MALIGNANCY, ce grand inconnu. Non seulement ce vétéran qui a quand même fêté cette année ses deux décennies d’existence, mais en plus il fut trop souvent enfoui sous la masse de groupes de seconde zone qui faisait le bonheur de labels US comme feu UNITED GUTTURAL (où l’on trouvait aussi bien du très bon que du calamiteux) à la fin des années 90 dans le sillage du réveil de la scène death-metal. En même temps, c’était un peu aussi leur faute, eux qui se sont réfugiés derrière des pochettes et des titres d’albums aussi gore que bateau, comme ‘Intrauterine Cannibalism’ en 1999. Et je ne vous parle même de cette étiquette erronée de ‘side-project de MORTICIAN’, leur line-up comprenant pendant un temps pas moins de trois membres des obsédés des samples-de-film-d'horreur-qui-squattent-la-moitié-d'un-disque…

Reste que s’ils sont loin d’être du genre ultra-productif, ‘Eugenics’ est leur première sortie en cinq ans, ce troisième album confirme ce que l’on avait déjà deviné sur ‘Inhuman Grotesqueries’ (2007), disque à l’époque déjà sorti sur WILLOWTIP. Or croyez sur parole votre boucher de quartier, ce dernier point n’est pas qu’un détail… Car même si intrinsèquement tout cela reste du gros brutal death qui tache ‘à l’américaine’, option côte est, tels les scientifiques qu’ils dénoncent à travers ce concept-album dont les expérimentations génétiques finissent par se retourner contre eux et provoquer leur perte, MALIGNANCY tricote plus que jamais. C’est que même si leur frontman Danny Nelson continue de grogner d’une façon trop inintelligible et décalée – il s’est trompé de porte en croyant enregistrer avec un groupe de grind ou quoi ? – derrière, cela refuse de filer droit. Résolument techno-death dans l’âme mais si pas de façon ostentatoire dans l’absolu (pas de plans tape-à-l’oeil pour en mettre plein la vue ici), moins bourrin qu’avant et bien aidé par le mixage tout en finesse de Luca Minieri d’ILLOGICIST, ‘Eugenics’ ne tient pas en place et ne cesse de changer de tempo, parfois dans le même riff ! Alors tout cela reste plein de ‘sguuiiiiiiiik’ et de power-chords dansant la lambada certes mais cette façon d’être toujours en mouvement énerve autant qu’elle fascine. Surtout que la section rythmique constituée du batteur Mike Heller (récemment recruté par FEAR FACTORY) et de Ron J. Beaujard à la basse (ouuuuuui, le gros bourrin de MORTICIAN, de retour dans le groupe après six ans d’absence et dont le jeu tout en subtilité est à l’inverse total de son physique peu avenant) étonne par sa versatilité et sa faculté à compléter la guitare sans pour autant forcément la suivre exactement.

Hélas, comme trop souvent pour dans ce genre d’exercice, sans tomber non plus la tête la première dans la stérilité d’un BRAIN DRILL par exemple - qui, lui, se résume presque plus à un exploit sportif qu’à un disque de death – tout cela finit par former un gros gloubiboulga dont on a parfois du mal à retenir grand-chose, si ce n’est donc ce sens organisé du chaos assez bluffant. Mais à l’image de ces textes – pourquoi s’emmerder à pondre un concept-album si ce n’est pour qu’on en capte pas la moindre chose à moins d’avoir le nez collé aux paroles, chose que l’on fait rarement lorsqu’on écoute du death il faut l’avouer ? – on a malgré tout un peu l’impression d’écouter une tempête dans un verre d’eau alors qu’un peu moins d’esbroufe et plus de riffs-qui-tuent auraient largement changé la donne. Même si le résultat défriserait quand même un zoulou à trois kilomètres de distance… Alors basse fretless ou pas, gruik un jour, gruik toujours donc ?


Rédigé par : Olivier 'Zoltar' Badin | 14/20 | Nb de lectures : 12093