 16h49 - (80568)
Quesqu' il faut pas lire des fois sur ce site!
Dream Theater a tué le metal prog?
Autant dire que Metallica a flingué le thrash ou iron maiden le heavy.
Dans tous les styles il y a toujours 1 groupe qui a plus de succes que les autres et ce n'est pas pour ça qu'ils (les autres groupes) ne sont pas reconnus ou ne font pas carriere, Symphony X, Vanden Plas,... c'est inconnus peut etre?
Et puis le prog ce n'est pas non plus que dream theater et les autres, il y a Tool par exemple qui viens de la scene fusion et alternative, Opeth du death/black ou Devin Townsend de l'industriel ... le prog n'a jamais été aussi présent dans tous les styles.

Ajouter un commentaire

Pseudo :
Enregistrement Connexion






Niveau de modération : Commentaires non modérés par l'administration du site

Ce commentaire est soumis à la lecture et à l'approbation des modérateurs. S'il ne suit pas les règles suivantes : Pas de pub, pas de lien web, pas d'annonces de concerts, il ne sera pas retenu. Plus d'infos

Proposez News | VS Story | F.A.Q. | Contact | Signaler un Bug | VS Recrute | Mentions Légales | VS-webzine.com

eXTReMe Tracker