Ca serait cool d'avoir des super-pouvoirs. Si je pouvais en choisir un (en dehors des super-chroniques que j'ai déjà), ce serait de pouvoir contrôler le temps. Mais j'ai beau m'entraîner et pousser bien fort derrière les yeux, pour l'instant ça ne vient pas. Ca me rappelle un peu mes échecs dans le contrôle de la Force quand j'étais gamin, fort heureusement pour le chien qui a échappé à maintes tentatives de strangulations à distance. Peut-être grâce à mon entraînement intensif, j'ai déjà un petit pouvoir de prémonition. Et quand Greg m'a proposé Old Silver Key (parce que Rabbit était parti chasser le death old school sur les terres de Zozo), j'ai pressenti que ça n'allait pas me plaire...

Bon, il est vrai que je suis allergique à Neige. Rien de ce que le bonhomme ne propose ne m'intéresse, probablement parce que j'ai perdu mon hypersensibilité après la puberté. Après avoir récupéré à son compte la renommée de Peste Noire (involontairement ou non, mais Famine apprécie), le Français a ouvert aux metalleux une musique qui à la base ne les concerne pas. Il reste à chacun de croire ou non que Neige apporte un souffle frais dans la musique avec son black/shoegaze, tout autant qu'Opeth apporte un souffle à la musique 70's. En attendant, Amesoeurs ou Alcest font un carton. Cela n'a pas manqué d'attirer l'attention des Roman de Drudkh.

Si je reste friand des mélodies de Roman Saenko et Roman Blagih, le Handful of Stars de Drudkh montrait sans fard leurs velléités de se diriger vers une musique plus légère, définitivement détaché du black metal. Il n'est pas surprenant que les Ukrainiens aient apprécié les projets atmosphériques de Neige, jusqu'à cette nouvelle collaboration à la clé. Je ne connais pas plus que vous les rouages de ce montage international, je constate le résultat simple à se remémorer: tout le line-up de Drudkh aux instruments et Neige aux vocaux (presque) masculins. Pour être plus précis, une chanteuse vient poser quelques vocalises, mais globalement Neige gère 80% de l'album.

Que retrouve-t-on sur cet opus, au final? Comment se mélangent les deux entités? La musique, peut-être écrite en commun, porte les mélodies de l'Ukrainien. Elle est dans la continuité de Handful of Stars, en allégeant et aérant encore le propos. Pour les fans d'agressivité et de rudesse, il ne reste définitivement rien. Le rapprochement avec les thèmes d'Alcest semble cette fois criant et Old Silver Key affectionne les thèmes pop/ambient sirupeux. Certains passages m'évoquent les Katatonia les plus allégés (Last Fair... ou Tonight's Decision), d'autres sonnent comme du Anathema période coolos sous Vallium. Les médicaments, c'est pas ma came.

Pour moi, le gros point noir, c'est la voix. L'organe se résume rapidement à un souffle susurrant. Aucune puissance (bon, ça c'est pas grave), mais surtout pas de nuances, pas d'accroche et au bilan pas d'émotions sur la quasi-totalité de l'album. Seule exception, "Burnt Letters" semble un peu plus vécue. Ces prises de chant de salle de bain n'arrivent pas à un dixième du potentiel d'un Danny Cavanagh, et j'ai même l'impression qu'elles sont inférieures aux vocalises habituelles de Neige. Et pour un album de musique plus éthérée où les vocaux ont une énorme importance, cela ne le fait pas.

Je ne rejette pas tout sur Neige, car musicalement je trouve que cela ne suit pas non plus. L'instrumental "Nineteen Winters Far Away from Home" permet de constater que l'exécution des trémolos n'est pas impeccable, que les riffs sont tartinés lonnnnngtemps. Ce qui est jouissif enrobé dans un black metal instinctif devient hésitant et terne dans un créneau où les albums sont plus chiadés. Et j'évite de penser à une bouse pop acidulée comme "Star Catcher". La production made in Ukraine manque de puissance et de sustain pour rivaliser avec les groupes atmosphériques.

Le seul qui s'éclate et fait une démonstration de son talent, c'est le batteur. Vlad colle des patterns parfois lumineux, joue sur les nuances et tient presque à lui seul tout l'album. Cela ne suffit pas pour m'intéresser au projet... et cette voix, cette voix...

J'ai l'impression que Tales of Wanderings est un truc monté vite fait, peut-être pour se faire plaisir sans prise de tête entre deux Drudkh. Tout au long de l'écoute de ce premier album, j'ai pu me rendre compte à quel point le Alternative IV ou le Judgement d'Anathema était des albums fabuleux. Ca, c'est de la musique atmosphérique et des vocaux investis. Rien qu'un titre comme "Flying" ou "Pressure" met à l'amende Old Silver Key pour dix ans. J'espère juste que Drudkh se trouvera maintenant purgé de ses intentions les moins louables.


Rédigé par : Prince de Lu | 08/20 | Nb de lectures : 13804