Qu’attendre d’un groupe de la qualité d’ORIGIN ?
Qu’espérer après un tel moment d’exception comme 'Antithesis' ?

L’attente et l’espoir sont légitimes. La tentation est grande de penser qu’ORIGIN va, veut, peut, ou vient de nous sortir un nouvel album parfait.
Et à ce jeu de comparaison, autant être honnête, 'Entity' est vraiment inférieur à son grand frère.

Mais recadrons le contexte, afin d’éviter tout malentendu sur la phrase précédente.
On ne « juge » pas ORIGIN comme on jugerait n’importe quel autre groupe de Brutal Death. L’échelle d’appréciation d’un nouvel album d’Origin est inévitablement différente. Et inclut un postulat de base, qui affirme qu’un album d’Origin est, a minima, très bon. Ce qui est bien entendu le cas ici.
Une fois cet état de fait établi, vient l’heure de la confrontation entre les attentes, et la réalité. Après un album exceptionnel, comment réussir à atteindre le même niveau ? Et je ne parle pas de faire encore mieux...
A l’image de NILE après son 'In Their Darkened Shrines', on imagine combien il est difficile de concevoir qu’un groupe puisse nous offrir deux chefs-d’œuvre à la suite.

Et Origin ne déroge pas à la règle : l’exceptionnelle qualité de 'Antithesis' nous influence dans notre perception de cette nouvelle ogive, sans que l’on puisse s’en défaire. Et si 'Entity' est un album réussi, il est tout de même, je le disais, inférieur. Pourquoi, inférieur ?
Car moins intense. Moins compact. Moins homogène. Plus aéré.
Un blasphème, presque.

Outre la qualité musicale et technique, ce que j’apprécie avec 'Antithesis', est cette sensation d’être emporté dans un espace temporel parallèle durant toute l’écoute de l’album, dont l’intensité ne faiblit à aucun moment. Et, principal écueil de 'Entity' : ce n’est plus le cas...
La faute notamment à 'The Descent', interlude que je trouve fortement dispensable, et qui casse la dynamique entamée. La faute, peut-être aussi, à 'Banishing Illusion', qui sans être réellement mauvais, s’avère vraiment faible comparé au reste de l’album. Pas grand-chose, mais suffisant pour casser une dynamique d’écoute.

L’autre principale différence se situe au niveau de l’évolution de l’ossature. Légère, mais réelle. Origin a tenté de faire évoluer la forme, tout en préservant son intensité. Cela se manifeste par une durée d’album plus courte (36 minutes), par des cassures rythmiques plus marquées, par des riffs moins déjantés (plus compréhensibles), et par 3 morceaux très courts (moins de 2 minutes), qui apportent une salve de folie appréciable.
Même si 'Committed' ne me convainc absolument pas, ce ne sont pas 1 minute et 56 secondes qui vont me gâcher le plaisir de l’écoute. Sans compter que les deux titres imparables et excellentissimes de l’opus, 'Saliga' et 'Consequence of Solution', n’auraient absolument pas dénotés sur le précédent album, tant la virtuosité technique et la créativité musicale semblent irréprochables.

Je ne peux faire abstraction du changement de chanteur, intervenue entre-temps. Car l’irremplaçable James Lee est parti hurler sous d’autres cieux (chez les excellents Face Of Oblivion). Changement majeur d’un point de vue groupe, mais relativement mineur au final, tant le duo composé de Paul Ryan et Mike Flores se fond à merveille dans l’univers Origin. Si le débit vocal frénétique de Lee fait défaut, les deux taulards se partagent cris écorchés et beuglements graves avec une vraie réussite.

En parlant de Paul et Mike, on ne peut de nouveau que se réjouir de voir ces deux virtuoses à leur meilleur niveau. Le premier exprimant tout son talent au travers de riffs, soli ou sweeping incroyablement efficaces, bien que moins mémorables qu’auparavant ; le second insufflant un groove incroyable avec sa basse toujours aussi addictive et virevoltante. Sans parler de John Longstreth, dont l’exceptionnelle précision mêlée à la vitesse d’exécution apporte toute cette intensité recherchée.
Le tout agrémenté d'une production puissante, claire, massive, équilibrée.

Malgré tout cela, oui, 'Entity' est une relative déception.
Ce constat m’arrache le cœur, tant j’apprécie ce groupe. Mais l’objectivité est de mise. Origin donne l’impression de s’être reposé sur ses acquis, oubliant peut-être d’insuffler une once d’âme, ou d’atmosphère.
Ne vous méprenez pas, 'Entity' est un très bon album. Captivant, intense, rapide, personnel et terriblement violent. Où l’expulsion sonore se meut en tornade irrésistible, tout en préservant la marque de fabrique et l’extrémisme musical du groupe. Mais, les connaisseurs ou amateurs ne manqueront pas de remarquer qu''Entity' laisse un goût amer d’inachevé en bouche, un peu comme si le groupe s’était précipité pour sortir son album.

Même si, fondamentalement, le principal défaut de cet album est de succéder à 'Antithesis', tout simplement...


Rédigé par : ..::Ju::.. | 15/20 | Nb de lectures : 14721