Lorsque l’on évoque le monde « merveilleux » des branleurs de manches, le nom de Paul Gilbert ne saute pas immédiatement du chapeau. Est-ce dû à la timidité et à la discrétion du personnage ou à la perception qu’ont de lui les médias spécialisés, je n’en sais rien.

D’autant que timidité et discrétion ne sont pas les qualités premières d’un shredder. Vous me direz qu’après tout, ce n’est pas ce qu’on lui demande. Personnellement, si j’attends de sa part qu’il me fasse « grimper aux stores », c’est d’abord et avant tout pour ses qualités de musicien bien avant celles de technicien.

Il y a donc pour moi 2 catégories de guitares - héros : ceux qui usent et abusent des descentes de manches genre Malmsteen, Satriani, Vai, Petrucci, etc. et les artistes qui mettent en avant le feeling et la profondeur de leurs compositions. Et là je citerais Rothery, Holdsworth, Hackett, Howe, Zappa, Fripp, Morse, Mitchell, des noms que vous ne retrouverez pas forcément tous dans le top ten mondial des spécialistes. La différence immédiate étant que les premiers concentrent sur eux seuls l’attention alors que certains parmi les derniers cités ont été ou sont encore actuellement membres de groupes. Ce qui induit un certain effacement au profit du collectif et par là même une plus grande ouverture d’esprit.

Quoi qu’il en soit, avant d’entamer une carrière solo en 1996, Gilbert s’est fait un nom au sein des formations Racer X et Mr Big. Est-ce pour cela que son « œuvre » parait moins chargée d’égocentrisme ? Allez savoir ! Nonobstant, il a pour fait d’armes notoire d’avoir figuré au 4ème rang des guitaristes les plus rapides de tous les temps derrière Michael Angelo Batio, Chris Impellitteri et Yngwie Malmsteen. Rappelons pour l’anecdote que Steve Vai ne figurait même pas dans les 100 premiers du classement Rolling Stone de 2003. Tout ceci pour ramener les choses à leur juste mesure sachant que les jugements des technocrates diplômés « six cordes » ne se valent pas tous.

Refermons cette parenthèse uniquement destinée à l’attention des collectionneurs de prouesse en tous genres et penchons nous sur le 12ème album (tout de même !) du personnage.

A l’instar de nombre de ceux de ses acolytes (Satriani, Vai, Malmsteen), ce 12ème album est un instrumental. Normal penserez-vous car lorsque l’on met aussi ouvertement en avant l’instrument majeur du heavy et du rock, le chant en devient presque secondaire voire superfétatoire. Pourtant, et contrairement à ses habitudes, Gilbert explique dans diverses interviews que ce choix n’a pas été évident. Ce n’est qu’après sa participation à l’une des tournées du G3 « qu’il a pris conscience de la capacité à captiver l’attention des fans auditeurs ».

Gilbert déclare également que pour "Fuzz Universe" il a « particulièrement travaillé sur le son et le jeu de guitare pour atteindre un savant mélange de dextérité et de feeling lui permettant de transmettre des émotions nouvelles ». On ne demande qu’à le croire…

Mais à vous parler franchement, je me suis vite ennuyé en écoutant cet album. Question d’âge ou de goûts ayant évolué, je ne perçois plus le travail des artistes du manche de la même manière. D’où mon classement cité plus haut. Il faut pouvoir tenir le coup durant une heure et 12 titres consécutifs uniquement consacrés à célébrer la dextérité du bonhomme, si talentueux soit-il. Moi, je ne peux plus.

Ce disque s’adresse donc principalement aux hommes de l’art désirant parfaire leur technique ou aux inconditionnels de cet exercice de style qui ma foi a bien le droit d’exister. Il y a bien des « violons hero », des « bass hero », etc, etc.


Rédigé par : Karadok | 12/20 | Nb de lectures : 12902