Un nouveau rejeton vient agrandir la belle famille du Metal, grossir une branche qui a le vent en poupe, à savoir le fameux son de la scène du Sud-Est des USA. Northless, originaire du Winsconsin, se balade entre sludge, Metal lourd, et rock couillu. Sauf qu’ils jouent aux Sudistes sans l’être, et ça s’entend. Ils veulent faire comme les petits copains de cet univers métallique, sauf que ce premier album n’a pas la mélancolie, ni la fureur, encore moins le j’m’en-foutisme propre à cette zone qui rend leurs sons si personnels et empreints de charme, bayou, bagou et charisme.

"Clandestine Abuse" est un opus qui déboîte lors des premières écoutes… mais ne fait pas illusion bien longtemps. Le riffing est plutôt bon, même si le combo ne se hasarde pas dans des plans alambiqués, prog’ ou autre. Rythmique solide, basse et batterie en place mais peu aventureuses pour le style pratiqué. Quant au chant, il oscille entre les voix d’un "Voices of Omens" de Rwake, et les réminiscences d’un "Remission", de Mastodon bien sûr. A la manière des premiers cités, le trio propose cette lourdeur retenue et maîtrisée. Rwake étant la Rolls du sludge mélodique et accessoirement mon groupe de chevet, je ne peux malheureusement que comparer, et on ne tape pas dans la même cour (à des années lumières même). Le mimétisme va même loin puisque le timbre du chanteur se rapproche de C.T, hurleur de l’Arkansas. On reconnaît cette voix de mécano lourde, rugueuse, rocailleuse, mais chaleureuse. Erik Stenglein nous gratifie, une seule fois, de sa voix claire vide d’émotion, qui met mal à l’aise l’auditeur tant elle est à côté de la plaque.

Northless maîtrise à merveille l’art de proposer une musique qui passe par une oreille pour ressortir par l’autre, sans provoquer plus d’émoi. Je suis sévère mais ayant au minimum une trentaine d’écoutes au compteur de ce "Clandestine Abuse", je ne saurais toujours pas dissocier les titres entre eux. Imaginez-vous devant la télé en plein mois de juillet. Appuyez sur France 3 et comatez gentiment devant le tour de France. Vous verrez les champions, vous verrez aussi ceux qui se font choper à la pissotière, ceux qui nous font peine car ils rentrent tête baissée avec la voiture balai, ou encore ceux toujours aux côtés de Gérard Holtz sans pour autant truster les premières places du classement. Et puis il y a les équipiers modèles, qui appliquent les consignes à la lettre, ceux qui bossent mais qu’on ne voit pas. Ils effectuent leurs tâches sans proposer davantage. Northless est en quelque sorte le Hollandais au nom imprononçable qui finira 116ème, sans éclat, que quelques passionnés auront vaguement remarqué car il ne finira que 21ème au contre-la-montre entre Nancy et Metz. Le pire est que l’on n’a rien à reprocher à ces coureurs, juste un talent moindre que leurs comparses.
Les 3 Ricains proposent un CD tout à fait correct, solide même, avec quelques moments savoureux. Malheureusement, rien de bien nouveau, rien de bien trippant. A leur discrédit, cela manque d’émotion, de personnalité, de breaks magiques, de passages qui te scotchent, du petit truc qui fait la différence. Les compos ont, à mon sens, trop peu d’âme. Elles en deviennent assez proches les unes des autres, linéaires, et s’oublient vite.

Album qui ne mouline pas forcément dans le vide, mais où chaque écoute, même si elle est appréciable, n’incite pas à la suivante. Mais il faut être indulgent, ce n’est qu’un premier opus. Que le groupe bidouille ses instruments pour en retirer le son Made in Northless, qu’il tourne un peu plus pour apprendre les subtilités du métier, qu’il laisse l’émotion s’exprimer davantage, pour laisser ressortir la barbu frustré et mélancolique qui est en chacun d’eux.


Rédigé par : Bras Cassé | 12.5/20 | Nb de lectures : 12568