MITOCHONDRION, c’est joli comme nom ! Même si au cours de mon parcours universitaire je me suis orienté vers la microbiologie et la virologie en particulier, c’est toujours agréable de se remémorer les cours de biologie cellulaire de licence. Car pour ceux qui ne le sauraient pas, la mitochondrie est « un organite à l'intérieur d'une cellule eucaryote […] Son rôle physiologique est primordial, puisque c'est dans les mitochondries que l'énergie fournie par les molécules organiques est récupérée sous forme d'ATP, la source principale d'énergie pour la cellule eucaryote, par le processus de phosphorylation oxydative. […] Elle est considérée comme la centrale énergétique de la cellule, car c'est là que se déroulent les dernières étapes du cycle respiratoire (en présence d'oxygène, aérobie) qui convertit l'énergie des molécules organiques issues de la digestion (glucose) en énergie directement utilisable par la cellule (ATP) » (le Wikipédiatre). Mon imagination débordante aimerait d’ailleurs que voit le jour un 4-Way split MITOCHONDRION / CHLOROPLAST / GOLGI APPARATUS / NUCLEUS, le tout sortant sous l’égide d’un label nommé « Cytoplasm Records », ça aurait de la classe à mort.

OK OK, j’arrête de raconter ma vie, de donner des cours de bio et de dire des conneries. C’est une chronique de disque après tout…

MITOCHONDRION (le groupe, donc) est formé en 2003 en Colombie Britannique (Canada). Après deux démos (Mitochondrion en 2005 et Through Cosmic Gaze en 2006), un album autoproduit (Archaeaon en 2008) et quelques changements de line-up, le désormais trio sort son deuxième album longue-durée intitulé Parasignosis début 2011 chez le label en vogue, Profound Lore. Côté musique, MITOCHONDRION pratique un style qui a percé ces derniers temps, à savoir ce death/black chaotique et torturé ou « zzzzrrrrppchhhh brrgmblrrgblroooooogglllmblgl metal » initié par les Australiens barrés de PORTAL / IMPETUOUS RITUAL, mâtiné d’un soupçon de War-Metal (Canada oblige, le groupe est proche des combos du « Ross Bay Cult » soit CONQUEROR, BLASPHEMY, REVENGE et consorts) et surtout d’une bonne grosse louche de death plutôt technique mais tout aussi torturé à la GORGUTS ou IMMOLATION, les vocaux bien profonds en sus.

Marrant ça, je n’apprécie aucune des influences que je viens de citer… ça va m’aider pour la crédibilité tiens…

Mais alors que PORTAL et consorts ont décidé de rendre leur musique volontairement chaotique, complexe et « bordélique » (terme qui n’est pas à prendre de façon péjorative, attention, bien que je n’adhère pas au magma sonore proposé par les Australiens), MITOCHONDRION a choisi d’aérer le style, de le rendre plus « accessible » et « accrocheur » (notez bien les guillemets car tout ceci est très relatif). Si l’ambiance apocalyptique et occulte est bien présente, les Canadiens ont, semble-t-il, choisi de s’axer plus sur la performance technique, un peu à la manière des Néo-Zélandais d’ULCERATE. Le tout fait donc penser au premier abord à du PORTAL avec un son plus death (à la IMMOLATION), moins saturé et tranchant, mais MITOCHONDRION réussit quand même à poser son propre style. Parasignosis est un bloc de death/black apocalyptique plutôt dense, mais qui recèle au bout du voyage de passages plus accrocheurs qui font toute la différence. On retiendra notamment les 3 premiers titres formant une pièce unique nommée "Pestilentiam Intus Vocamus, Voluntatem Absolvimus", comportant des riffs terribles, un jeu de batterie excellent portant vraiment les structures plutôt variées (car oui, il y a des structures), et un chant d’outre-tombe vraiment prenant (alors que curieusement, je le trouvais extrêmement rébarbatif sur Archaeaon), et surtout des passages vraiment brutaux accompagnés d’autres plus posés et lourds. Un départ fracassant, mais qui permet surtout de bien s’imprégner de l’ambiance de Parasignosis car ce n’est pas tout ce que ce disque a à nous proposer.

