MARILLION – Somewhere Else (Wagram) - 11/06/2007 @ 01h18
Marillion est grand, Marillion n’a plus rien à prouver, Marillion fait ce qu’il veut.
Fort de ce statut, il a tous les droits y compris celui de nous décevoir, y compris celui de choisir une autre voie que celle nous souhaiterions le voir suivre. Comme un ami proche ou un frangin qui de temps en temps se paie un caprice en nous déroutant par des directions que nous ne comprenons qu’à moitié.

Comme les ronds dans l’eau, les effets de Marbles n’ont pas encore achevé leur course que nombreux sont ceux qui attendent impatiemment le 14e album des Anglais. Or, s’il est une chose qu’il faut éclaircir immédiatement c’est que Somewhere Else n’a pas tout à fait la couleur ni l’odeur de Marbles.

Il est une autre chose établie également et une bonne fois pour toutes; Marillion n’est pas ou plus un groupe de rock progressif. En tout cas, il ne le revendique plus, s’il l’eût fait un jour. C’est très bien comme ça. Et tant pis pour ceux qui voient d’un mauvais œil cette manière de faire.

En 2007, Marillion souhaite définitivement s’affranchir de ces contraintes et s’afficher clairement comme un groupe de rock moderne, point à la ligne. Et si l’on attend malgré tout de Somewhere Else les mêmes émotions que pour le précédent c’est que nous sommes comme ça, nous les fans : impatients et exigeants.

Or, l’idée d’un album plus direct, plus pop s’il semble s’imposer comme une évidence, ne fait pas forcément sourire tout le monde. Après la bourrasque Marbles, Marillion nous referait-il le coup de Radiation ou d’Anoraknophobia ? Soit un album médian et allégé, alignant des titres plus courts, plus ramassés, aux mélodies soignées mais manquant de souffle et d’ambition ? Oui et non. On a dit plus haut que le rock prog n’était plus son fond de commerce principal. Bien! Mais, ne nous voilons pas la face, ce que l’on aime aussi chez Marillion, c’est l’alternance de titres courts et de pièces plus audacieuses comme le furent sur l’opus précédent Invisible Man ou Neverland. Sans parler d’Ocean Cloud.

D’une durée réduite (52’) ce 14e s’inscrit dans la moyenne de ce que le groupe a fait par le passé exception faite bien sûr de Brave et de Marbles. Sur un total de 10, trois titres dépassent les 4’ mais la plupart tourne autour de ce standard. Je ne suis pas un maniaque du chrono (finalement c’est bien possible) mais la durée des titres chez Marillion est un bon indicateur de tendance.

Donc, j’enfonce le clou de la réalité dans la plaie de la frustration de certains, - y compris la mienne - Somewhere Else se présentant dans un format raccourci, sa perception risque d’en être affectée par quelques thuriféraires de Marbles qui voyaient le groupe revenir aux sources et par là même recoller au peloton de tête des formations prog contemporaines. Le but n’est évidemment pas de ratisser plus large. Marillion a depuis longtemps dépassé cet objectif. Et là, il nous faut faire preuve d’objectivité et d’ouverture d’esprit. Le quintet britannique joue la musique qui lui plaît en se moquant de toutes autres considérations. De là à constater une nouvelle fois un éparpillement des masses versatiles, il n’y a qu’un pas…

Quand on a dit ça, il n’y aurait plus grand chose à ajouter de plus. Soit on adhère à cette philosophie en dent de scie, soit on va voir ailleurs. Mais, si l’on accepte ce nouveau voyage, c’est avec un état d’esprit tout neuf, débarrassé de l’énorme empreinte de Marbles. En effet, si l’on entrait rapidement et avec gourmandise dans l’espace Marbles – et quelle meilleure entrée possible qu’Invisible Man ! – il nous faudra réfréner cette maudite impatience tout autant que cette exigence de résultats immédiats (non moins détestable) si l’on veut appréhender au mieux ce nouvel espace.

Car pour tout dire, certaines pièces franchement dispensables n’aident pas à penser différemment. Prenez The Other Half qui ouvre ce nouveau chapitre de l’histoire de Marillion. C’est un titre qui se veut énergique mais qui se révèle bancal (un adjectif qui, finalement convient bien à l’album vous verrez…) avec à son entame une rythmique chaotique et dérangeante qui semble hors sujet. Le milieu du morceau et la fin s’en tirent mieux grâce notamment à la guitare de Rothery. Néanmoins, loin de soulever l’enthousiasme, il installe l’inquiétude.

