Le Chili est connu pour ses émissions de téléréalité sous-terraines, pour ses plats à base de haricots et de viande, et pour ses musiciens du métro. Mais il ne faut pas oublier une spécialité qui se développe de plus en plus : le doom metal. Mar de Grises est le plus connu du pays, mais autour gravitent plusieurs autres groupes comme Mourners Lament, Capilla Ardiente, Poema Arcanus (chronique sur VS, excellent dernier album), et le groupe qui nous intéresse ici : Procession. Trio composé de membre des groupes précédemment cité, Procession a vu le jour en 2006, et s’est fait les crocs via une démo et un EP avant de sortir ce premier album. C’est Doomentia Records qui se charge de la version CD (spécialiste de vynils de groupe lourds et lents tels que Hooded Menace, Orthodox, Doomdogs, Claws…).
Sur l’EP "The Cult of Disease", sorti l’année dernière, le groupe pratiquait un doom très fortement inspiré par Candlemass, tellement qu’on avait parfois l’impression d’entendre des morceaux de la période Messiah Marcolin. Comme clone des Suédois, Procession se posait à merveille, et à défaut d’un doom original, les Chiliens étaient foutrement efficace. Mais entre-temps, le trio a eu le temps d’assimiler et de digérer ses influences, et a fait évoluer sa musique de manière plus personnelle.
Pas de surprise pour autant, le groupe pratique toujours un doom trad à l’européenne, prenant racine plus précisément dans les contrées nordiques de notre continent. On ne sera pas étonné de trouver dans la musique des morceaux de Candlemass, de Reverend Bizarre ou de Isole. Mais le tout est bien digéré, ce qui fait qu’hormis à de rares moments, on n’a l’impression d’entendre un clone de l’un ou l’autre groupe précité. Procession fait le tour de force de tout digérer, pour proposer un doom trad’ à la croisée des genres. Il y a un côté épique non négligeable (sur le morceau éponyme, par exemple), avec une rythmique relativement rapide, qui se dégage de certains morceaux. Mais les Chiliens savent aussi poser des ambiances dépressives sur un tempo plus lent ("The Road To The Graveyard"). Si le son est toujours grave et pesant, on arrive à distinguer la guitare de la basse, surtout quand elle évolue de son côté. La batterie fait office de marteau pilon qui enterre l’auditeur. Le chant de Felipe, quant à lui, est très classe, oscillant entre un Messiah Marcolin (ex Candlemass) et Daniel Bryntse (Isole), tout en ayant son timbre personnel.
Les morceaux assez longs, entre 7 et 11 minutes (excepté l’intro), posent une vraie ambiance morbide et désespérée. Mais le trio ne s’apitoie pas sur lui-même, et n’est pas là pour faire pleurer les minettes gothiques. Une véritable sensation de puissance se dégage de ce premier album, que ce soit à travers le chant de Felipe, ou des leads de guitares qui envoient des riffs couillus (sur "Chants of the Nameless" par exemple). Aucune mièvrerie ne vient gâcher cet excellent album. Difficile de trouver quelque chose à redire sur cette galette, tant le groupe s’est sorti les doigts du cul pour pondre un premier essai de très grande classe, respectant tous les codes du genre, s’inspirant des plus grands, et pour autant sans copier et en proposant une musique personnelle. Plus les écoutes passent, et plus l’album se révèle, dévoilant une richesse tant sur les instruments que sur le chant. Aller, soyons fou, album doom de l’année pour ma pomme ! Et pourtant, il y avait du gros gros niveau.
Procession vient indéniablement de frapper un grand coup avec ce premier album, et s’impose en nouveau jeune loup aux dents longues de la scène doom traditionnel, qui n’a jamais été aussi forte. Au groupe de confirmer sur scène (ce qu’il ne manque pas de faire, à la vue des reports), et par leur prochain album. En attendant, on se délectera de ce "Delivers of the Faith", savoureux au possible.
Doom or Be Doomed !!


Rédigé par : Kryde | 18/20 | Nb de lectures : 15462