Nihil (de, dans l’ordre alphabétique : CSSABA, FURIA, FDS, MASSEMORD, MOROWE, SEAGULLS INSANE AND SWANS DECEASED MINING OUT THE VOID) est un peu le maître ès expérimentation dans la scène BM polonaise. Voici en l’entité MORD’A’STIGMATA un challenger, challenger que Nihil a lui-même adoubé vu qu’il a joué les guests sur Antimatter (2011), le second album de ce groupe de Bochnia existant depuis 10 ans. Pourtant, au départ, rien ne faisait de MORD’A’STIGMATA un groupe barré ou expérimental ou même « avant-gardiste » comme il est écrit sur la toile. Je ne connais pas les démos mais Überrealistic (2008) donnait dans un Death/Black polonais plutôt classique, mi-moderne mi-old-school et quelque peu technique, dont le seul crédit expérimental ou tout du moins original était… un interlude électronique. Les choses ont changé, avec le line-up d’ailleurs (comportant pour les références un tant soit peu connues un ex-gratteux Live de MOROWE), pour Antimatter qui était un disque plutôt intéressant. MORD’A’STIGMATA y mêlait le Death polonais tout ce qu’il y a de plus puissant avec plusieurs courants du BM, du riffing de MAYHEM aux ambiances du Black orthodoxe en passant par le Black brutal et le Black dit « silésien », celui de MASSEMORD notamment. Cela nous donnait donc une sorte de Grand Declaration Of War version polonaise, avec néanmoins des expérimentations limitées, donc MORD’A’STIGMATA n’était pas foncièrement avant-gardiste sauf quand il se permet de placer du chant clair à la Garm sur un morceau et lorsqu’il concluait cet album, très bon mais pas abouti, par un morceau plus mystique et psychédélique.
Voici donc le temps du véritable changement, qui pourrait s’effectuer dans la continuité de Antimatter mais qui va en vérité se faire à presque 180°, pour la signature de MORD’A’STIGMATA chez Pagan Records après avoir fréquenté deux labels inconnus au bataillon (Lilith et Sun&Moon). Si le groupe mettait en avant sur ses deux premiers albums son côté brut de décoffrage, il va avec Ansia tenter de développer ses atmosphères. La présence sur cette galette de 47 minutes de seulement 5 pistes dont 3 dépassent les 10 minutes donnent déjà une bonne indication de ce à quoi nous allons avoir affaire. MORD’A’STIGMATA quitte les carcans polonais habituels pour faire quelque chose de plus réfléchi, versant donc dans un véritable apparat expérimental et/ou avant-gardiste, se rapprochant à priori des délires de Nihil, MOROWE en particulier voire SEAGULLS INSANE AND SWANS DECEASED MINING OUT THE VOID sans en atteindre l’intensité pour le moment. Le virage de MORD’A’STIGMATA est même comparable à celui de MASSEMORD entre The Whore Of Hate et The Madness Tongue Devouring Juices Of Livid Hope. Mais le quartet de Bochnia ne va pas pour autant s’embarquer dans une aventure volontairement hypnotique et répétitive, plutôt une sorte de Black atmosphérique et psychédélique qui met en valeur les ambiances et laisse la furie Black-Metal au vestiaire. Ma fiche promo y va fort au niveau des qualificatifs et l’étiquette complète de MORD’A’STIGMATA pour Ansia serait donc du « occult avant-garde psychedelic post black-metal », rien que ça et le pire c’est que c’est tout à fait vrai. Voyons ce que nous réserve cet album qui n’est pas facile à appréhender surtout quand on ne connaît pas le style étrange cher à Nihil et/ou qu’on s’attend à ce qu’un groupe polonais nous défonce les esgourdes à coups de blasts.