Une inquiétude que l’écoute du faible single See It Like A Baby ne fait pas disparaître. Un titre si peu vendeur ouvre forcément des perspectives déconcertantes. A ce stade, on sent vite venir le syndrome Radiation. Et ce, quand bien même Thank You, Whoever You Are nous rabiboche l’espace de 4’51 avec le talent de mélodiste hors pair dont sait faire preuve le quintet britannique; ce, malgré le final qui laisse enfin Rothery s’exprimer avec le feeling que l’on connaît.

Car une nouvelle désillusion nous attend et elle se nomme Most Toys, un rock très bas de gamme, en tout cas à des années lumières de ce que sait faire Marillion dans ce registre. Sans doute le plus mauvais titre de l’album. Heureusement, il n’y en a « que » pour 2’47.

C’est peut-être avec la pièce éponyme que l’on retrouve le Marillion que l’on aime vraiment. Douceur de la mélodie, piano lent, voix aérienne d’Hogarth, grâce à Somewhere Else le titre (7’51), Somewhere Else l’album prend enfin son envol. C’est une pièce qui aurait pu figurer sans problème au générique de Marbles. Ce n’est pas la moindre de ces qualités.

Bonne impression confirmée quand démarre les premières mesures de Voice From The Past. Comme pour se rappeler à lui-même que le groupe maîtrise à la perfection l’alternance des climats, le dosage des ambiances et les montées d’adrénaline sur fond d’échanges claviers/guitare sont exemplaires. Deuxième grand titre de l’album sans contestation.

Et si l’on voulait perpétuer ce sentiment de plénitude, Marillion exauce nos vœux. Enfin en partie. Car sans faire retomber le soufflet, No Such Thing n’a pas la même saveur que ses devanciers. C’est un titre tout en percussions baigné dans une atmosphère éthérée. Plaisant, sans plus.

The Wound nous montre un Marillion délié qui se lâche enfin après les hésitations des débuts. Un titre à l’entame pop rock enfin réussie et qui comporte un break atmo bienvenu.

The Last Century For Man clôt la série des bons moments de S.Else. Tous les ingrédients sont là : voix d’Hogarth top niveau et individualités instrumentales au diapason. Rien à dire de plus si ce n’est que c’est sous cette forme-là que l’on aime entendre s’exprimer la formation anglaise.

Enfin nous passerons sur l’insipide Faith qui clôt ce 14e opus. Malgré une entame acoustique plaisante, il se noie rapidement dans le convenu et le banal.

Résumons-nous :
4 titres dispensables dont 2 vraiment mauvais :The Other Half – See It Like - Most toys – Faith
1 titre moyen :– No Such Thing
5 titres excellents ou “seulement” bon : Thank You, Whoever You Are – Somewhere Else - Voice From The Past - The Wound - The Last Century For Man. (ceux-là sont en bonne place dans mon lecteur MP3).

Bilan donc mitigé pour cet album qui n’a pas fini de diviser les fans du groupe. Une nouvelle fois serions-nous tentés de dire. Est-ce grave docteur ? Pas vraiment ! Marillion s’en remettra bien plus vite que nous ne le croyons et sera déjà passé à autre chose avant même que la polémique ne retombe. D’ailleurs, la sortie du 15e album est déjà annoncé pour le printemps 2008. Preuve que les Anglais n’en font pas toute une affaire et gère leur carrière sans trop se soucier des commérages d’internautes ou des piques acides de kronikeurs frustrés.

Et puisque c’est de moi dont il est question, mon opinion est faite ; pour les besoins de la kro, Somewhere Else a longtemps squatté mes oreilles. Mais une fois rangé dans ma cd-thèque, il se passera du temps avant qu’il n’en ressorte. Pour autant, ne prenez pas cela comme la condamnation définitive de Somewhere Else. Quelques pièces de l’album valent le détour et auront leurs inconditionnels dans le panthéon du groupe. Mais la vérité de « l’album magique » ou référence ne vaut pas pour ce dernier.


Rédigé par : Karadok | 14/20 | Nb de lectures : 11119




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Commentaire
Joss
Membre enregistré
Posté le: 12/06/2007 à 17h11 - (43321)
Assez déçu par cet album. Il faut dire que de Marillion je n'écoute quasiment que Marbles, qui est un véritable chef-d'oeuvre. Pas facile donc de passer après. Quelques titres sympa mais l'ensemble est pas mémorable. Dommage.



metal militia
Membre enregistré
Posté le: 12/06/2007 à 22h56 - (43332)
d'accord avec la kro , néanmoins je pense que je serais heureux de me le ressortir à l'occasion.



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