A l’heure où les Four Horsemen sont en train d’enregistrer le successeur du très controversé « St Anger » et de préparer leur tournée estivale rituelle, à une époque où leur domination sans partage de la scène métal de la première moitié des années 90 n’est pour beaucoup plus qu’un lointain souvenir au vu des trois derniers albums studio particulièrement contestés, une plongée dans la biographie de l’un des plus grands, gros et influents groupes de métal de l’histoire semblait être une bonne idée afin de remettre certaines pendules à l’heure.

En voyant le nom de l’ouvrage et la couverture reproduisant un gros plan du visage grimaçant de James Hetfield (chant, guitare rythmique), devenu au fil du temps aussi inséparable de l’imagerie de METALLICA qu’Eddie The ’Ead l’est de celle de MAIDEN, je me disais que cette bio permettrait certainement de montrer METALLICA sous un jour objectif et impartial. Pourtant,
les affirmations de l’auteur dans son introduction ont commencé à me faire douter : « Vous ne trouverez pas de rumeurs salaces ici. C’est de l’authentique. C’est la vérité. » ou encore « C’est l’ouvrage sur METALLICA le plus exhaustif jamais écrit, et il a de fortes chances de le rester, à moins que le groupe ne décide un jour de publier sa propre version des faits.». Bien qu’il encourage les lecteurs à garder l’esprit ouvert, Joel McIver se présente ici, sous couvert de l’énorme travail d’investigation qu’il a accompli, comme le détenteur de la Vérité par témoignages interposés. Il en a tout à fait le droit, mais cette présentation est discutable dans le cadre d’un ouvrage censé être objectif et dont le but est de rétablir certaines vérités.

Le livre est constitué d’une succession de chapitres biographiques entre lesquels sont insérés des chapitres visant à valider ou non quelques « mythes » universels concernant le groupe, comme le mythe n°4 : « Lars et James écrivent toutes les chansons et sont les meilleurs musiciens du groupe » ou encore le mythe n°11 : « Load et Reload sont des albums innovateurs qui montrent que METALLICA a gagné en maturité et a élargi son horizon musical ». On trouve également des photos illustrant sa carrière, certaines bien poilantes montrant de jeunes adolescents qu’on n’aurait jamais imaginé voir un jour devenir des icônes pour plusieurs générations de hardos.

Les chapitres purement biographiques, très détaillés, sont un vrai régal pour tout fan, en partie parce qu’ils font la part belle aux sept premières années du groupe. Certains détails sont déjà connus parce que précédemment édités dans les innombrables bio publiées par les magazines spécialisés dans les années 90, mais c’est toujours avec plaisir qu’on se replonge dans cette époque (les années 80) qui a vu paraître tous ces albums qui ont changé le visage du métal, et je ne parle pas que de ceux de METALLICA. L’intérêt principal de cette partie biographique est que présentée de la sorte, dans le cadre d’un ouvrage littéraire et non insérée dans les pages d’un mag spécialisé regorgeant de photos de chevelus hirsutes habillés comme des clochards ou maquillés comme des gonzesses, elle rend accessible au plus grand nombre un chapitre de l’Histoire du Rock tout simplement.

L’autre gros morceau de « Que Justice Soit Faite ! » est donc constitué d’une analyse des mythes les plus courants concernant METALLICA. On en apprend ainsi plus sur les origines du mouvement thrash et de son appellation, sur l’affaire Napster et les réelles motivations du groupe quant au procès intenté en avril 2000, on a droit à une analyse approfondie de « Master Of Puppets », le troisième et cultissime album des Californiens, afin de savoir s’il est bien ou non le plus grand album de thrash de tous les temps (ndlr : bien sûr qu’il l’est, pffff !)… Et ce sont justement ces inserts qui me semblent par trop subjectifs, l’auteur donnant trop souvent son opinion et se posant en détenteur de la vérité, comme je l’ai évoqué plus haut, sous couvert du témoignage de figures emblématiques de la scène (Gene Hoglan (DARK ANGEL, STRAPPING YOUNG LAD), Tom Gabriel Fischer (CELTIC FROST), Sean Harris (DIAMOND HEAD) et une dizaine d’autres sources récurrentes). Certes, si certains de ses jugements n’allaient pas tellement à l’encontre de ceux que j’ai concernant certaines attitudes ou évolutions musicales du groupe, ils m’auraient peut-être moins horripilé, mais le fait est qu’on sent plus souvent le fan trahi que l’écrivain désirant rester objectif. Je ne rentrerai pas plus dans les détails afin de ne pas tomber dans les mêmes travers que lui, et laisserai donc les lecteurs juger de la justesse de ses analyses.

Que penser du bouquin au final ? Disons qu’il y a deux manières de l’appréhender : soit on s’implique émotionnellement et on réagit, positivement ou négativement, à chaque jugement émis, soit on décide de lire « Que Justice Soit Faite ! » comme une biographie non autorisée (ce qu’elle est, Joel McIver n’ayant pas demandé son aval à METALLICA) et de n’y prendre que les informations qu’on jugera utiles tout en gardant du recul par rapport aux analyses personnelles de l’auteur. Lu selon ce dernier angle, l’ouvrage est des plus passionnants malgré les fautes de grammaire et autres erreurs sur les noms d'albums ou de chansons cités, regorge de détails historiques et ne donne qu’une envie : ressortir le poste à K7 et se repasser « Kill’Em All », « Master… » (METALLICA), « Reign In Blood » (SLAYER), « Among The Living » (ANTHRAX), « The New Order » (TESTAMENT), « We Have Arrived » (DARK ANGEL), bref tous ces albums qui ont fait l’histoire du thrash! METAL UP YOUR ASS!!!

Auteur : Joel McIver
Traduit de l’anglais par Serge Lefaure

Editeur France : Camion Blanc, 2005
Editeur Original : Omnibus Press, 2004

Nombre de pages : 560
Prix : 30 euros


Rédigé par : Dungorpat | Biographie Un Poil Prétentieuse/ | Nb de lectures : 12440