On se croit pourtant en terrain connu une fois passée l’intro mélodique de "Inkaust", avec un démarrage très Black, toutefois les trémolos estampillés « atmo » surprennent et surtout, la production est bien plus crue que par le passé, plus du tout « polonaise ». Le chant arraché ne pose pas de problème particulier et le côté plus classic BM est convaincant. Mais c’est un vrai-faux départ car passées quatre minutes, MORD’A’STIGMATA va montrer son nouveau visage grâce à un long « break » qui est l’attraction principale de ce morceau de presque 14 minutes. Le groupe y développe une atmosphère très sombre et apocalyptique, accompagnée par une batterie percussive et des leads inquiétants que n’auraient pas renié les illustres DARKSPACE, avant de partir dans une collection de riffs bien lourds en mode quasi-doom/sludge, agrémentés d’étranges vocaux chantés et traficotés (la collusion des deux composantes précitées me faisant penser, toutes proportions gardées, à ce que fait le groupe C R O W N) qui laissent également la place à des parties hurlées plus conventionnelles. L’ensemble est parfaitement construit et arrangé, devenant même assez accrocheur sur la fin grâce aux riffs appuyés. Ensuite "Shattered Vertebrae of the Zodiac" démarre carrément en mode post-black atmo (sans chant clair heureusement) avant à nouveau de plus appuyer ses riffs en mode « silesian black », mais le reste du morceau est quasi-totalement atmosphérique, laissant les guitares claires et la batterie s’exprimer dans une ambiance dépouillée qui évoquera cette fois-ci NOCTE OBDUCTA, avant une progression vers un final très psychédélique avec comme point d’orgue des riffs bien enfumés. Riffs qui font la liaison, sans transition, avec le troisième morceau "Pregressed" : un break ambiant pour commencer et c’est ensuite la foire aux riffs déglingués en mode prog/psyché dégueulasse, et MORD’A’STIGMATA semble avoir abandonné le Black Metal, qui laisse place à une sorte de Metal psychédélique très noir et lancinant, certes encore classifiable dans le Black Metal de par le chant, la production et le grain des leads mais, relativement, nous sommes désormais très loin de ce que faisait le groupe sur Antimatter, même si la fin de ce morceau s’avère être plus dynamique et incisive.
Une partie ambiante se charge de faire la liaison avec "Praefatio Pro Defunctis", morceau plus classique mais plus posé et plus occulte, avec toujours des guitares plus rock/sludge/doom/stoner (rayez les mentions inutiles) que Black Metal, le morceau se terminant toutefois dans une emphase plus mélodique et accrocheuse qui évoque à nouveau les œuvres de NOCTE OBDUCTA ou encore AGRYPNIE. Mais en moins bien. Cet album très travaillé, bien arrangé et très cohérent qui se termine par une courte outro-titre, a en vérité du mal à me convaincre. C’est bien fait, mais des longueurs surtout dues au format « longues pistes » apparaissent et l’on retient plus quelques bonnes idées ici et là que l’ensemble, alors que Ansia semble avoir été fait pour être dégusté d’une traite. Un bel effort de la part de MORD’A’STIGMATA, mais dont je ne sais trop quoi penser au final, le groupe fait de bonnes choses mais est probablement capable de faire quelque chose de plus poussé et mémorable. Beaucoup de références sont citées par la promo dont certaines n’ont pas grand-chose à voir avec ce qui est proposé (DEATHSPELL OMEGA, SECRETS OF THE MOON, NACHTMYSTIUM), mais même en leur accordant Ansia est tout de même loin de la qualité d’un Antithesis ou d’un Silencing Machine (qui s’en rapproche à la rigueur sur certains aspects), et surtout des albums de NOCTE OBDUCTA auquel je l’apparente. Je regrette surtout que le groupe n’ait pas persévéré dans la voie de Antimatter à qui il manquait un petit quelque chose pour être énorme, petit quelque chose que MORD’A’STIGMATA aurait largement pu trouver mais il a choisi de faire autre chose. Bref, j’espère plutôt que le groupe fera un revirage vers quelque chose de plus bastos comme l’a fait MASSEMORD… Ansia est un album très bien fait malgré tout, mais que je ne trouve pas spécialement original et qui, malgré ses qualités évidentes, ne me touche pas vraiment, car il y a déjà eu mieux dans un style similaire à mon avis. Mais il mérite le coup d’oreille, ne serait-ce que pour découvrir un groupe polonais qui ose tout comme leur illustre collègue Nihil.
