Avec "Memorial", MOONSPELL opéra un virage musical en direction de ses racines originelles : le bien-sombre-bien-violent. Ce fait a d’ailleurs été confirmé par le retour sur leur premier essai sorti en 2007 sous le titre "Under Satanae". Et avec ce nouvel opus, "Night Eternal", MOONSPELL garde la même ligne de conduite tout en renforçant le propos.

Dès le premier titre, la couleur du disque est annoncée : noir, nuit, mort et univers qui ne donne pas franchement envie de rigoler. Son introduction de 3 minutes est très proche d’une musique d’un film dont le sujet serait un château dans les Carpates avec des vampires, un carrosse noir, du sang, de la baston et beaucoup de grandiose. Ou carrément la nuit de l'Apocalypse (car il fera nuit). Et les méchants gagneraient à la fin. La pression monte avec une arrivée progressive de tous les instruments, en commençant par la batterie, puis voix susurrée puis guitares. Et vers la 3ème minute, c’est l’explosion : voix vociférée, gros riff bourrin, batterie hyper massive et orchestrations magistrales.
MOONSPELL nous annonce des jours très sombres. Les 3/4 des titres sont dans la même veine : très sombre, beaucoup de passages assez violents et de belles orchestrations. D’ailleurs Fernando est un peu avare de son chant sur cet album. Il vocifère la majeure partie du temps. Quelques morceaux plus mid-tempo comme le très gothique "Scorpion Flowers" avec la contribution de Anneke Van Giersbergen (ex-THE GATHERING/AGUA DE ANNIQUE).
Ce titre sonne par ailleurs très LACUNA COIL, première période, de par le mélange particulier des voix de Fernando et d'Anneke. A noter également l’avant-dernier titre "Spring of rage" qui possède un riff assez original. Le titre est assez violent, mais tout en retenue. Il s’agit d’un très bon titre qui ressort également de toute cette masse de violence facile et aseptisée, avec le chant de Fernando qui donne dans la nuance, alternant le grave/chaleureux avec le guttural qui lui est si typique, en passant par un chant presque épique. Cette chanson se boit comme du petit lait.

L’album est plutôt court (9 morceaux d’environ 4 à 5 minutes chacun), mais ce sera un bon point car plus long, il aurait pu être lassant.

Les paroles sont très noires, pessimistes. Elles dépeignent un monde noir déjà mort, des ombres, le noir, la nuit. Les 2 premiers textes sont d'ailleurs tirés du livre des Révélations de Jean (Apocalypse). Les ambiances sont en parfait accord avec les textes. Ce n’est pas très original, mais MOONSPELL semble en avoir fait son fond de commerce.

Les visuels de la pochette et du livret ont été réalisés par Seth Anton. Cela se voit au premier coup d’œil. La signature visuelle est évidente et donne, fort justement, un avant goût évident du contenu : sombre, violent. Et comme un disque de MOONSPELL depuis 3 albums, on s’attend à ce que l’on va écouter. L’ensemble est très esthétique, efficace mais pas vraiment original. Les visuels de Seth sont presque devenus un cliché pour ce genre de musique.

La production est monumentale. Assurément, MOONSPELL est à son apogée en terme de production. Peut-être même est-ce trop. Par exemple, la batterie est ici plus proche d’un tir de DCA que d’un set de percussion vivant. L’ensemble est très aseptisé. Mais grâce aux orchestrations, notamment sur le dernier morceau qui rappelle fortement "Fullmoon Madness", la pilule passe assez bien.
L'ensemble de cet album rappelle différents points de la carrière de Moonspell, la partie gothique et sombre/violente : "Irreligious", "Darkness and Hope" et "Memorial". Ceci de par l’utilisation très Moonspellienne des arpèges de guitares claires, des passages calmes à la voix susurrée, des ambiances orchestrées et du chant. MOONSPELL a su créer sa propre marque de fabrique et ne s'en prive pas.
Je me demande pourtant si cette production dernier cri avec surenchère sur tout ne sert pas de faire-valoir au manque d’évolution globale. Un peu à la manière d’un DIMMU BORGIR qui privilégie le spectacle et l’emballage au détriment d’un réel contenu.

Pour conclure, je dirai que "Night Eternal" est un album peu original. Mais MOONSPELL ne semble pas vouloir changer de cap, cap fixé depuis le diptyque "Darkness and Hope"/"The Antidote". Néanmoins, cet album comporte une vraie complexité et s’apprécie après plusieurs écoutes. Ce n’est pas un album très facile d’accès. La production et les orchestrations sont les principaux atouts de cet album. Et on pourrait lui reprocher les vagues ressemblances avec des titres de leurs précédents opus.

Je pense que MOONSPELL a sorti toute sa pulpe entre "Wolfheart" et "Darkness and Hope", produisant par la suite quelques bonnes chansons. MOONSPELL ne surprend plus vraiment aujourd’hui et suit sa route de géant avec une rigueur toute professionnelle.


Rédigé par : Matthieu | 14/20 | Nb de lectures : 12998