Et pourtant, sur ces 3 morceaux tout est déjà dit, je me les passe très souvent d’ailleurs, plus que l’album entier. Mais faut bien que je parle de tout…

Toujours bien emballé dans sa prod sombre et fauchée à souhait (mais vraiment puissante par moments), avec un mastering signé par Colin Martson (KRALLICE, DYSRYTHMIA), Parasignosis enchaîne 4 autres titres (plus un interlude) sans temps mort. Le très véloce "Trials" reste cohérent jusqu’au bout, alors qu’on frôle le partage en couille complet à chaque minute. C’est là qu’est à mon avis la force de MITOCHONDRION : pratiquer un style chaotique et torturé tout en conservant une ligne directrice qui ne déborde jamais sur les côtés, pour maintenir l’auditeur sur son sillage du début à la fin, sans risque de le perdre dans les abysses en cours de route. Le morceau-titre, particulièrement rentre-dedans tout autant que délicieusement oppressant dans les breaks (et surtout dans le final), conserve cette direction « à fond droit devant » avec un chant bien écrasant par moments et quelques solos qui ne virent jamais dans le délire incompréhensible, tout en proposant des rythmiques bien pesantes, toujours appuyé par un jeu de batterie méchamment bien dosé. "Banishment (Undecaphosphoric)" poursuit le périple avec les passages les plus brutaux du disque, mais nous propose également des ambiances plus « cosmiques » tendant vers le psyché diabolique, ambiances qui atteignent leur paroxysme sur l’instrumental "Kathenotheism" dont les leads tendent vers le doom voire vers du black ambiant à la DARKSPACE. L’album se clôt par 3 pistes cachées, qui forment une longue outro ambiante à l’atmosphère dépouillée très abyssale, comme si on plongeait dans le souterrain verdâtre suggéré par la pochette, qui mène probablement vers l’enfer dont on entend les cloches résonner au début ainsi que le requiem qui passe en fond à la fin. Et à ce titre, les illustrations du livret sont absolument superbes et contribuent parfaitement à l’ambiance sombre et oppressante du disque, implacable et torturée mais pas insoutenable ou incompréhensible et véritablement accrocheuse. Un vrai tour de force de la part de MITOCHONDRION.

Diantre, v’là que je dis du bien d’un disque du Trou Profond. Je vais passer pour quoi ? Mince, faut pas que je trolle non plus sinon ça risque d’être pire. Dans quel merdier je viens de m’empêtrer ? Seule solution pour m’en sortir : trouver un défaut au disque pour nuancer un peu.

Parasignosis est donc un disque de death/black brutal et occulte monolithique mais cohérent et accrocheur, seulement le fait d’avoir voulu faire un bloc dense « comme les autres » dessert un peu le disque dans son ensemble. Le manque de variété se fait sentir au fil des écoutes, surtout que le disque allonge 55 minutes ce qui est assez long comparé aux autres disques du créneau death chaotico-torturé. La prise de risque est bien là (normal vu le style de base pratiqué), mais on aimerait que le groupe tente un peu plus de sortir des sentiers (déjà) battus et nous propose quelque chose de novateur, et il y a de la place (et le talent) pour le faire à mon avis. Les 3 premiers morceaux butent, mais la suite est du coup un peu plus attendue bien qu’efficace et glauque à souhait.

Ah ouais, mais du coup on va croire qu’au final je trouve ce disque décevant alors qu’il est ‘achement bien quand même. En même temps tout le monde a déjà dû regarder la note donc y’aura pas de surprise. Bon allez, on va conclure tout ça de manière positive.

Quoi qu’il en soit, avec Parasignosis MITOCHONDRION nous livre un second album bien maîtrisé, plutôt personnel dans l’approche des structures et dans l’ambiance. Ceux qui trouvent que PORTAL et consorts virent dans le grand n’importe quoi, mais qui sont quand même attirés par le style (je m'adresse également aux fans d'IMMOLATION, d'ULCERATE et de tout ce qui touche au death technique plutôt sombre), devraient absolument jeter une oreille à ce disque et risqueraient bien d’être conquis. Ceux qui sont déjà fans de PORTAL et consorts peuvent également apprécier le côté plus direct, moins frappadingue et torturé, mais tout aussi complexe et occulte de MITOCHONDRION qui arrive ici à rendre le style plus accessible histoire que tout le monde y trouve son compte. Moi y compris, pour qui Parasignosis a été une excellente surprise (le genre ne m’intéresse pas vraiment à la base) et un des premiers disques forts et vraiment convaincants de l’année.

Et merde, j’ai encore pondu un pavé…




Rédigé par : ZeSnake | 16/20 | Nb de lectures : 14170