18/20 un album fantastique
avec un batteur exceptionnel. autant sur disque qu'en live.
gloom IP:193.57.67.241 Invité
Posté le: 17/03/2014 à 08h29 - (111392)
13,5 bah putain !
cet album mérite une bien meilleure note vu sa qualité !
album exigeant certes, mais une fois digéré, on a qu'une envie c'est replonger !
perso j'lui colle minimum un bon 16 !
Phlogiston IP:176.189.67.14 Invité
Posté le: 17/03/2014 à 15h02 - (111404)
C'est quoi du black silésien ?
ZeSnake Membre enregistré
Posté le: 17/03/2014 à 18h13 - (111408)
c'est facile, c'est tout ce qui se rapproche de la compil "Silesian Black Attack", soit :
1.BESATT
2.FURIA
3.IPERYT
4.MOROWE
5.MASTIPHAL
6.DIABOLICON
7.VOIDHANGER
8.MASSEMORD
sinon désolé mais je maintiens, je trouve cet album bien fait mais pour moi ce n'est pas abouti, il y a mieux dans un esprit similaire, et c'était mieux avant aussi... :)
AnusFraicheur Membre enregistré
Posté le: 17/03/2014 à 19h37 - (111409)
"L'adjectif silésien fait référence à la région polonaise de Silésie mais aussi :
au Silésien, une époque géologique du Carbonifère ;
deux langues européennes de familles différentes :
le silésien, langue slave apparentée au polonais ;
le silésien, langue germanique du groupe du moyen allemand."
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Voici donc le temps du véritable changement, qui pourrait s’effectuer dans la continuité de Antimatter mais qui va en vérité se faire à presque 180°, pour la signature de MORD’A’STIGMATA chez Pagan Records après avoir fréquenté deux labels inconnus au bataillon (Lilith et Sun&Moon). Si le groupe mettait en avant sur ses deux premiers albums son côté brut de décoffrage, il va avec Ansia tenter de développer ses atmosphères. La présence sur cette galette de 47 minutes de seulement 5 pistes dont 3 dépassent les 10 minutes donnent déjà une bonne indication de ce à quoi nous allons avoir affaire. MORD’A’STIGMATA quitte les carcans polonais habituels pour faire quelque chose de plus réfléchi, versant donc dans un véritable apparat expérimental et/ou avant-gardiste, se rapprochant à priori des délires de Nihil, MOROWE en particulier voire SEAGULLS INSANE AND SWANS DECEASED MINING OUT THE VOID sans en atteindre l’intensité pour le moment. Le virage de MORD’A’STIGMATA est même comparable à celui de MASSEMORD entre The Whore Of Hate et The Madness Tongue Devouring Juices Of Livid Hope. Mais le quartet de Bochnia ne va pas pour autant s’embarquer dans une aventure volontairement hypnotique et répétitive, plutôt une sorte de Black atmosphérique et psychédélique qui met en valeur les ambiances et laisse la furie Black-Metal au vestiaire. Ma fiche promo y va fort au niveau des qualificatifs et l’étiquette complète de MORD’A’STIGMATA pour Ansia serait donc du « occult avant-garde psychedelic post black-metal », rien que ça et le pire c’est que c’est tout à fait vrai. Voyons ce que nous réserve cet album qui n’est pas facile à appréhender surtout quand on ne connaît pas le style étrange cher à Nihil et/ou qu’on s’attend à ce qu’un groupe polonais nous défonce les esgourdes à coups de blasts.
