Saperlipopette ! Dix ans déjà que NOCTURNAL BREED a débarqué dans les bacs de nos lointaines contrées françaises avec son premier album « Aggressor », une déferlante Motörthrash’n’head qui sentait bon la sueur qui pique les yeux, le Jack Daniel’s et les copeaux de médiator. S. A Destroyer (GEHENNA, SATYRICON) et Ed Damnator (aka Silenoz, qui assouvissait ses penchants thrash impossibles à intégrer dans DIMMU BORGIR) rendaient ainsi hommage à leurs idoles des années 80 pour qui jouer vite, fort et picoler autant que possible était une religion bien plus encore qu’un mode de vie. Une reprise du titre culte de DEATH « Evil Dead », jouée à l’arrach’ mais avec passion, m’avait décidé à investir dans ce digipack à l’allure bien guerrière, malgré une production minimaliste.

Silenoz a abandonné ses alcoolytes un an plus tard, mais NOCTURNAL BREED a continué dans un certain anonymat à sortir des albums jusqu’en 1999, puis ce fut une sorte de silence à peine rompu par deux EP et deux splits en 2004 et 2005 avant la réédition de leurs trois albums et du EP « Triumph of the Blasphemer » la même année. « Left To Rot » marque donc le véritable retour du groupe, et pour cela un gros effort a été réalisé sur la pochette et le livret, bien plus professionnels que par le passé, « Aggressor » excepté. La production est également soignée, tout en gardant une certaine fraîcheur malgré la perte du côté rugueux des premières prods des Norvégiens. Seulement voilà, le temps a passé et NOCTURNAL BREED se trouve maintenant, comme ses frères d’armes BEWITCHED qui ont sensiblement suivi le même parcours, totalement immergé dans une nouvelle vague thrash qu’ils ont en partie initiée… et la donne a changé, d’autres metal warriors aux cartouchières bien remplies sont apparus ; on demande plus maintenant à un groupe de thrash traditionnel qu’on en demandait il y a dix ans quand le style était moribond.

Alors oui, « Fields Of Rot » est un album honnête et parfois même furibard (« Wicked, Vicious and Violent », « Fields Of Rot », « Code Of Conduct »). Oui, quand les Norvégiens se glissent dans les santiags moites de Lemmy pour un « Iron Bitch » au refrain plus motörheadien que MOTÖRHEAD lui-même, on gueule à l’unisson, voix rauque sortant d’une gorge tendue vers un micro imaginaire. Mais globalement, on trouve trop de breaks sur ce disque, trop de parties sans âme, lourdes dans tous les sens du terme. Le chant aigu et halluciné de S. A Destroyer n’arrange pas les choses : ses hurlements de diablotin enragé collent très bien aux passages joués pied au plancher (ou index crispé sur la détente de la sulfateuse), mais dès que les tempos ralentissent ils deviennent soûlants et soulignent la naïveté des riffs. Déception supplémentaire, on n’a cette fois pas droit à une reprise contrairement aux disques précédents alors qu’une cover sympa aurait peut-être égayé l’ensemble, l’aurait rendu moins conventionnel.

Dans ce genre de thrash’n’black clichesque à souhait, NOCTURNAL BREED est presque devenu trop sérieux, trop propre, trop carré. Il existe maintenant des formations plus enthousiasmantes, comme NECROMESSIAH, qui tapent eux aussi dans le thrash primaire mais dégagent énormément plus d’énergie et sonnent plus authentiquement « Evil », là où NOCTURNAL BREED est devenu trop lisse. Un retour pas totalement raté, mais décevant.


Rédigé par : Dungorpat | 11,5/20 | Nb de lectures : 10782