Ah, L’Andorre, petite principauté coincée au milieu des Pyrénées, ses cols et ses jolies vallées, le Pas de la Case, Andorre-la-Vieille, ses magasins vendant des cartouches de clopes détaxées et du matériel high-tech à perte de vue… le commun des mortels connaît surtout ce petit pays franco-catalan pour le dernier point, mais le connaît moins pour ses groupes de Metal (hé oui, il y en a partout !). Et après PERSEFONE, qui curieusement s’était plus fait un nom au Japon qu’en Europe (notamment dû à la distribution de leurs disques assez particulière), voilà que débarque NAMI avec son premier album intitulé Fragile Alignments, sans passer par la case (sans pas, donc) démo.

D’ailleurs, comme l’Andorre c’est petit j’avais d’abord cru que NAMI était un projet parallèle de membres de PERSEFONE, mais il n’en est rien. Le seul lien (hormis l’origine géographique) est la présence de Marc Mas et Miguel Espinosa, respectivement batteur et claviériste de PERSEFONE, derrière les manettes pour l’enregistrement de Fragile Alignments. On pourra néanmoins définir un lien stylistique entre les deux formations andorranes, à savoir un Death-Metal progressif, mais dans la forme seulement car les influences sont très différentes. Si PERSEFONE brassait large à la manière d’un KALISIA avec ses synthés de partout et son goût pour les envolées guitaristiques diverses et variées, NAMI penche plutôt du côté acoustique d’un OPETH. Signature chez Klonosphère oblige (le premier groupe non-français à rejoindre cette écurie si je ne m’abuse), on trouvera aussi des bouts de Death plutôt groovy tendance syncopée et « complexe », à la MISTAKEN ELEMENT, HACRIDE ou les premiers KLONE au sein de Fragile Alignments.

NAMI pratique donc une sorte de Death-Metal complexe, tantôt acoustique et atmosphérique, tantôt percutant avec des riffs techniques alambiqués mais catchy (bien appuyés par une prod étonnamment grasse et puissante). Après l’introductif "Awakening From Lethargy" très cool et relaxant, c’est le déluge guitaristique qui commence dès "The Inner Man: Materia". Sweepings et passages syncopés (pas de polyrythmie ou de djent pour autant) s’enchaînent dans une maîtrise technique qui fait plaisir à entendre (le jeu de batterie est excellent également), avec des structures certes complexes mais les changements de plans incessants passent comme une lettre à la poste, si l’on est un peu habitué à ce style de Death progressif. Pas de branlette à la OBSCURA et consorts, la musique de NAMI reste assez accrocheuse et les riffs sont plutôt écrasants et sont là pour poser une ambiance (parfois à la manière d’un THE OCEAN sur Precambrian, le concept « planétaire » y compris) plutôt que de proposer une démonstration technique stérile. La suite du disque applique plus ou moins la même recette, à la seule différence que les passages acoustiques emboîtent progressivement le pas sur l’aspect purement death.

Et la musique de NAMI fonctionne toujours, le début de "The Growing - Earth" en chant clair est superbe (tout au long de Fragile Alignments, le chant Death est également très bon, bien qu’il soit de facture assez classique), et les riffs très fouillés sont encore en bonne place. Mais néanmoins, un défaut apparaît pour moi très vite au sein de Fragile Alignments : le déséquilibre entre les passages acoustiques et les parties death. Il n’y a pas réellement d’alchimie, et les breaks plus calmes arrivent un peu comme un cheveu sur la soupe, cassant l’élan d’efficacité qu’amènent les parties metal techniques et incisives à souhait. Par la force des choses et au fil des écoutes, on ne retiendra donc que l’aspect Death progressif de Fragile Alignments avec certains moments de grâce (le passage épique et écrasant à la GOJIRA au milieu de "Oppression and Understanding - Fire" par exemple, ou encore le début de "Cosmical Beginning - Air" ainsi que son riffing subtil). L’aspect acoustique est quant à lui assez convenu, trop proche d’un OPETH même si la qualité de composition et d’exécution sont bien là. Les morceaux majoritairement acoustiques ont alors du mal à convaincre, hormis "Loop of Truth (The Link)" où le chant death bien profond se taille la part du lion. Ainsi la fin de Fragile Alignments (les 3 dernières pistes) s’avère être assez longuette et ennuyeuse malgré le chant clair très prenant, surtout après les déferlements de riffs techniques des premiers morceaux.

Pour un premier album, la maîtrise technique est bien là (et de fort belle manière pour le côté purement métallique), mais la mixture de NAMI (du OPETH, du CYNIC, du THE OCEAN, et du Death progressif « à la Klonosphère ») n’est pas encore tout à fait au point, en grande partie à cause d’une structuration des morceaux et de l’album à mon sens trop hétérogène. NAMI doit donc encore trouver sa voie, trouver un peu plus de personnalité (le concept lyrique est déjà très développé à ce niveau) et pourra prétendre à devenir un grand, et à mon avis le talent est là. Je n’ai donc personnellement pas accroché à Fragile Alignments à 100%, bien évidemment à cause du manque d’intérêt intrinsèque des parties acoustiques, mais si vous n’avez pas peur de ce genre d’atermoiements plus soft Fragile Alignments pourrait bien vous convaincre totalement. Pour ma part je vais décerner à ce disque mes plus sincères encouragements et attendre la suite car il y a là un très, très gros potentiel à suivre de près.


Rédigé par : ZeSnake | 13.5/20 | Nb de lectures : 13887