Je pensais vraiment que ce groupe n'existait plus depuis bien longtemps tant il s'était montré discret depuis la sortie de son dernier album, le bien nommé "Silence", c'était en 1998, il y a déjà neuf ans. Quelle ne fût donc pas ma surprise de recevoir ce CD et de lire ce nom qui me sembla vraiment ressurgir d'outre-tombe. Un rapide coup d’œil à l'objet m'apprit que le groupe n'avait pas changé, qu'il était toujours aussi atypique et audacieux. Certains d'entre vous se souviennent sans doute de "La nuit", le premier album du groupe, sorti en 1994 qui était une adaptation de la bande-dessinée du même nom de Philippe Druillet. Cette fois-ci c'est au théâtre que le groupe a décidé de se frotter, en signant la bande son de "La casa de Bernarda Alba", une pièce de Federico Garcia Lorca, interprétée par la compagnie Thalia Théâtre.

Appréhender cet album sans connaître l'auteur ni avoir lu la pièce est très difficile voire impossible. On sort alors de la première écoute dubitatif avec la désagréable impression de ne rien avoir compris à ce qui vient de se passer. Il est donc préférable voire nécessaire de se renseigner un peu avant de débuter. Federico Garcia Lorca était un poète, dramaturge, peintre, pianiste et compositeur espagnol qui a vécu au début du XXème siècle. Il fut fusillé en 1936 par des rebelles anti-républicains et son oeuvre fut interdite par le régime de Franco jusqu'en 1953. "La maison de Bernarda Alba" est une des dernières pièces de l'auteur. Ecrite en 1936, elle ne fut montée et publiée pour la première fois qu'en 1945. Il s'agit d'un drame en trois actes dénonçant la société traditionaliste espagnole.

Les personnages sont uniquement des femmes, enfermées dans leur maison suite au décès de leur père ou de leur mari. La veuve Bernarda oblige ses filles à rester cloîtrées afin de respecter le veuvage et le respect dû à leur père ou à leur beau-père (car il s'agit du deuxième mari de Bernarda le premier étant décédé). Pepe El Romano est un jeune et bel homme qui n'est pas représenté dans la pièce mais qui est omniprésent. Il a pour projet de se marier avec Angustia, la fille du premier mariage, car elle a beaucoup d'argent de l'héritage de son père ; cependant c'est la plus laide et la plus vielle (39 ans). Adela, la plus jeune, s'insurge contre la rigueur des mœurs à laquelle elle doit se soumettre, elle incarne la rebellion. Elle est amoureuse de Pepe qui est aussi très attiré par elle.

C'est donc sur cette pièce dont l'univers est, il faut bien le dire, très éloigné de ceux habituellement explorés par le métal que PROTON BURST a travaillé. Il en résulte 21 titres aux noms aussi évocateurs que "Respecte le deuil de ton père", "Plutôt te voir morte", "Une fille qui désobéit est une ennemie" ou encore "Je serais sa chose". Musicalement, on est ici assez éloigné du métal. Le groupe distille une musique industrielle, froide et oppressante qui colle parfaitement à l'ambiance claustrophobique de la pièce. Au fil des titres l'ambiance varie, la musique se fait plus ou moins présente. Certains titres sont essentiellement instrumentaux comme par exemple "Une fille qui désobéit est une ennemie" qui laisse place à une rythmique puissante où la guitare occupe la place centrale. Sur d'autres, elle se résume parfois à une boucle de guitare lancinante sur laquelle des samples industriels sans rapport direct clair avec la pièce viennent se coller (percussions, code morse, sirène...) mais également des bruits de pas et de portes directement issus de la scène et bien sûr de larges extraits du texte qui illustrent le drame qui se déroule.

Au final cet album reste vraiment difficile d'accès et aura vraiment du mal à capter l'attention d'auditeurs qui ne s'intéressent pas au théâtre et qui ne feront pas l'effort de lire la pièce. Musicalement "La casa de Bernarda Alba" est plus la bande son de la pièce qu'un véritable album que l'on peut écouter sans s'intéresser au texte. Il marque toutefois le retour de PROTON BURST, qui montre un groupe plus aventureux que jamais.


Rédigé par : Sheb | 14/20 | Nb de lectures : 11510