En voilà qui n'auront pas chômés... Depuis leur formation il y a 5 ans, les quatre New-Yorkais de Made Out Of Babies auront su élever leur groupe au rang des poids lourds de la scène noise-rock moderne. Déjà trois albums au compteur, dont les deux premiers chez Neurot Recordings (property of Neurosis), sans compter les side-projects de luxe auxquels participent les membres, entre Spylacopa, Red Sparowes, Battle Of Mice, United nations, j'en passe et des meilleurs. Donc pour ce nouvel album, exit Neurot Recordings et Steve Albini aux manettes, bonjour The End Records (Nadja, Ulver, Stolen Babies...) et Andrew Schneider (Pelican, Unsane, 5ive) pour l'enregistrement.

Allons-y gaiement, c'est la fête, lâchons la formule toute faite du scribouillard en mal d'inspiration, en affirmant que "The Ruiner" est l'album de la maturité pour Made Out Of Babies. Cet album sonne effectivement comme la récolte des fruits qu'ils ont pu semer dans les précédents opus, toujours plus complexe mais aussi paradoxalement plus fluide. Le quatuor disposait ce coup-ci de son propre studio et donc la possibilité de peaufiner ses compositions aussi longtemps qu'elles le nécessitaient, et cela se ressent, maîtrise totale du sujet. Du coup, pas un seul coup de serpe à donner aux titres, pas une louche de superflu à l'horizon, les plans s'enchaînant avec une souplesse déconcertante.

Oscillant entre noise-rock et les vélléités plus lourdes d'un Unsane, voire Neurosis au détour d'un final éreintant ("How to Get Bigger"), guitares et batterie gardent une même ligne de conduite, traduire en musique cette tension omniprésente et cette pesanteur urbaine qui les hantent. La basse, énorme (tenue par un ex-Kiss It Goodbye), bétonne les compositions, permettant à la guitare de nous offrir des plans toujours plus tortueux. Résultat, des titres en forme de montagnes russes ("Cooker"), mais que rien ne pourra faire sortir des rails. Même si les derniers titres de "The Ruiner" tireront plus vers le post-hardcore, sans jamais y sombrer totalement.

Bien qu'au final, tout ce travail instrumental sera souvent relégué au second plan, parce qu'il reste une gamine capricieuse dans l'équation, du genre qui aime bien tirer la couverture vers elle. Mais vu le résultat, elle échappera à la fessée, car il faut avouer que sans Julie Christmas, et aussi doués soient ses compères, les Made Out Of Babies ne seraient certainement pas là où ils en sont. S'autorisant tous les excès vocaux, elle vient magnifier les compositions, venant glisser ses petons dans les souliers de verre sur-mesure réalisés par ses camarades de jeu. Et surtout, la mère Noël a gagné en assurance ce qu'elle a perdu en urgence (et encore...), ce qui ne l'empêche pas de délivrer une prestation habitée et sincère toujours sur le fil du rasoir, capable d'enchaîner minauderies de petite garce et déraillements vocaux avec une facilité déconcertante.

Cette façon de souffler le chaud et le froid servira de bon résumé à "The Ruiner", album tellement fouillé et matière à inspiration que même Seldon Hunt a appris à pondre autre chose que des pochettes à base de symétries. S'éloigner pour mieux se retrouver. Les adultères musicaux des membres entre "Coward" et "The Ruiner" leur auront permis de prendre du recul sur leur travail, avant de revenir plus soudés et cohérents que jamais. Et "The Ruiner" en est la plus belle preuve...


Rédigé par : Crown_Me | 15,5/20 | Nb de lectures : 11672