Parfois on se demande si certains groupes ne cherchent pas le bâton pour se faire battre. Voilà une formation dont la discographie est allée crescendo en qualité et dont l’apothéose fut "The Dreams Of Men" paru en 2005. Malgré cela, Pallas a toujours été victime d’une comparaison déloyale et acharnée avec Arena, I.Q ou Pendragon. Résultat, une aura limitée et injuste qui jusqu’à aujourd’hui l’a empêché de tutoyer les cieux. Eh bien, les British ont-ils voulu se punir davantage ou pas, toujours est-il qu’ils se séparent de leur chanteur, Alan Reed. Monumentale erreur car il était l’âme, la griffe de la musique des Ecossais.

Alors certes, toutes les raisons du monde sont valables mais celles fumeuses avancées par le groupe pour une telle éviction ne convaincront personne. (Un soi-disant manque de motivation…) ; D’autant que le remplaçant, Paul Mackie, s’il assure honorablement la relève de Reed, est loin d’atteindre le charisme de son prédécesseur. Dommage car cet incident de parcours pourrait avoir un impact sur la suite de sa carrière. Car la grande qualité de la musique de Pallas (et elle en est pétrie) était entre autres constituée du formidable binôme entre une musique inspirée et une voix qui savait introduire la juste dose d’émotion.

Tentons d’oublier ce triste et fâcheux évènement pour nous concentrer sur la musique. De ce côté-ci, pas de changement mais une gradation très sensiblement positive de leur néo prog fortement teinté de riffs lourds qui le rapproche du meilleur Arena.

Le titre d’ouverture, "Falling Down", atteste de ce virage pris à partir de "The Cross & The Crucible", excellent album de 2001, et concrétisé sur "The Dreams of Men" en 2005. Un néo prog couillu donc et qui fait la part belle aux riffs et soli de guitare de Niall Mathewson, peut-être le gratteux de cette scène – aux côtés de John Michell d’Arena ou de Nick Barrett de Pendragon- ayant le plus de feeling dans son jeu.

Impression accrue avec le bien nommé "Crash & Burn" qui appuie là où ça fait mal avec une rage jamais atteinte auparavant. Titre débordant de puissance et enlevé pour le rendre extrèmement jouissif.

Mais Pallas est aussi capable de ménager la chèvre et le chou. "Something in The Deep", tout en douceur (nappes de claviers, chant éthéré et bruits en tous genres) arrive à point pour nous permettre de digérer l’avalanche qui a précédé. Les 130 secondes qui concluent ce troisième titre à la manière d’une B.O de film, donnent le frisson et annoncent à grands renforts de cors (synthétiques certes…) que la suite n’a pas fini de vous bousculer.

Cette respiration introduit en fait un titre sombre - "Monster" - au faux rythme lent dont le thème étrange et lourd défile sur un crescendo qui conduit à un solo de guitare typique du néo prog mais très envoûtant et conclu par des chœurs vaporeux dans la pure tradition « pallasienne ».


Le groupe a particulièrement travaillé ses sons de claviers. Illustration de cet effort, l’intro de "The Alien Messiah". Ce titre heavy en diable mêle voix chuchotées et chœurs caractéristiques de la patte des Ecossais. L’effet est saisissant.

La partie 1 du diptyque "XXV" sonne la charge à la façon – une nouvelle fois – d’une B.O de film épique. Et Paul Makie semble décidément très bon dans la narration à défaut de me convaincre tout à fait sur le registre du chant stricto sensu. Mais, avouons-le, il est sans défaut sur ce titre et je ne désespère pas de changer d’avis sur l’ensemble de sa prestation. Alternant vagues emphatiques à la manière d’un Arena ("The Visitor" ou "Immortal" ?) ou plages apaisées, il emporte immédiatement l’adhésion. Décidément, à ce stade de l’écoute (à peu près la moitié), "XXV" se révèle un très grand album de néo prog et peut-être le meilleur de la discographie de Pallas.

D’ailleurs le reste est à l’avenant et tous les éléments du style maison sont poussés à leur paroxysme : sons de claviers grandioses, breaks savamment introduits, alternant puissance et subtilité dans leur conception, chœurs (j’y reviens) majestueux, tout, absolument tout est au diapason. Le solo de gratte qui habille "XXV part 1" et les riffs introduisant une ambiance à l’aura mystérieuse sont tout simplement sublimes.

Pas un titre n’est à la ramasse. Tous s’enchaînent sans faiblesse ni incongruité. Le tableau composé des 2 titres éponymes est spécialement une grande réussite et synthétise tout le savoir faire du groupe. Bref, du travail d’orfèvre.

Synthèse : voilà le mot qui caractérise le mieux ce nouvel album d’une heure environ. Souhaitons-lui donc de s’inscrire dans la durée. Cet opus qui a toutes les allures du chef-d’œuvre peut lui permettre de viser enfin très haut et de truster, pourquoi pas en l’absence temporaire ( ?) d’Arena, la place de leader aux côtés de Pendragon qui avec son dernier album, "Passion", a, lui aussi, hissé le néo prog à des hauteurs qu’on ne l’espérait jamais voir atteindre un jour. C’est fait et avec maestria !


Rédigé par : Karadok | 20/20 | Nb de lectures : 12958