On se croit pourtant en terrain connu une fois passée l’intro mélodique de "Inkaust", avec un démarrage très Black, toutefois les trémolos estampillés « atmo » surprennent et surtout, la production est bien plus crue que par le passé, plus du tout « polonaise ». Le chant arraché ne pose pas de problème particulier et le côté plus classic BM est convaincant. Mais c’est un vrai-faux départ car passées quatre minutes, MORD’A’STIGMATA va montrer son nouveau visage grâce à un long « break » qui est l’attraction principale de ce morceau de presque 14 minutes. Le groupe y développe une atmosphère très sombre et apocalyptique, accompagnée par une batterie percussive et des leads inquiétants que n’auraient pas renié les illustres DARKSPACE, avant de partir dans une collection de riffs bien lourds en mode quasi-doom/sludge, agrémentés d’étranges vocaux chantés et traficotés (la collusion des deux composantes précitées me faisant penser, toutes proportions gardées, à ce que fait le groupe C R O W N) qui laissent également la place à des parties hurlées plus conventionnelles. L’ensemble est parfaitement construit et arrangé, devenant même assez accrocheur sur la fin grâce aux riffs appuyés. Ensuite "Shattered Vertebrae of the Zodiac" démarre carrément en mode post-black atmo (sans chant clair heureusement) avant à nouveau de plus appuyer ses riffs en mode « silesian black », mais le reste du morceau est quasi-totalement atmosphérique, laissant les guitares claires et la batterie s’exprimer dans une ambiance dépouillée qui évoquera cette fois-ci NOCTE OBDUCTA, avant une progression vers un final très psychédélique avec comme point d’orgue des riffs bien enfumés. Riffs qui font la liaison, sans transition, avec le troisième morceau "Pregressed" : un break ambiant pour commencer et c’est ensuite la foire aux riffs déglingués en mode prog/psyché dégueulasse, et MORD’A’STIGMATA semble avoir abandonné le Black Metal, qui laisse place à une sorte de Metal psychédélique très noir et lancinant, certes encore classifiable dans le Black Metal de par le chant, la production et le grain des leads mais, relativement, nous sommes désormais très loin de ce que faisait le groupe sur Antimatter, même si la fin de ce morceau s’avère être plus dynamique et incisive.
Une partie ambiante se charge de faire la liaison avec "Praefatio Pro Defunctis", morceau plus classique mais plus posé et plus occulte, avec toujours des guitares plus rock/sludge/doom/stoner (rayez les mentions inutiles) que Black Metal, le morceau se terminant toutefois dans une emphase plus mélodique et accrocheuse qui évoque à nouveau les œuvres de NOCTE OBDUCTA ou encore AGRYPNIE. Mais en moins bien. Cet album très travaillé, bien arrangé et très cohérent qui se termine par une courte outro-titre, a en vérité du mal à me convaincre. C’est bien fait, mais des longueurs surtout dues au format « longues pistes » apparaissent et l’on retient plus quelques bonnes idées ici et là que l’ensemble, alors que Ansia semble avoir été fait pour être dégusté d’une traite. Un bel effort de la part de MORD’A’STIGMATA, mais dont je ne sais trop quoi penser au final, le groupe fait de bonnes choses mais est probablement capable de faire quelque chose de plus poussé et mémorable. Beaucoup de références sont citées par la promo dont certaines n’ont pas grand-chose à voir avec ce qui est proposé (DEATHSPELL OMEGA, SECRETS OF THE MOON, NACHTMYSTIUM), mais même en leur accordant Ansia est tout de même loin de la qualité d’un Antithesis ou d’un Silencing Machine (qui s’en rapproche à la rigueur sur certains aspects), et surtout des albums de NOCTE OBDUCTA auquel je l’apparente. Je regrette surtout que le groupe n’ait pas persévéré dans la voie de Antimatter à qui il manquait un petit quelque chose pour être énorme, petit quelque chose que MORD’A’STIGMATA aurait largement pu trouver mais il a choisi de faire autre chose. Bref, j’espère plutôt que le groupe fera un revirage vers quelque chose de plus bastos comme l’a fait MASSEMORD… Ansia est un album très bien fait malgré tout, mais que je ne trouve pas spécialement original et qui, malgré ses qualités évidentes, ne me touche pas vraiment, car il y a déjà eu mieux dans un style similaire à mon avis. Mais il mérite le coup d’oreille, ne serait-ce que pour découvrir un groupe polonais qui ose tout comme leur illustre collègue Nihil.
Rédigé par : ZeSnake | 13.5/20 | Nb de lectures : 12608